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Réforme de la santé : Absence de dialogue public-privé (Dr Rochdi Talib)

Impactées par la poussée inflationniste, les cliniques privées estiment qu’un dialogue avec les pouvoirs publics est nécessaire pour trouver des pistes de sortie de la crise et éviter de répercuter ces hausses sur les citoyens. En attendant, le PDG du groupe Akdital, Dr Rochdi Talib, assure que les cliniques n’ont pas augmenté leurs tarifs qu’ils étudient selon une approche sociale.

Réforme de la santé : Absence de dialogue public-privé (Dr Rochdi Talib)
Ph. Sradni

Anesthésiste réanimateur de formation, le PDG du groupe Akdital, Dr Rochdi Talib, donne sa lecture de la situation épidémiologique qui a mis les scientifiques et les citoyens devant un virus méconnu et qui a nécessité un apprentissage sur le tas pour pouvoir y faire face. «Face à la pandémie de la Covid-19, on s’est retrouvé tous sur le même pied d'égalité. Les experts et scientifiques ont dû affronter une marée d’informations fausses émanant de plusieurs personnes qui se sont attribué le rôle des scientifiques», note l’invité de L’Info en Face.

Revenant sur les décisions de confinements répétés et de fermeture des frontières, le PDG du groupe Akdital estime que le Maroc aurait dû être plus souple par rapport à certaines décisions notamment quand le risque était différent selon les régions. «Les scientifiques ont parfois été opposés à certaines décisions de fermeture de frontières. On est dans un pays fragile économiquement, on a besoin de touristes pour donner une bouffée d'oxygène à l’économie».

Par ailleurs, l’expert appelle à considérer la maladie liée à la Covid-19 comme une pathologie semblable à d’autres et à apprendre à vivre avec en prenant les dispositions sanitaires nécessaires et en évitant la psychose. «C'est une psychose qui peut nous coûter très cher que ce soit au niveau de la santé publique ou au niveau économique», alerte le PDG d’Akdital. Et d’insister : «Il est temps d'ouvrir, de s'ouvrir et de laisser les gens vivre normalement comme avant la pandémie, pour pouvoir quand même booster l'économie dans le pays».

En relation avec la hausse des prix et la situation de crise que connait le Maroc, Dr Rochdi Talib admet qu’elle impacte même le secteur de la santé. «Au niveau des cliniques, nous constatons une baisse sensible de consultations parfois même très sérieuses. La crise a un impact négatif sur le pouvoir d’achat des ménages qui se répercute directement sur ses choix de prise en charge médicale», alerte le responsable. Et d’affirmer que malgré la hausse des prix qui caractérise l’économie, les tarifs des cliniques sont restés les mêmes. «Notre approche en matière de frais médicaux a toujours était sociale. Nous n’allons pas répercuter la cherté de la vie sur les citoyens, sachant que 60% de la population consulte dans le privé. On a pris l'habitude de nous adapter à des situations très difficiles et la preuve, c'est qu'on n'a pas changé quoi que ce soit depuis 2006 et on s'est adapté dans le secteur».

À la question de savoir si Dr Talib serait favorable à un plafonnement des prix dans le secteur, tel que proposé par un député qui avait interpellé le ministre de tutelle, l’invité de L’Info en Face préfère la retenue en répondant que «ça sera le serpent qui mord sa queue !», avant d’expliquer que pour lui cette proposition n’a pas lieu d’être, et que la priorité maintenant est à accorder à la généralisation de la couverture sociale, de trouver les leviers nécessaires pour accompagner cette généralisation, et par la suite «pourquoi pas ne pas revoir à la hausse cette tarification nationale de référence qui est complètement caduque ?»

Par ailleurs, l’expert rappelle que les cliniques sont aussi impactées par la crise du point de vue des taxes sur les équipements qu’ils importent par l'intermédiaire de fournisseurs nationaux. «On paye 20% de taxe à l’instar des autres produits de luxe importés alors que là il s’agit d’un service social. De plus, nous sommes aussi impactés par la cherté des matières premières qui ne se répercute automatiquement pas sur le coût du produit final», souligne le PDG d’Akdital. Et de noter également que la marge de négociation a elle aussi été réduite. «Nous importons des équipements pour les cliniques que nous ouvrons un peu partout au Maroc, mais notre marge de négociation est très limitée surtout dans ce contexte de crise. Cependant, cela ne se répercute pas automatiquement sur le prix final, c'est-à-dire au niveau du PNR», indique l’invité.

Mais si la situation persiste, «il va falloir revoir la chose de fond en comble avec les autorités de tutelle pour essayer quand même de revoir à la hausse cette tarification qui est déjà caduque depuis des années», explique-t-il. En tout cas, les économistes ne sont pas optimistes à ce sujet. Cette poussée inflationniste est amenée à durer au moins jusqu’au mois d’octobre 2022. Dans ce cas-là, un dialogue est urgent avec les pouvoirs publics pour étudier les pistes de sortie, suggère Rachid Hallaouy. «On ne demande que ça depuis plusieurs mois. Malheureusement, on ne nous fait participer à aucune décision. Il y a des réformes qui sont en cours, à l’instar de la généralisation de la couverture sociale, mais le secteur privé n'a pas été impliqué ni sollicité», déplore l’invité de L’Info en Face. Pire encore, le secteur privé n’est pas associé à la réforme du secteur de la santé annoncée par la tutelle, regrette le responsable.

À la question de savoir si le secteur souffre de déficit en ressources humaines, l’invité de Rachid Hallaouy soulève un problème particulièrement important : «Beaucoup d’écoles ont eu l’autorisation d’ouvrir ou de s’installer pour former le personnel para-médical mais malheureusement les diplômes qu’elles procurent ne sont pas reconnus par l’État. Pourquoi cette schizophrénie», s’interroge-t-il.

Comment remédier à cette problématique en rapport avec le manque de compétences dans le secteur de la santé ? «À notre humble niveau, nous avons trouvé une petite issue qui nous permet de parer à cette difficulté dans la mesure où on prend des lauréats de ces écoles et on les reforme au niveau de nos différentes cliniques et suivant notre cahier de charges. On n’a pas d’autres choix vu que les lauréats des écoles d’État n’ont pas le droit de travailler dans le secteur privé. Par conséquent, on est “amputé” d’une tranche de population paramédicale assez intéressante et importante embauchée dans les hôpitaux du secteur public», répond avec un certain regret Dr Rochdi Talib.

Le PDG du groupe de santé Akdital appelle à mettre fin à la dualité public/privé et à en faire une complémentarité. «On est en train de parler du secteur de la santé. Public ou privé, l’objectif est de soigner et rendre service aux Marocains», indique l’invité. Dans le même ordre d’idée, l’expert plaide pour une collaboration entre les deux secteurs : «Il faut qu’il y ait une base de communication entre les deux secteurs. Il y a des compétences dans le secteur public et inversement. Les deux doivent bénéficier à tous les Marocains. Arrêtons de les cloisonner et faisons en sorte qu’il y ait une circulation de compétences».

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