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Inclusion financière : la vision de l’Association professionnelle des établissements de paiement

La vague de digitalisation est venue imprimer un nouveau rythme au processus de l’inclusion financière au Maroc. Elle est perçue comme un accélérateur d'accès aux services financiers. Mais aussi une piste prometteuse et solide pour pallier la faible pénétration des services financiers auprès des populations non bancarisées. Raison pour laquelle la loi bancaire 103.12 du 24 décembre 2014 a institué le statut d'établissement de paiement qui s'applique à des entités non bancaires.

Inclusion financière : la vision de l’Association professionnelle des établissements de paiement
Mohammed Benkaddour

Aujourd’hui, les réseaux ont enregistré une forte hausse, passant d’environ 6.000 points d’accès en 2019, à un peu plus de 19.700 points d’accès à fin 2021. Pour les représenter et atteindre les objectifs du pays dans l’inclusion financière, l’Association professionnelle des établissements de paiement (APEP) conjugue le dialogue avec Bank Al-Maghrib et les propositions d’améliorations au gouvernement. Le Maroc est-il réellement en route vers l’inclusion financière grâce au paiement mobile ? Les explications de Mohammed Benkaddour, Délégué Général de l’APEP.

Le Matin : Pourriez-vous nous parler de l’APEP ? Dans quelle optique votre association a-t-elle été créée ? Quels sont ses membres ?

Mohammed Benkaddour : La création de l’Association professionnelle des établissements de paiement intervient suite à son institution par la loi bancaire 103-12, du 24 décembre 2014, qui prévoit un cadre institutionnel qui fixe les différentes instances qui le conforment telles que le comité des établissements de crédit ou le conseil national du crédit ou de l’épargne. Ainsi, les associations professionnelles viennent compléter ce cadre institutionnel, en regroupant les établissements de crédit et organismes assimilés agréés par Bank Al-Maghrib.
Au sens de la loi, ces associations sont appelées à étudier les questions intéressant l’exercice de la profession, notamment l’amélioration des techniques et l’utilisation de nouvelles technologies, la création de services communs, la formation du personnel et les relations avec les représentants des employés.
Les associations professionnelles peuvent également être consultées par le ministre chargé des Finances ou le wali de Bank Al-Maghrib, ou tout autre régulateur, sur toute question intéressant la profession. De même, elles peuvent soumettre au ministre chargé des Finances et au wali de Bank Al-Maghrib des propositions dans le domaine qui les intéresse.
Il s’agit également pour notre association de promouvoir les bonnes pratiques parmi les membres. Nous disposons ainsi d’un code de déontologie qui promeut un certain nombre de pratiques responsables, de la part de nos membres, dans le but d’asseoir un exercice sein de l’activité et du secteur.

Notre association intervient également auprès des différents partenaires institutionnels et commerciaux, lorsqu’il s’agit de défendre les intérêts de nos membres, ou alors de mettre à la disposition des parties prenantes un espace d’échange, prompt à la résolution des différentes difficultés qui peuvent être identifiées.
L’APEP compte actuellement 17 établissements de paiement agréés par Bank Al-Maghrib, issus d’environnements divers. Ainsi, et en termes de filiation, nos membres proviennent du milieu bancaire, des opérateurs télécoms et d’investisseurs privés. Ceci comporte une richesse importante en termes de vision et d’échange et constitue une force pour nos membres.

Dans l’inclusion financière, quelles sont les nouvelles possibilités qui sont offertes avec les établissements de paiement ? Quels sont les niveaux de comptes proposés ? Et quels en sont les avantages pour leurs détenteurs ?

L’inclusion financière dans notre pays revêt une importance particulière. En effet, elle fait l’objet d’une stratégie déployée au niveau national. Dénommée Stratégie nationale d’inclusion financière (SNIF), ce projet structurant pour notre pays vise à réduire les inégalités sociales et économiques et de favoriser une croissance inclusive bénéficiant aux différentes franges de la population.
Ainsi sont mobilisées toutes les forces vives de notre pays, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, sous l’impulsion de Bank Al-Maghrib et du ministère des Finances, pour atteindre ces objectifs.
Il s’agit de concrétiser la «possibilité pour les individus et les entreprises d’accéder à moindre coût à toute une gamme de produits et de services financiers (transactions, paiement, épargne, crédit et assurance) utiles et adaptés à leurs besoins, proposés par des prestataires fiables et responsables». Cette stratégie s’articule autour de différents leviers tels que le paiement mobile, la microfinance ou le développement des produits d’assurance inclusive.

Le paiement mobile s’inscrit notamment comme levier important dans le déploiement de cette stratégie, car son développement offre une réelle opportunité pour les autres leviers également, de par les synergies identifiées. Ainsi, nous pouvons parfaitement nous projeter dans un environnement dans lequel un bénéficiaire d’une aide sociale puisse la recevoir sur son portefeuille électronique, ou M-Wallet, et réaliser plusieurs transactions de manières dématérialisées, telles que le paiement des factures, l’épargne ou encore le remboursement d’un crédit, sans avoir à se déplacer en agence.
S’agissant d’un moyen de paiement, les opérations initiées à travers la M-Wallet se produisent sur un compte de paiement, tenu par un établissement de paiement. Comme vous le savez, l’ouverture de ce compte ne comporte aucun frais et peut se faire à distance, à travers les diverses applications déjà opérationnelles, et disponibles dans les stores.
Également, le compte de paiement est dépourvu de frais de tenue de compte, et plusieurs types d’opérations, telles que le paiement commerçant ou de factures, sont également gratuites. Les frais existants concernent quelques types de transactions, telles que la recharge du compte via carte bancaire, et l’avantage réside dans le fait que l’utilisateur aura connaissance de ces frais en temps réel, avant d’exécuter ces transactions. Il est également important de souligner que les frais existants ont été étudiés de telle manière à être les plus accessibles possible.

