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Blanchiment de capitaux: les déclarations de soupçons toujours en hausse

L’Unité de traitement du renseignement financier (UTRF) vient de publier son rapport pour l’année 2020. Il en ressort une nette progression du niveau de l’activité déclarative de la part des personnes assujetties. Le nombre de déclarations de soupçon est ainsi passé de 318 en 2015 à 2.137 en 2020. Les détails.

Blanchiment de capitaux: les déclarations de soupçons toujours en hausse
Jawhar Nfissi, DG de l'UTRF

Durant l’année 2020, l’UTRF (désormais appelée Autorité nationale du renseignement financier depuis 2021) a reçu un total de 2.137 de déclarations de soupçons liées à d’éventuels cas de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Cela représente une augmentation de 23% par rapport à 2019, année où l’UTRF a recueilli 1.737 déclarations de soupçon, comme l’indique le rapport annuel de cette Unité pour l’année 2020.

Les personnes assujetties de plus en plus sensibilisées

Au cours de l’année 2020, l’UTRF a reçu un total de 2.113 déclarations de soupçon liées au blanchiment de capitaux et 24 autres déclarations relatives au financement du terrorisme, ce qui porte le nombre total des déclarations reçues depuis 2009, date de création de l’UTRF, à 7.117 pour celles liées au blanchiment de capitaux et à 189 pour celles liées au financement de terrorisme, indique le rapport. Aussi, précise-t-on dans le même document, «l’année 2020 a été marquée par une augmentation de 26% des déclarations de soupçon de type “blanchiment de capitaux” et une diminution de 62% des déclarations de soupçon de type financement de terrorisme».
Au cours de la même année, poursuit le rapport, «l’UTRF a tenu des réunions de sensibilisation périodiques avec les personnes assujetties des secteurs financier et non financier, en coordination avec les autorités de supervision, afin d’améliorer leur compréhension des nouveaux risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Lors de ces réunions, l’UTRF a partagé ses appréciations sur les déclarations de soupçon reçues, les temps de réponse pour les demandes d’informations, les défaillances techniques détectées et les indicateurs de soupçons en relation avec la pandémie de la Covid-19, ainsi que les plans d’action adoptés». Ces réunions, ajoute-t-on, «s’inscrivent dans le cadre du suivi des indicateurs de performance et de la pertinence des rapports et informations que l’UTRF reçoit auprès des assujettis».

Pour ce qui est des principaux pourvoyeurs des déclarations de soupçon, le rapport nous apprend que les établissements de paiement (services de paiement et transfert de fonds) viennent en tête au titre l’année 2020, contrairement aux années précédentes. Leur part représente 53,9% de l’ensemble des déclarations émanant des personnes assujetties des secteurs financier et non financier contre 37,07% en 2019. En plus, les restrictions de déplacement et le confinement des villes et des quartiers ont contribué à l’accroissement de l’utilisation des services offerts par les établissements de paiement pour transférer ou collecter des fonds dans le cadre d’opérations à caractère suspect. Quant au secteur bancaire (banques conventionnelles, banques offshore et banques participatives), il vient en deuxième position avec une part de 40,1% de l’ensemble des déclarations de soupçon reçues par l’UTRF en 2020.

Les personnes non assujetties impliquées également dans la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

Les communications spontanées nationales émanant des différents partenaires nationaux de l’UTRF (organismes non assujettis comme l’Administration des douanes et impôts indirects, Bank Al-Maghrib, le ministère de l’Économie et des finances, le ministère des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, l’Office des changes, l’Autorité marocaine du marché des capitaux, la présidence du ministère public et d’autres personnes morales) ont continué à évoluer depuis 2016, même s’ils ont enregistré une diminution en 2020 (18 communications spontanées reçues) par rapport à 2019 (27 CS reçues). Les deux principaux émetteurs de communications spontanées durant les trois dernières années sont l’Office des changes et le ministère des Affaires étrangères, de la coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, souligne le rapport.
Quant aux demandes d’information émises par l’UTRF à ces mêmes partenaires, afin de recueillir les informations nécessaires à l’analyse et au traitement des dossiers, elles ont été au nombre de 141 en 2020, réparties comme suit :
• 53% des demandes d’information ont été envoyées à l’Office marocain de la propriété industrielle et commerciale pour la collecte d’informations commerciales sur des personnes physiques ou morales.
• 15% des demandes d’information ont été envoyées à l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie afin de collecter des informations sur des biens immobiliers.
• 14% des demandes d’information ont été envoyées à l’Administration des douanes et impôts indirects pour collecter diverses informations douanières.
• Des demandes d’informations ont également été adressées à d’autres personnes morales de droit privé pour collecter des informations relatives à leurs activités. Elles représentent 13% de toutes les demandes d’informations des partenaires nationaux.
• 5% des demandes d’information ont été envoyées à l’Office des changes concernant des informations relatives à des opérations de change.

