Dans le cadre de sa mission d’étude des questions nationales et globales, l’Institut Royal des études stratégiques (IRES) accorde un grand intérêt à l’avenir et au développement des différentes régions, notamment les provinces du sud du Royaume. C’est dans ce cadre qu’une journée de réflexion vient d’être organisée par l’Institut sur l’avenir de Dakhla-Oued Eddahab. Les travaux de cette rencontre ont fait l’objet d’un rapport de synthèse qui met en avant les atouts de cette région et explique comment «transformer la région en un hub économique innovant intégré dans l’économie-monde». Outre les chercheurs de l’IRES, cette réflexion, qui a impliqué des représentants des institutions régionales et des experts nationaux et internationaux, s’est articulée autour de 4 axes. En effet, en plus de l’axe consacré aux «propositions de quelques orientations à caractère opérationnel à même de transformer la région en hub économique innovant à l’échelle africaine et intercontinentale», il a été question également des défis à relever par la région. Les participants se sont également penchés sur «les enjeux de la transformation structurelle de l’économie régionale» et la «vision prospective pour la région de Dakhla-Oued Eddahab».
Dakhla-Oued Eddahab, un scénario post-2030
Il ressort du rapport élaboré sur la base des échanges de cette journée de réflexion un «scénario post-2030» devant aboutir au succès de l’émergence économique et la concrétisation du «hub régional à vocation intercontinentale». «Les hypothèses considérées dans ce scénario se basent sur la réalisation adéquate et dans les délais impartis des chantiers programmés dans cette région. Ceux-ci permettront de moderniser le système productif régional, lequel, combiné aux impacts attendus de la mise en service du port de Dakhla-Atlantique, devrait favoriser l’installation d’écosystèmes innovants, compétitifs et interconnectés», est-il souligné dans ce document mis en ligne par l’IRES.
Il est également indiqué que la modernisation du système productif pourrait entraîner la structuration de nouvelles chaînes de valeur, générées par les différents pôles de métiers en cours de réalisation. Selon ce scénario, l’industrie régionale monterait en gamme avec l’offre de produits aptes à alimenter l’économie nationale et celle des pays de proximité, comme la Mauritanie, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Mali et le Niger. Il est ainsi attendu que les réalisations de la phase d’amorçage 2022-2030 (développement et préparation à la modernisation de la région) et la relance des grands projets structurants favoriseraient la pleine émergence économique de la région lors de la phase ultérieure (2030 et au-delà).
Dans le même temps, les participants à cette journée prospective ont retenu, «comme scénario souhaitable et raisonné», celui de l’émergence économique de la région de Dakhla-Oued Eddahab, «dans la mesure où il est le seul susceptible de concrétiser la Vision Royale consistant à positionner cette région stratégique du Maroc en hub économique africain et foyer de rayonnement continental et international», est-il indiqué dans le rapport de synthèse.Ce scénario est étayé par une série de pistes, sous formes de principes directeurs, proposées pour sa concrétisation.
La première piste examinée vise à renforcer le cadre organisationnel de mise en œuvre des projets. Citant l’expérience réussie du Maroc en matière de création d’Agences spéciales de développement (Agence Tanger-Med, Agence Mar-Chica...), il est proposé de doter la région de structures similaires pour accompagner l’action des élus et des autorités administratives régionales et locales, notamment pour optimiser les effets d’entraînement des investissements consentis. À cet égard, Il est préconisé de favoriser la participation des élus locaux à la conception et à la création des structures les plus adaptées aux projets de développement, de susciter la création d’une structure territoriale dédiée à la réalisation et la gestion du port de Dakhla Atlantique, comme locomotive du développement régional.
La deuxième piste de réflexion appelle à «promouvoir une approche globale et intégrée du développement territorial». Les participant à la journée de prospective de ce rapport estiment de ce fait qu’il serait opportun de faire de la planification régionale des projets en cours un outil de convergence des offres sectorielles et d’intégration territoriale, dans le cadre d’une démarche à la fois d’ouverture sur l’économie-monde et de co-développement avec le voisinage africain. Ils conseillent, en plus, d’ériger la région en force d’attraction des investissements nationaux et internationaux, en poursuivant l’effort d’équipement en infrastructures, en valorisant le capital humain et en appliquant des mesures fortes en termes de marketing territorial.
La troisième piste de réflexion proposée insiste sur la nécessité de « développer les chaînes de valeur régionales comme levier de l’émergence économique post-Covid-19». Le rapport indique que des inflexions et des mesures correctives méritent d’être entreprises afin de favoriser l’émergence de secteurs porteurs et compétitifs. Pour cela, «il serait judicieux de recentrer le développement régional sur les productions et les chaînes de valeur, destinées aux aires africaines de proximité pour gagner en compétitivité et en résilience. De sélectionner, parmi les métiers mondiaux du Maroc (automobile, aéronautique, offshoring, électronique, textile et cuir, agroalimentaire), les filières qui seraient en termes de ciblage et de complémentarité les plus adaptées au continent africain (industrie des matières premières et transformation manufacturière, complémentarité logistique et portuaire…). Et de transformer les acquis diplomatiques en opportunités économiques, en développant des programmes de co-développement et de coopération Sud-Sud, en priorité, avec les pays ayant installé une représentation consulaire dans la région», relève le rapport de synthèse.
Sur un autre registre, il est appelé à faire de la région de Dakhla-Oued Eddahab une plaque tournante des chaînes de valeur régionales et mondiales. Et ce, via non seulement la réalisation du grand port de Dakhla Atlantique, mais aussi en développant des lignes maritimes sur la côte Atlantique du Maroc, la construction d’une route principale de Dakhla à Guergarate, ainsi que la création d’une zone économique spéciale tournée vers l’Afrique subsaharienne. Les deux dernières pistes de réflexion ont appelé à ériger la région de Dakhla-Oued Eddahab en un laboratoire d’innovation (en identifiant des niches d’innovation spécifiques) et à faire de la résilience et de la sécurité un pôle de compétence et d’innovation industrielle.