Par ailleurs, les comptes de paiement s’adaptent aux besoins et à l’usage des personnes, à travers la mise en place de trois niveaux de comptes, ou plafonds, de 200, 5.000 et 20.000 dirhams. Des comptes déplafonnés existent également pour les professionnels (les commerçants et les agents de paiement).

Dans quelle mesure le paiement mobile est-il un facteur d’accélération de l’inclusion financière dans le Royaume ?

Tel qu’expliqué précédemment, le paiement mobile constitue un réel facteur d’accélération de l’inclusion financière dans notre pays.
Tout d’abord, les benchmarks à l’international ont démontré que la réussite du paiement mobile repose sur la disponibilité d’un réseau d’agents de paiement étoffé. À ce titre, les établissements de paiement répondent à ce besoin soit à travers leurs agences propres, des agents de paiements principaux ou des agents de paiement détaillants.
Les agences propres et les agents de paiements principaux offrent tous les services de paiement pour lesquels un établissement de paiement est agréé, tandis que l’agent de paiement détaillant offre une palette plus réduite de services. Ce dernier joue également un rôle de proximité pour les usagers, et favorisera à terme l’adoption des services financiers.
Nos réseaux ont enregistré une forte hausse tout au long de ces dernières années, passant d’environ 6.000 points d’accès en 2019 à un peu plus de 19.700 points d’accès à fin 2021. Ceci s’explique notamment par le démarrage de l’activité des établissements de paiement nouvellement agréés, d’une part, et des efforts déployés par les anciens établissements, d’autre part.

Ce réseau se caractérise également par une capillarité accrue dans tout le territoire, ainsi que des horaires d’ouverture adaptés. Ceci se traduit en une proximité, une familiarisation avec les services financiers pour les usagers et une prédisposition à utiliser des nouveaux, notamment ceux à vocation d’inclusion financière.
Ce même réseau constitue un point de départ pour une bonne partie de la population ciblée par la Stratégie nationale d’inclusion financière, qui pourra se diriger vers ces points d’accès, à effet de bénéficier des différents services financiers disponibles.
Une fois la population cible familiarisée avec ces services, et surtout l’aspect dématérialisé et digitalisé, l’usage du paiement mobile deviendra un réel accélérateur de cette inclusion financière, sociale et économique, en rendant accessible une panoplie de services depuis le téléphone portable de l’usager, réalisables à distance, de manière facile et à coût réduit, voire gratuitement pour plusieurs opérations.

Quels sont les leviers urgents à activer ?

Comme mentionné précédemment, le paiement mobile et son adoption reposent non seulement sur une stratégie de communication à grande échelle, mais aussi l’adhésion des différents acteurs, appelés à jouer le rôle de catalyseurs sur le terrain.
Il s’agit notamment des commerces de proximité qui peuvent constituer un facteur important dans la familiarisation avec ces nouveaux services, soit à travers une relation d’agent de paiement détaillant, ou alors en proposant l’option de paiement via M-Wallet aux clients. À cet effet, des efforts considérables ont été fournis, notamment à travers la défiscalisation du chiffre d’affaires réalisé à travers le paiement mobile, sur une période de 5 ans.
Il s’agit également de favoriser une approche qui repose sur des tiers de confiance, tels que les ministères de tutelle pour certaines professions, ou les partenaires étatiques, car cela constitue un argument supplémentaire en faveur de la vision stratégique nationale que revêt notre mission.
D’autres leviers reposent sur des aspects tels que l’adaptation des aspects technico-fonctionnels, initialement mis en place à l’usage, et une communication déployée au niveau national. Il y a lieu de souligner que le projet «Paiement mobile» s’est doté d’un groupement d’intérêt économique, qui assure le déploiement de ces aspects, qui bénéficieront, in fine, de l’adoption de ce nouveau moyen de paiement.

Comment l’APEP voudrait-elle changer la donne ou au moins accélérer le rythme des réalisations ?

En tant qu’entité regroupant les établissements de paiement agréés par Bank Al-Maghrib, l’APEP déploie un travail de fond qui repose sur l’expérience de ses membres. L’association constitue ainsi un lien entre les membres et le régulateur, lorsqu’il s’agit de traiter des problématiques de place.
En tant que partie prenante dans le processus de réflexion, d’élaboration et de mise en place de la SNIF, et du projet de «Paiement mobile» en particulier, l’APEP œuvre continuellement pour leur réussite, en fédérant et mobilisant les établissements membres. Par ailleurs, la réactivité, l’agilité et la disponibilité des membres constituent de réels atouts.

Les efforts de l’APEP visent notamment à adapter les textes réglementaires à la réalité rencontrée sur le terrain, dans un processus d’échange et de concertation continuels avec Bank Al-Maghrib. Ce qui a donné lieu à divers allègements, et adaptation de la part du régulateur.
Il s’agit également d’être un pont entre les membres et les autres parties prenantes dans le projet paiement mobile, car il s’agit d’apporter un focus propre à nos établissements, et de trouver des solutions adaptées à leurs spécificités, et qui répondent à leurs attentes.

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