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Le déficit d'apprentissage des enfants freine le développement humain du Maroc (Laftit)

La deuxième édition des Assises nationales du développement humain a eu lieu lundi à Skhirate autour du thème «La qualité des apprentissages, clé du développement humain». Placées sous le Haut Patronage de S.M. le Roi Mohammed VI, ces Assises, organisées par l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH), ont été l’occasion de mettre en avant les expériences internationales en matière de lutte contre la crise des apprentissages. Marqué par la présence de plusieurs membres du gouvernement concernés par la mise en œuvre de l’INDH et de nombre d’acteurs publics et privés, cet événement a permis de revenir sur les détails du programme TaRL, «Enseigner au bon niveau», implémenté depuis mai dernier à titre expérimental en vue de sa prochaine généralisation.

Le déficit d'apprentissage des enfants freine le développement humain du Maroc (Laftit)
Ph. Kartouch

Relevé par de nombreux acteurs, dont le département de l’Éducation nationale, le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS), la société civile…, le retard en matière de qualité des apprentissages était au centre des discussions lors de la deuxième édition des Assises nationales du développement humain, tenue lundi à Skhirate, sous le thème «La qualité des apprentissages, clé du développement humain».

Prenant part à cet événement, plusieurs experts et spécialistes nationaux et internationaux de renom, des responsables de différents départements de l’enseignement, des élus, des représentants d’organisations internationales… se sont mis d’accord sur le diagnostic établi. Ainsi, ces Assisses avaient pour objectif de sensibiliser les différents acteurs impliqués dans la question éducative à la différence entre la scolarisation et les apprentissages, et à l’importance de ces derniers pour l’impulsion du capital humain.
Cet espace d’échange a également servi à attirer l’attention sur l’importance de concentrer les efforts sur les premières années de scolarisation, à travers l’acquisition effective des apprentissages de base afin d’éviter l’accumulation des difficultés à l’origine des taux élevés de décrochage scolaire et de la faible performance des élèves dans les tests internationaux. Par ailleurs, le moment phare de ces Assises a été le partage des expériences de pays qui ont connu des avancées en matière de réforme éducative. En effet, un grand intérêt a été accordé à l’expérience indienne développée par la Fondation Pratham. Il s’agit du programme TaRL, «Enseigner au bon niveau» (Teaching at the Right Level). C’est une démarche qui permet d’aider les enfants du cycle primaire en difficulté à lire tout en comprenant ce qu’ils lisent, à écrire et à s’exprimer et à acquérir les notions de base du calcul. Une approche basée sur le jeu et les échanges pour soutenir l’élève dans l’apprentissage de ces compétences de base. Dans ce sens, L’INDH et le département de l’Éducation nationale, du préscolaire et des sports tablent sur l’approche TaRL qu’ils sont en train d’expérimenter. Méthode qui s’inscrit dans la vision de la phase III de l’INDH, centrée sur la valorisation du capital humain à travers des interventions ciblant les premières années de la vie. De la sorte, quelque 50 inspecteurs d’éducation ont été formés constituant des mentors qui ont, eux-mêmes, formé quelque 600 enseignants issus de 250 écoles sur cette méthode. Une action qui a profité à 12.000 élèves à fin juillet dernier, alors que le but est d’en faire bénéficier quelque 100.000 élèves en vue d’implémenter cette nouvelle approche dans le cursus d’enseignement marocain. C’est à cette fin qu’une deuxième phase de cette expérience a démarré, au cours de ce mois de septembre. Elle sera suivie, à la fin de ce mois, d’actions d’évaluation afin de vérifier les résultats auxquels elle a abouti. Avant de se lancer dans la généralisation de ce projet, des évaluations seront également réalisées durant les mois d’octobre, de novembre et de décembre. Reconnaissant la crise des apprentissages comme une problématique mondiale qui a été exacerbée par la pandémie causée par la Covid-19, les participants ont souligné que la Banque mondiale estime que 70% des enfants de 10 ans pâtiraient de cette dégradation du niveau des apprentissages en 2022.

