Menu
Search
Vendredi 19 Décembre 2025
S'abonner
close
Vendredi 19 Décembre 2025
Menu
Search

Dialogue social : ce que l'UMT compte mettre sur la table des négociations

Flambée des prix des carburants, pouvoir d’achat des salariés, dialogue social, augmentation des revenus, IR, emploi, obligation du pass vaccinal… Ces questions et d'autres ont été au cœur du débat L’Info en Face avec le secrétaire général de l'Union marocaine du travail (UMT), Miloudi Moukharik.

Dialogue social : ce que l'UMT compte mettre sur la table des négociations
Ph. Seddik

Le contexte politique, économique et social marocain est assez particulier et interpelle l’ensemble des parties prenantes pour tenter de saisir les enjeux et défis qu’impose la crise liée à la pandémie. Parmi ces parties, les centrales syndicales sont un acteur important pour maintenir l’équilibre entre les effets de la crise et les droits des salariés. Pour avoir sa lecture de la conjoncture actuelle, l’Info en Face a invité le secrétaire général de l'Union marocaine du travail, Miloudi Moukharik, pour un tour d’horizon de l’actualité.

Hausse des prix des carburants : il faut alléger les taxes

Cette actualité est sans aucun doute marquée principalement par la flambée des prix des carburants qui menace directement le pouvoir d’achat des citoyens. Interrogé sur ce sujet, le syndicaliste affirme ne pas comprendre pourquoi l'État ne prend pas jusqu’à présent des mesures pour amortir la hausse du prix des carburants. Pour lui, «le gouvernement doit actionner un certain nombre de leviers pour espérer maîtriser l'inflation des prix des carburants. La première mesure est réduire les taxes sur ces produits. C’est le seul levier qu’a le gouvernement maintenant à sa portée». Et de poursuivre : «L'État doit sortir de sa logique macroéconomique. Certes, les impôts rapportent beaucoup d'argent à l'État, mais il faut faire attention à la cohésion sociale et éviter l’émergence d’une siba (anarchie) dans la société». Pour le SG de l’UMT, l'État doit prendre ses responsabilités et réguler le marché des carburants, ne serait-ce que temporairement, le temps que le prix du pétrole se stabilise.

En lien avec ce sujet, et évoquant la souveraineté énergétique comme étant un facteur important pour maintenir une certaine stabilité des prix des carburants, le responsable rappelle que la décision de suspendre l’activité de raffinement de la Samir était une erreur du gouvernement de l’époque. «Il aurait fallu penser à nationaliser la raffinerie pour d’abord sauver les emplois et permettre une indépendance du Maroc sur ce segment», explique M. Moukharik qui pense que cette option est toujours possible. À côté de cela, l’invité de l’Info en Face remet en question le principe de libéralisation du secteur, estimant que cette décision devait être encadrée par l’État pour éviter de telles hausses de prix qui pèsent lourdement sur le pouvoir d’achat des citoyens.

Le round de dialogue social tant attendu…

Ce sujet de la hausse des prix des carburants sera en tout cas abordé par l’UMT lors du prochain round de dialogue social attendu avec le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch. «En principe, nous devrons reprendre le dialogue avec le gouvernement le 24 février, mais nous sommes toujours en attente d’une décision officielle», révèle le SG de l’UMT. Et d’indiquer que l’une des réclamations de la centrale syndicale est de fixer un ordre du jour de ces rounds de dialogue social. «Pour l’UMT, il ne s’agit pas de recevoir une invitation non précise ou d’aller faire les figurants devant les caméras. Nous voulons un dialogue social sincère sur la base d’un ordre du jour précis pouvant déboucher sur des résultats effectifs dans l’objectif d’améliorer les conditions de vie des salariés», souligne-t-il. Et le responsable syndicale est ferme : pas de dialogue social possible en une seule réunion. Nous devons organiser nos discussions, bien les préparer, de part et d’autre, et se fixer des objectifs avec des délais. Cette fermeté est justifiée car les salariés ont des attentes précises. «Pour les salariés, ils attendent une amélioration de leur pouvoir d’achat et une amélioration de leurs revenus, pour le syndicat, nous attendons de discuter des libertés syndicales malmenés et bafoués», souligne M. Moukharik.

L’UMT compte-t-il donc demander une augmentation des salaires ? Ce n’est ni oui ni non, semble dire l’invité de l’Info en Face qui préfère répondre de manière plus générale. «L’amélioration des revenus c’est un package. Pendant cette pandémie, il y a des secteurs qui ont gagné beaucoup d’argent. Nous pensons que le moment est venu de partager les fruits de la croissance par des augmentations salariales», explique le responsable. Il précise toutefois que son syndicat compte proposer au Chef du gouvernement d’inciter les entreprises à des négociations sectorielles de telle manière que les secteurs ayant réalisés une croissance significative puissent négocier des augmentations avec les représentants syndicaux. En somme, l’UMT ne compte pas demander une augmentation générale des salaires, mais laisse la balle dans le camp des entreprises des secteurs en bonne santé. Toutefois, le responsable n’exclut pas que cette approche sectorielle puisse concerner même le secteur public. «Il est temps d’asseoir cette approche de conventions collectives sectorielles que le gouvernement peut même encourager en opérant des avantages fiscaux pour les entreprises qui les concrétisent», ajoute M. Moukharik.

L’UMT compte également faire la proposition au Chef de gouvernement d’applique l’une des revendications historiques des syndicats et qui est «l’échelle mobile des salaires et des prix». «Il est inadmissible que les prix augmentent et que les salaires restent gelés. Nous allons demander de réactiver cette mesure», souligne le responsable.

Au menu également, la demande de la revalorisation du Smig et la baisse de l’IR. «Le Smig actuel ne permet pas à une famille de survivre que 9 jours. Aussi, et contrairement aux autres catégories qui fuient les impôts par plusieurs manières, le salarié est imposé à la source et donc paye son IR de manière régulière sans possibilité d’évasion fiscale», rappelle le syndicaliste, faisant référence notamment aux fonctions libérales.

Pass vaccinal et position de l’UMT

La position de l’UMT est claire : la vaccination est nécessaire pour lutter contre la pandémie et notamment dans le monde du travail. Voilà qui est dit et clairement par le patron du premier syndicat au Maroc. Toutefois, l’invité de l’Info en Face dit contester la manière dont le gouvernement veut rendre le pass vaccinal obligatoire. «Il n’est pas question d’empêcher les salariés de travailler ni de toucher à leurs salaires ou les mettre dans une situation d’abandon de poste avec tout ce qui s’ensuit», explique le responsable. Alors comment s’en sortir ? L’UMT préfère toujours la voie de la sensibilisation. «Convaincre et non pas contraindre» est le slogan retenu par la centrale pour sensibiliser à l’importance de la vaccination. Par ailleurs, le SG de l’UMT dit regretter que les décisions prises au niveau de certains ministères concernant l’obligation du pass vaccinal aient été prises sans concertation avec les représentants syndicaux. «Nous avons demandé des statistiques des personnes non vaccinés pour savoir l’ampleur réelle de ce problème. J’ai finalement demandé, à titre d’exemple, aux représentants de l’UMT au sein du ministère de la Transition numérique d’estimer le nombre des personnes non vaccinées. Ils ont relevé 4 cas. C’est à mon avis un chiffre qui ne justifie en aucun cas l’ampleur donnée aux décisions prises. J’appelle donc à de la retenue, la concertation et la mobilisation de tous pour éviter d’attiser les tensions», souligne l’invité.

 

Lisez nos e-Papers