Menu
Search
Samedi 20 Avril 2024
S'abonner
close
Samedi 20 Avril 2024
Menu
Search
Accueil next Nation

Rétrospective : Mustapha Sehimi décortique les événements politiques phares de 2021

Invité de l’émission l’Info en Face, le politologue Mustapha Sehimi revient sur les faits qui ont marqué l'année 2021. Après un premier semestre atone, selon lui, en raison des restrictions anti-Covid, le second semestre 2021 a été marqué par une dynamique allant de la présentation du rapport général sur le nouveau modèle de développement à la nomination du gouvernement Akhannouch, en passant par une campagne électorale où l'on a assisté pour la première fois à un recours massif aux réseaux sociaux.

Rétrospective : Mustapha Sehimi décortique les événements politiques phares de 2021

L'année 2021 a été une année d'échec pour le Parti de la justice et du développement (PJD) et a également été celle de la fin d'une «parenthèse islamiste» au Maroc et ailleurs, affirme le politologue. Le PJD a été sanctionné par les électeurs, indique M. Sehimi qui rappelle qu’en 2016 cette formation politique avait obtenu 1.570.000 voix et qu’en 2011, elle en avait obtenu 1.080.000.

2021, marque l’échec du PJD… et la fin de la parenthèse islamiste

«En 2016, le PJD avait 125 députés et en 2021, il ne compte plus que 13 députés et a obtenu 330.000 voix. C’est-à-dire qu’il a perdu 80% de son électorat», précise encore le politologue, faisant remarquer que ce parti «a perdu au moins 50% de son électorat traditionnel». Cette défaite s'explique, selon M. Sehimi, par le bilan du gouvernement El Othmani «qui est tout à fait sujet à caution». «Ils n’ont pas porté les réformes qui devaient être faites, ils n’ont pas respecté les promesses électorales et ils ont fait montre en plus d’une gestion statutaire, faite d’une addition d’ambitions personnelles, au détriment des valeurs et des idéaux du parti», souligne le professeur Sehimi, qui voit «que nous sommes dans une autre séquence historique qui est celle de la fin de la mouvance islamiste au Maroc et ailleurs», laquelle n’est pas porteuse de réformes et de vertus et qui s’est montrée incapable de gérer les affaires publiques.

Une campagne électorale à minima sur le terrain et un déferlement du RNI sur le Net

Revenant sur la campagne électorale, M. Sehimi note que cette campagne a été courte (car réduite à 15 jours seulement) et difficile, compte tenu des restrictions anti-Covid qui n'ont pas permis de grandes mobilisations populaires. Cette campagne, selon le politologue, n'a pas servi les intérêts d'un certain nombre de partis, notamment le PJD, qui n'a pas pu organiser de grands meetings et donc réactiver tout le maillage territorial dont il disposait. Cette campagne n'a servi que moyennement le parti du Rassemblement national des indépendants (RNI), étant donné qu’il était en campagne depuis 2016, rappelle M. Sehimi. «C’est une longue marche qu'a menée Aziz Akhannouch et le RNI avec le programme “100 jours, 100 villes”, et elle a porté ses fruits», dit-il.
Cette campagne a également été marquée par la présence massive du RNI sur la Toile, notamment sur les réseaux sociaux, et sur ce point, M. Sehimi estime qu'«on ne peut pas faire le procès du RNI s'il a su mobiliser les moyens pour donner de la visibilité à son programme», tout en se demandant : «qui empêchait les autres partis de faire de même ?» Et de relever que la formation dirigée par Aziz Akhannouch a fait une campagne efficace, avec beaucoup de déplacements, une mobilisation de toutes les structures mises en place et surtout une ouverture sur les jeunes.
À propos des grandes promesses électorales faites durant cette campagne, le politologue rappelle d’abord que la politique doit donner de l'espoir, «et si possible, la politique doit faire rêver». Quant à la faisabilité de ces promesses, M. Sehimi estime que la barre a effectivement été placée trop haut, mais qu'il s'agit de «marketing politique». «Il (Aziz Akhannouch) n’a pas dit 950.000 ou 872.475 emplois, mais il a dit un million ! Pourquoi ? Parce que c’est du marketing politique. Un million, ça frappe !» explique-t-il.

Un gouvernement en manque de «communication de crise»

D'après M. Sehimi, le gouvernement Akhannouch ne maîtrise pas la communication de crise (comme la crise provoquée par l’obligation du pass vaccinal). «La communication de crise implique la réactivité. Il ne faut pas attendre quatre jours pour faire un communiqué. Il faut qu'il y ait une cellule quelque part pour réagir dans la journée», souligne-t-il, faisant observer que «le champ médiatique est ouvert au digital où les citoyens ont droit à la parole».
Le politologue s’arrête également sur la communication institutionnelle du gouvernement. À ce niveau, il constate qu'il y a des ministres qui ont multiplié les sorties médiatiques (comme le ministre de la Justice) et d'autres qui sont presque inaudibles. En ce qui concerne plus particulièrement le Chef du gouvernement, M. Sehimi souligne qu'il ne communique pas, car il n'a pas de «goût pour la communication».
Se référant également au cas de la fixation à 30 ans de l'âge d'accès au concours des enseignants, le politologue souligne qu'il s'agit là d'un cas d’école intéressant de mauvaise communication. «Pendant des semaines, le ministre de l’Éducation nationale tenait un discours de dialogue avec les syndicats les plus représentatifs du secteur, et puis un soir, le couperet est tombé. Cela remet en cause la crédibilité de son discours», affirme M. Sehimi.
Par ailleurs, le politologue plaide pour qu'on laisse du temps à ce gouvernement. Durant cette première année, il pense que le gouvernement Akhannouch n'aura pas beaucoup de marge de manœuvre, puisqu'il est sous la contrainte de la loi de Finances (qui est celle du précédent cabinet). «Il faut attendre l'été prochain, lors de l'élaboration de la prochaine loi de Finances, pour évaluer sa capacité à mettre en œuvre son programme», indique M. Sehimi.

Accord tripartite Maroc-États-Unis-Israël : que du bonus pour le Maroc !

Au sujet de l'accord tripartite Maroc-États-Unis-Israël, le professeur Sehimi est d'avis que cet accord a consolidé la position du Maroc en tant que puissance influente sur la scène internationale. Sur la question du Sahara, le politologue constate que la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté du Maroc sur ses provinces du Sud a eu un effet domino qui s'est manifesté d'abord par la résolution 2602, qui revalide les anciennes résolutions et consacre une fois de plus la prééminence du plan marocain d'autonomie. Cette position américaine sur la question du Sahara aura également un effet de «ruissellement» sur d'autres pays, notamment européens et africains, qui devront donc se départir de leur ambiguïté et de leur frilosité à l'égard de cette question.

Lisez nos e-Papers