Menu
Search
Jeudi 18 Avril 2024
S'abonner
close
Jeudi 18 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next Économie

Projet de loi de Finances 2022 : ce qu'en pensent opérateurs et économistes

Projet de loi de Finances 2022 : ce qu'en pensent opérateurs et économistes

 Mohammed Rahj, économiste : «La relance économique viendra des investissements publics»

«Le projet de Budget 2022 constitue une continuité des lois de Finances précédentes. C’est-à-dire la continuité de l’État. Ce projet de texte met la relance économique au centre de ses priorités puisqu’il vient apporter de l’aide et de l’appui aux entreprises afin de sauvegarder et créer de l’emploi. Parallèlement à cet effort, il y a l’implémentation de certaines dispositions prévues par le nouveau modèle de développement. Sur le plan social, nous constatons la reprise du concept de l’État social. La PLF 2022 enclenchera donc le processus d’élargissement de la couverture sociale avec un budget dédié de 22 milliards de dirhams. La population du Ramed sera concernée. Le projet de Budget prévoit aussi la mise en place et l’opérationnalisation de la charte de l’investissement dont le texte de loi avait déjà été préparé par l’ancienne équipe gouvernementale. Il sera donc question avec ce gouvernement d’adopter le projet de texte qui la porte. Enfin, la continuité sera consacrée avec la réforme fiscale puisque l’ancienne équipe avait déjà présenté un projet de loi de réforme qui a été adopté par le Parlement. Ceci dit, le projet de Budget 2022 comporte certaines nouveautés. Il s’agit essentiellement des crédits accordés aux départements de la Santé et de l’Enseignement avec une couverture financière additionnelle de 9 milliards de dirhams. Par ailleurs, des mesures sont prévues pour la relance de l’emploi à travers le projet “Forssa” où il serait question d’accompagner quelque 50.000 jeunes entrepreneurs. En plus, le nouveau gouvernement table sur la création de 250.000 emplois sur les deux prochaines années. De même, au niveau du Budget de l’État, nous constatons qu’il y a plus de postes budgétisés par rapport à l’exercice en cours avec plus de 26.000 postes. Sur le plan fiscal, le projet de Budget 2022 comporte de nouvelles taxes intérieures à la consommation (TIC). Je pense que cela a été décidé dans l’objectif d’appuyer financièrement l’élargissement de la couverture sociale. En plus, le gouvernement a décidé de consacrer la contribution sociale de solidarité dont les taux ont été augmentés, au Fonds spécial de couverture sociale. Pour appuyer les entreprises dans le processus de relance, le PLF prévoit la réduction du taux d’impôt sur les sociétés industrielles de 28 à 27% et l’abaissement du taux de la cotisation minimale de 0,5 à 0,4%. La relance économique viendra également des investissements publics qui s’élèvent à 245 milliards de DH. Bien sûr, l’État va relancer l’économie à travers les marchés des grands travaux pourvu que ceux-ci profitent aux entreprises nationales. Ce qui est de nature à booster les créations d’emploi et de la richesse.» 

*********** 

Nabil Adel, économiste : «Les 3,2% de croissance ne permettront de créer que 30.000 à 40.000 emplois»

 

«Le projet de Budget 2022 s’inscrit dans une logique de continuité. Nous ne relevons pas de rupture majeure par rapport aux lois de Finances précédentes. Je pense que le premier Budget réel de ce gouvernement sera celui de 2023. Les signaux qui y sont émis par la nouvelle équipe aux commandes de l’Exécutif ne sont pas clairs. C’est un gouvernement qui a été élu pour un programme de gauche qui accorde une grande importance aux créations d’emplois et programmes sociaux. Or, les premières mesures que nous découvrons dans ce projet de texte ne vont pas dans le sens de ces engagements. Exemple, les nouvelles taxes intérieures à la consommation (TIC) ciblent essentiellement la classe moyenne, le moteur essentiel de la demande. Ce gouvernement va rapidement être confronté à la réalité d’exercice du pouvoir puisque les promesses faites au cours de la campagne électorale vont le poursuivre. Les électeurs vont donc les lui rappeler régulièrement. Si l’on prend la croissance prévue pour 2022 (3,2% Ndlr), je ne pense pas qu’avec ce niveau l’Exécutif va pouvoir créer les 200.000 emplois sur lesquels il s’est engagé. Les 3,2% ne permettront de créer que 30.000 à 40.000 emplois. Donc là, l’Exécutif aura à faire un travail réellement d’équilibriste. D’un côté, il s’est engagé à maintenir les équilibres macro-économiques, alors qu’il pouvait s’en passer et assumer comme ce que font d’ailleurs les gouvernements de Droite à travers le monde, et de l’autre, il ambitionne de relancer la machine économique. C’est connu, pour enclencher une réelle relance économique, il faut nécessairement augmenter la dépense publique eu égard à ses effets d’entraînement sur la croissance et l’emploi. Le fait est que dans ce projet de Budget, la dépense publique n’est pas à la hauteur des ambitions sociales de ce gouvernement. Sur les 3,2% de croissance, l’on va avoir 2% qui viendraient de la consommation des ménages, 1,8% de l’investissement privé et à peine 0,8% de l’investissement public.»

*********** 

Hakim Marrakchi, industriel : «Compte tenu du rapport sur le NMD, j’espérais un coup de pouce sur la compétitivité»

«Mon point de vue sur le projet de loi de Finances pour 2022 est mitigé : D’un côté, compte tenu des besoins de financement de l’État, je craignais vivement une augmentation de la pression fiscale sur les entreprises. De l’autre côté, compte tenu du rapport sur le nouveau modèle de développement (NMD), j’espérais un coup de pouce sur la compétitivité. Finalement, et pour l’instant, il n’y a ni l’un ni l’autre, et ce projet de LF semble s’inscrire dans la continuité du précédent. Je reste convaincu que des amendements seront introduits et permettront d’initier une nouvelle politique industrielle en améliorant la compétitivité sur les intrants et en favorisant le travail, en même temps qu’elle permettra de faire émerger l’économie verte et la transition énergétique dont il est fait mention dans ce rapport. En tant qu’industriel et comme tous ceux qui sont négativement impactés par la pandémie et ses conséquences économiques, j’espère que des amendements seront introduits au niveau de la cotisation minimale de l’IS qui n’a été ramenée que de 0,50 à 0,45%, tout comme j’espère au cours de l’année prochaine une refonte de la fiscalité locale pour permettre aux entreprises industrielles et hôtelières d’avoir accès au financement à travers les OPCI. En effet, la taxe professionnelle est fortement augmentée selon que l’on est locataire ou propriétaire et ce différentiel est une entrave majeure à la levée de fonds dont nous avons grandement besoin en ces temps difficiles. Mes préoccupations sont, je crois, largement partagées et j’espère qu’elles seront portées par la CGEM lors des prochaines discussions avec le gouvernement.»

 

Said Naoumi et Abdelhafid Marzak

Lisez nos e-Papers