La transformation digitale des collectivités territoriales est érigée en priorité par le ministère de l’Intérieur et particulièrement la Direction générale des collectivités territoriales. Ce chantier lancé en septembre 2020 s’inscrit dans le cadre d’une stratégie quinquennale tracée par la DGCT et qui s’appuie sur quatre axes, à savoir la gouvernance, l’accompagnement des ressources humaines, la mise en place des infrastructures et la sécurisation des plateformes. «C’est un chantier de taille que la Direction générale des collectivités territoriales mène à bras le corps dans le but de simplifier les procédures et rapprocher l’administration des citoyens», nous confie Amine Souissi, chargé de la division de la transformation digitale à la Direction générale des collectivités territoriales dans une déclaration accordée au «Matin» en marge d’une conférence organisée mardi à Rabat.
Le projet, qui a déjà pris son rythme de croisière, a permis de dématérialiser pas moins de 70 procédures administratives proposées par les collectivités territoriales sur les 150 procédures prévues dans le cadre de la stratégie. Ces services sont proposés à travers une dizaine de plateformes élaborées par la DGCT et financées par des fonds publics ou en partenariat avec des acteurs privés. Il s’agit en l’occurrence des plateformes Rokhas, Chafafiya et Watiqa.
Pour mener à bien ce chantier, la DGCT œuvre en étroite collaboration avec d’autres partenaires, notamment l’Agence de développement du digital, créée il y a 3 ans et dont la mission dépasse l’accompagnement des administrations et des collectivités territoriales dans la mise en place de nouvelles plateformes, puisqu’elle va jusqu’à l’échange des informations entre administrations, d’une part, et entre celles-ci et les collectivités territoriales, d’autres part. Le but est de créer une sorte de synergie entre les administrations et de proposer un service administratif dématérialisé complet aux usagers.
L’Agence procède également à l’accompagnement et la formation des ressources humaines en vue d’améliorer leurs compétences dans le domaine digital. «Nous avons déjà pu organiser pas moins de 1.000 formations à distance depuis l’avènement de la Covid-19 qui ont profité au total à pas moins de 40.000 fonctionnaires. Parallèlement à la mise en place d’une plateforme numériques pour accueillir les demandes en formation», nous précise Khalid Ouakka, directeur du gouvernement électronique e-gov au sein de l’Agence de développement du digital.
Des progrès à plusieurs vitessesSi le chantier de la dématérialisation des collectivités territoriales semble bien avancer, il n’en demeure pas moins confronté à quelques difficultés, notamment la résistance de certains fonctionnaires des collectivités territoriales. Habitués à travailler selon les méthodes traditionnelles, ils ont du mal à se départir de leurs anciens réflexes et à s’approprier les nouvelles technologies. Pour remédier à ce problème, la direction recourt au principe «du bâton et de la carotte» pour encourager les fonctionnaires à adhérer à l’effort de transformation digitale. «Nous procédons à la motivation et l’encouragement des collectivités territoriales qui affichent de bonnes performances et parfois la direction émet des circulaires pour rappeler à l’ordre certaines collectivités encore à la traine», explique M. Souissi.Outre cette difficulté, la DGCT est confrontée au problème de l’équipement de pas moins de 1.590 collectivités territoriales en matériel informatique performant. Un véritable «casse-tête» pour cette administration qui devra gérer également en parallèle la mise en place de nouvelles plateformes numériques et surtout sécuriser tous les services digitaux proposés. «Pour régler la question du matériel, la direction a déjà procédé au lancement de plusieurs appels d’offres. Quant à la question du stockage et de la sécurisation des informations recueillies, elle fait l’objet de discussions avec l’Agence de développement du digital afin de créer un e-cloud sécurisé de stockage», explique le chargé de la division de la transformation digitale. Le ministère de l’Intérieur planche également sur l’identification de solutions pour améliorer l’accès à internet pour les collectivités territoriales situées dans des zones mal desservies en haut débit. «Certaines solutions sont déjà pratiquées, notamment la connexion par satellite», note le même interlocuteur.
Des délais de règlement très mitigésMais la Direction générale des collectivités territoriales n’est pas au bout de ses peines. Elle est confrontée à autre défi de taille : la capacité de certaines collectivités territoriales qui ont du mal à respecter les délais réglementaires dans la livraison de leurs services, malgré leur digitalisation. Pour surmonter cette difficulté, la direction préfère encourager la compétitivité entre collectivités en publiant sur son site web et sur les réseaux sociaux les noms de collectivités territoriales ayant affiché les meilleures performances afin d’inciter les autres à faire pareil. «Bien que les services soient dispensés avec un peu de retard, le citoyen dispose aujourd’hui de la possibilité de suivre en temps réel l’avancement de sa requête et d'identifier l’étape où «ça bloque. Il faut dire que la digitalisation est une réforme importante qui nécessite l’implication de tous et les collectivités en premier, mais nécessite également du temps pour aboutir. C’est pourquoi nous avons tracé le cap pour les trois prochaines années», conclut M. Souissi.