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Depuis la chute des premières neiges la semaine dernière, les températures ont chuté brusquement dans toutes les régions du Royaume. Si les habitants des grandes villes, surtout continentales, grelottent déjà et sortent leurs manteaux, les populations dans les régions montagneuses et enclavées commencent à s’inquiéter, car les conditions climatiques y sont plus rudes. De nombreuses vidéos sur les réseaux sociaux sont publiées chaque année durant cette période montrant le calvaire que vivent ces gens pendant la saison froide. Leur plus grand défi : résister au gel et survivre jusqu’à la prochaine saison. «Cette zone est très connue pour le froid et les abondantes chutes de neige. Et comme nous ne disposons de rien, cela rend notre quotidien encore plus dur durant cette période», raconte Abdellah, père de famille dans le village de Bouiblane dans la région d’Imouzzer, au Moyen Atlas.
L’approvisionnement en bois démarre l’été
Avant l’arrivée de l’hiver, ces populations font en sorte de se constituer un stock de bois. C’est, en effet, le principal combustible de chauffage dans ces régions. «Le bois est indispensable pour rester au chaud durant cette période, surtout en cas de tempête de neige. C’est pourquoi l’approvisionnement commence dès l’été. Nous en constituons un bon stock pour l’hiver», nous confie-t-il.Cette période de grand froid est également très dure pour les plus jeunes. «Durant cette saison, ce sont toujours les enfants qui sont les plus vulnérables et les plus exposés au froid. Comme ils sont scolarisés, ils doivent sortir pour aller à l’école, mais malheureusement ils ne disposent pas de vêtements adaptés pour les tenir au chaud sur le chemin. Ils sortent souvent sans gants, sans bottes, sans manteau… Et quand il fait très froid ou qu’il y a de fortes neiges, les écoles suspendent les cours, ce qui les privent en plus de leur droit à l’éducation», témoigne Pr Zakaria Kadiri, chef du département de sociologie à la Faculté des lettres et des sciences humaine Aïn Chock (Casablanca), dans une déclaration accordée au quotidien «Assahraa Al Maghribia».
Pour venir en aide à ces familles en détresse, les associations multiplient les campagnes de solidarité. De nombreuses ONG se mobilisent, en effet, pour porter secours à ces populations. Elles ont d’ailleurs démarré l’opération de collecte de dons qui leur permettront de subvenir aux besoins de ces populations. C’est le cas de l’Association marocaine de solidarité (AMS) qui a lancé au début de ce mois de novembre son opération 2021 baptisée «Opération Froid Toubkal Action : un vêtement chaud pour un jour froid». «L’opération 2021 que nous avons commencé à préparer se déroulera en janvier prochain dans 5 douars dans la province de Taroudant. Les habitants de cette région sont souvent oubliés et ne reçoivent pas d’aides parce que les gens croient qu’il n’y fait pas très froid, alors que les températures descendent à -6°C en hiver. De plus, il s’agit d’une région non agricole, ce qui fait que la précarité y bat son plein», déclare Fatiha Mghoghi, présidente de l’AMS. «Nous savons que notre action est très attendue par ces populations. Notre campagne cette année cible 1.200 personnes. Nous préparons des packs de vêtements chauds, de denrées alimentaires et de produits d’hygiène», détaille-t-elle.
Brahim Iguiouaz, trésorier de l’association et originaire de la région, affirme que ces populations sont habituées à la souffrance et se battent toute l’année pour survivre. «Lorsqu’on vit dans une région enclavée qui, en plus, est non agricole, on n’a pas d’autre choix que d’aller chercher du travail en ville. Les familles comptent généralement sur leurs enfants majeurs, qui vont dans les grandes villes pour chercher du travail. Grâce à l’argent qu’ils leur envoient, ils essayent de s’approvisionner en denrées alimentaires», relève-t-il.
Appels sur les réseaux sociaux pour collecter les dons
Afin de les aider à s’en sortir et améliorer leurs conditions de vie, l’association déploie également des actions durables telles que la contribution à la plantation de certains arbres comme le noyer ou l’amandier dans la région. «Ce genre d’action permet à cette population d’être plus indépendante et de subvenir ainsi à ses besoins sans attendre des aides de la société civile et des autorités», indique Aboubakr Mezzour, membre actif de l’AMS.D’autres associations qui ont également l’habitude d’organiser des caravanes spéciales hiver au profit des familles dans les zones montagneuses ont initié, depuis quelques jours, des appels sur les réseaux sociaux pour collecter les dons nécessaires. Il s’agit notamment des associations Al Ataa, El Baraka angels, Casa chabab. Et la liste est longue.L’Intérieur, la Santé et l’Équipement à pied d’œuvre
Le gouvernement fixe, chaque année depuis 2009, un plan d’intervention lors des périodes de neiges, de pluies et de vagues de froid, afin d’apporter l’assistance nécessaire aux populations vivant une situation de précarité dans les régions montagneuses. Contactée par nos soins, une source du ministère de l’Intérieur nous a affirmé que la préparation du plan de lutte contre le froid dans les régions montagneuses et enclavées est en cours et que celui-ci sera officiellement annoncé dans les semaines à venir.