Multiplication des enquêtes financières parallèles

Dans le cadre de sa mission de coordination nationale, l’UTRF reçoit des demandes d’informations des autorités d’application de la loi pour mener des enquêtes financières parallèles en relation avec des affaires de blanchiment de capitaux, d’infractions sous-jacentes, de terrorisme et son financement. Dans ce cadre, l’UTRF a reçu, en 2020, 224 demandes de ce type, contre 181 demandes en 2019, soit une augmentation de 23,8%. Les demandes reçues entre 2019 et 2020, souligne le rapport, représentent une part de 91% de l’ensemble des demandes reçues dans le cadre des enquêtes financières parallèles depuis la création de l’UTRF et jusqu’à fin 2020. «L’augmentation constatée est le couronnement des efforts de l’UTRF visant à renforcer la coordination nationale et à assurer la continuité de la mise en œuvre des recommandations des évaluateurs du GAFIMOAN afin d’améliorer l’efficacité du dispositif et sa conformité aux normes internationales», lit-on à ce propos dans le rapport.

Accroissement du nombre de demandes d’informations émises par l’UTRF pour l’enrichissement des dossiers traités

Dans le cadre de l’enrichissement des dossiers qu’elle traite, l’UTRF a adressé un total de 34.660 demandes d’informations aux personnes assujetties au cours de l’année 2020, soit une augmentation remarquable de 167% par rapport à l’année précédente. «Cela confirme le renforcement des activités opérationnelles et l’utilisation optimale des ressources de l’UTRF malgré les défis posés par la crise de Covid-19», souligne le rapport. Ces demandes d’informations varient selon le besoin en informations et selon l’étape d’enrichissement des dossiers en cours d’analyse, précise-t-on. Ces demandes d’informations adressées aux personnes assujetties en 2020, et à l’instar des années précédentes, ont porté principalement sur des informations relatives aux comptes (à hauteur de 72%) et aux transactions financières (à hauteur de 27%).

Augmentation du nombre de transmissions au ministère public

Depuis sa création et jusqu’à fin 2020, l’UTRF a adressé un total de 177 transmissions au procureur du Roi près le Tribunal de première instance de Rabat et au procureur général du Roi près la Cour d’appel de Rabat en raison de l’existence d’indices suffisants de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme. En 2020, le nombre de ces transmissions a atteint un total de 41. «Cette augmentation de 41,4% par rapport à l’année 2019 est le fruit de l’amélioration de la qualité des déclarations de soupçon reçues, aussi bien en nombre qu’en termes de qualité et de pertinence, ainsi que du renforcement des capacités de l’UTRF en matière de ressources (recrutements et formations adaptées). Cela signifie également que l’UTRF déploie les efforts nécessaires pour mettre en œuvre les recommandations des experts du GAFIMOAN, notamment dans le cadre des critères de la Recommandation 29 relative aux CRF et du Résultat immédiat n°6 du GAFI», indique le rapport.
En plus des transmissions au ministère public comme mentionné plus haut, l’UTRF a également fourni aux partenaires nationaux, et à leur demande, des informations relevant de leurs champs de compétence respectifs, et ce dans le cadre des enquêtes financières parallèles, précise encore le document.

Baisse du nombre des demandes de renseignements et communications spontanées internationales reçues à cause de la pandémie

En 2020, le nombre des demandes de renseignements reçues par l’UTRF en provenance des cellules de renseignement financier homologues a atteint 74 demandes, contre 88 reçues en 2019, soit une diminution de 15,9%. Aussi, le nombre de communications spontanées a connu une diminution de 35,8% en 2020 par rapport à 2019. Ce qui s’est traduit par une diminution globale de 24,5% des demandes de renseignements provenant des instances homologues étrangères. «Cette diminution constatée est due à la crise sanitaire qui a paralysé une grande partie des activités mondiales au cours de l’année 2020», explique le rapport, en précisant que les «communications spontanées internationales reçues par l’UTRF de ses homologues étrangers sont des renseignements mis à sa disposition et n’appellent pas de réponse, contrairement aux demandes de renseignements».
Et le rapport d’ajouter que «le nombre de demandes de renseignements émanant des cellules de renseignement financier (CRF) européennes a atteint une part de 82,4% avec un total de 61 demandes reçues en 2020». «Les CRF européennes arrivent en tête des partenaires internationaux de l’UTRF en matière d’échange d’informations. C’est le résultat de plusieurs facteurs, notamment la proximité géographique de l’Europe, l’importance de la communauté marocaine résidant en Europe et le nombre de ressortissants européens résidant au Maroc», fait-on remarquer dans le rapport.

Réciproquement, et toujours d’après le rapport, «l’UTRF a sollicité 21 CRF homologues en 2020 lors de l’enrichissement et l’analyse des dossiers opérationnels, impliquant notamment des entités ou des personnes étrangères ou résidant dans le pays destinataire de la demande, ou des transactions financières en relation avec le pays de la CRF sollicitée».
Dans le cadre de l’enrichissement des dossiers traités en 2020, l’UTRF a envoyé 85 demandes de renseignements aux CRF homologues, contre 76 demandes émises en 2019, enregistrant ainsi un taux de croissance de 12%. Cette augmentation peut s’expliquer par plusieurs facteurs, notamment l’accroissement significatif du nombre des déclarations de soupçon reçues et le nombre d’enquêtes financières parallèles effectuées par l’UTRF, en collaboration avec les autorités nationales d’application de la loi. 

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