Crédit Agricole France rejoint les institutions nationales et internationales et table, à son tour, sur une «forte révision à la baisse» de la croissance économique du Maroc cette année. «Compte tenu des évaluations désormais plus précises de la récession de l’agriculture, nous allons réviser à la baisse notre prévision de croissance du PIB. Celle-ci devrait s’établir à 1,5% en 2022 (contre 3,5% annoncés en début d’année, ndlr)», souligne Olivier Le Cabellec, économiste chez le groupe bancaire français à l’occasion d’une nouvelle analyse sur les perspectives mondiales. Ce dernier s’aligne donc sur les prévisions du gouvernement (entre 1,5 et 1,7%), qui sont plus optimistes que celles de la Banque mondiale (1,1%), du Fonds monétaire international (1,1%) ou encore de Bank Al-Maghrib (0,7%). Pour les économistes du groupe français, en ce début d’année 2022, les événements se succèdent et tous orientent les indicateurs d’activité à la baisse et les composantes de l’indice des prix à la hausse pour le Maroc. Trois données majeures expliquent cette forte décélération de la croissance. La première porte sur la sécheresse qui affecte directement le PIB agricole.
Celui-ci sera en récession de 10% en 2022. L’activité agricole représentant 15% du PIB marocain, l’impact négatif sur le PIB global peut donc être estimé à environ 1,5% de croissance en moins. Ensuite, il y a le conflit Ukraine-Russie qui provoque des tensions sur les marchés internationaux des céréales et d’autres matières premières, comme l’énergie, dans un contexte de hausse des prix. Ce qui impactera la balance commerciale. À noter que le Maroc importe plus de 38% de sa consommation de blé. Et environ 13% de ses céréales proviennent d’Ukraine et 4% de Russie. L’impact le plus direct de la guerre est la hausse immédiate des prix. On assiste actuellement à une flambée historique des cours à 400 euros la tonne de blé, en hausse de 30 à 40 euros depuis début février. Ils avaient déjà doublé en 2021.
Pour les experts de Crédit Agricole France, le conflit Russie-Ukraine pourrait également affecter le tourisme au Maroc. Par ailleurs, l’autre donnée majeure concerne le ralentissement de la croissance en Europe. «Alors que tous les organismes de prévisions revoient leurs estimations de croissance mondiale à la baisse, la corrélation de l’activité du Maroc avec celle de l’Espagne, de l’Italie et de la France, ses principaux partenaires commerciaux, est très élevée», estime Olivier Le Cabellec. Tous ces pays devraient afficher une décélération de leur activité économique en 2022. «Le Maroc devrait donc connaître une nouvelle année de déséquilibres externes, avec un déficit courant supérieur à la croissance du PIB. C’est un élément de fragilité supplémentaire à surveiller attentivement, compte tenu des aides du FMI en 2020», conclut l’analyse.