Un plan similaire sera lancé à partir du 15 novembre, nous assure une source du ministère de la Santé. En attendant, les comités provinciaux des régions concernées ont commencé à se réunir pour examiner les mesures proactives destinées à faire face aux effets de la vague de froid et des chutes de neige. C’est le cas du comité provincial de veille et de coordination de Taounate qui s’est réuni mardi dernier pour préparer sa stratégie. Le comité a prévu de mobiliser les moyens logistiques et humains nécessaires au désenclavement des douars concernés, de suivre de près l’état des femmes enceintes pour leur garantir un accouchement dans des conditions optimales et de recenser les personnes sans-abri dans la perspective de leur prise en charge.Le plan d’action provincial porte également sur l’organisation des actions de solidarité en faveur des populations et des élèves des douars touchés, notamment au niveau des communes de Timdit, cercle de Taounate, El Ouadka et de Rotba. En outre, plus de 1.500 lots de vêtements, 3.051 couvertures et 300 fours améliorés devraient être distribués aux populations des communes touchées par la vague de froid et les intempéries.
De même, le Comité de veille et de suivi de la province de Taza a organisé la semaine dernière, une réunion où a été présenté le plan provincial relatif à la lutte contre les effets de la vague de froid. Celui-ci est axé sur les visites de terrain, la distribution des aides (couvertures, fours améliorés, denrées alimentaires…), le renforcement des soins de santé à travers notamment des campagnes médicales… Le plan d’action prévoit, également, le fourrage subventionné pour le bétail au profit des populations qui en ont besoin.De son côté, le département de l’Équipement se mobilise pour renforcer son dispositif de viabilité hivernale afin d’assurer la pérennisation de la circulation sur l’ensemble du réseau routier susceptible d’être enneigé. Un plan d’action a été mis en place et porte notamment sur l’organisation des équipes de permanence, la mobilisation des moyens de communication internes et externes, de la logistique d’intervention et des ressources humaines. Le plan concerne également le renforcement de l’approvisionnement en produits de première nécessité, l’aménagement des barrières et des abris de neige et la préparation des routes en perspective du début de la saison.Comment est vécue la période de grand froid par les populations dans le milieu rural ?
Les déclarations de Pr Zakaria Kadiri, chef du département de sociologie à la Faculté des lettres et des sciences humaines Aïn chock
«Cette période de grand froid n’est pas vécue de la même façon par les populations dans le milieu rural, puisque certaines régions sont bien plus froides et isolées que d’autres. Les populations les plus exposées au froid sont celles qui habitent dans les montagnes ou dans les steppes où même s’il ne neige pas il y fait très froid l’hiver. Ces gens rencontrent de nombreuses difficultés durant cette période, notamment pour se réchauffer. Vu leurs moyens financiers très limités, elles se contentent du peu de bois dont elles disposent pour chauffer une ou deux pièces, parfois que la cuisine. Généralement, toute la famille se regroupe dans la même pièce pour se réchauffer.
Durant cette saison, ce sont toujours les enfants qui sont les plus vulnérables et les plus exposés au froid. En effet, comme ils sont scolarisés, ils doivent sortir pour aller à l’école, mais malheureusement ils ne disposent pas de vêtements adaptés pour les tenir au chaud sur le chemin. Ils sortent souvent sans gants, sans bottes, sans manteau… Et quand il fait très froid ou qu’il y a de fortes neiges, les écoles suspendent les cours, ce qui les prive en plus de leur droit à l’éducation.»Face à toutes ces difficultés, on se pose la question : que doit-on faire pour les aider ?
«Certes, les autorités mettent en place des plans d’action chaque année pour faire face aux conditions climatiques sévères, mais les plus fortes mobilisations qui sont attendues par ces populations sont celles de la société civile. Durant cette période, beaucoup d’associations organisent des campagnes de solidarité en faveur de ces personnes pour subvenir à leurs besoins en termes de denrées alimentaires, vêtements chauds… elles assurent même parfois des consultations médicales.