«Au Maroc, la situation suscite également l’inquiétude des responsables et des familles. La crise sanitaire a frappé de plein fouet le secteur éducatif, accentuant un décrochage scolaire déjà préoccupant avec quelque 331.000 enfants ayant quitté le système scolaire au titre de l’année scolaire 2020-2021. De plus, les fermetures d’écoles affectent de manière disproportionnée les élèves les plus défavorisés, qui ne disposent pas des outils numériques leur permettant de bénéficier de l’enseignement à distance», a-t-il été relevé lors de ces Assises. S’exprimant à l’ouverture des travaux de cette rencontre, le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, a souligné que la problématique de la qualité des apprentissages représente, à l’heure actuelle, l’un des défis majeurs. Selon lui, les données nationales au titre de l’année scolaire 2020-2021 appuient ce constat, en particulier celles relatives aux élèves déscolarisés et au niveau du déficit dans les apprentissages pour les enfants scolarisés de moins de 10 ans, ce qui a impacté l’indice de développement humain du Royaume qui n’a pas dépassé 50%», a-t-il déclaré.

Cette situation, ajoute-t-il, est principalement due au manque d’acquisition par les apprenants des connaissances de base en matière de lecture, de mathématiques et de sciences, comme le confirment les résultats des concours internationaux dans lesquels les élèves marocains ont, malheureusement, occupé les dernières places du classement par rapport à leurs confrères des pays participants. «Ce qui nous appelle tous à redoubler d’efforts pour instaurer un modèle éducatif national capable de relever les défis actuels et futurs et garantir un enseignement de qualité, équitable et durable au profit de l’ensemble des élèves marocains, en particulier en milieu rural et dans les zones reculées», propose-t-il. Un diagnostic confirmé par les données du Programme national d’évaluation des acquis des élèves qui fait état d’un taux de 41% d’élèves n’ayant pas les acquis linguistiques requis des années antérieures afin de pouvoir poursuivre les cours de français prescrits en sixième année du primaire. Seuls 12% ont assimilé ces acquis et peuvent suivre la totalité du programme prescrit, alors que 27% des élèves ont acquis 89% du programme. Ce qui donne une idée de l’ampleur du travail devant être entrepris pour pallier ces dysfonctionnements.

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Mohamed Dardouri, wali coordinateur national de l’INDH 

«Il faut s’attaquer au nœud du problème, la qualité du savoir» 

«L’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) organise la deuxième édition des Assises nationales du développement humain autour du thème «La qualité des apprentissages, clé du développement humain». C’est un thème central pour l’INDH dont la phase III traite de tout ce qui est impulsion du capital humain au Maroc en faveur des générations montantes. Aujourd’hui, beaucoup de choses ont été faites, notamment la généralisation du préscolaire dans le rural, projet dans lequel nous sommes très avancés aux côtés du ministère de l’Éducation nationale, qui fait la même chose. On continue aussi à travailler sur l’appui social à travers le transport, l’hébergement, la santé des enfants, etc.

Aujourd’hui, on est arrivé à un moment où on doit s’attaquer au noeud du problème, à savoir la qualité du savoir. Ainsi, compte tenu de l’agilité et de la facilité ainsi que de la présence de l’INDH un peu partout au Maroc, nous avons agi en étroite collaboration avec le département de l’Éducation nationale, pour voir les expériences internationales pour accélérer les systèmes d’apprentissage. Cela a lieu dans un contexte où la Covid a généré une crise et que des écoles ont été fermées pendant un certain temps. L’objectif est de permettre aux élèves, surtout dans les zones rurales, de rattraper les retards. Maintenant, nous avons l’occasion de voir des méthodes qui ont réussi. Nous avons les exemples de l’Inde, du Brésil et d’autres pays qui ont mené des expériences extrêmement intéressantes sur un nombre d’enfants très élevé et qui ont obtenu des résultats. Au Maroc, on veut s’inspirer de ces expériences pour essayer d’élever le niveau d’apprentissage des enfants. Parce que la qualité de l’apprentissage est la base du développement.

Ainsi, l’expérience TaRL a démarré avec le ministère de l’Éducation nationale. Là, nous sommes à la phase du test et de l’expérimentation pour savoir si cette méthode est adaptée à nos spécificités, parce que chaque pays à ses propres spécificités. Nous avons démarré, et cela a donné de très bons résultats. Nous allons donc essayer d’étendre cette expérience.
L’INDH est là pour aider les départements concernés, surtout l’Éducation nationale, pour construire des modèles sur la base de ce qui existe. L’INDH avait également participé à la conception du modèle du préscolaire. L’INDH est donc là pour incuber et fédérer puisqu’on a cette capacité de réunir tout le monde, le public, le privé, les élus… pour réfléchir sur une problématique. Cette question de l’apprentissage n’est pas seulement l’affaire de l’Éducation nationale, c’est l’affaire de tous.»

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