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Etaler la belle vie sur les réseaux sociaux devient une source de malaise et de dépression

Si le contenu partagé sur les réseaux sociaux est généralement positif, son impact sur le bien-être mental des internautes et leur estime de soi l’est beaucoup moins. À force de comparer leur quotidien «ordinaire» avec la vie animée des personnes populaires sur ces plateformes, plusieurs personnes finissent par sombrer dans la dépression. Décryptage

Etaler la belle vie sur les réseaux sociaux devient une source de malaise et de dépression

Facebook, YouTube, Instagram, TikTok… les réseaux sociaux sont devenus omniprésents dans notre quotidien. Moyen de communication pour les uns et de distraction pour d’autres, ces plateformes peuvent aussi être une source de frustration, voire de désespoir et de dépression. En passant une grande partie de leur journée à scroller «la vie de rêve» de leurs camarades, amis… et surtout des influenceurs, de nombreuses personnes finissent par se sentir déprimées. En effet, le fait d’être spectateur des vacances des uns, du déballage de cadeaux des autres ou encore des détails de leur dernier déménagement, conduit forcément les internautes à penser qu’ils mènent une vie ennuyeuse et à se sentir inférieurs aux autres. Ils ne peuvent s’empêcher de comparer leur quotidien «ordinaire» et parfois difficile à celui des personnes qu’elles suivent sur le Net.

«Les internautes qui utilisent les réseaux sociaux ont souvent davantage de chances de déprimer et de se sentir angoissés que ceux qui le font rarement. Ils comparent tous les jours leur vie avec celle des autres qu’ils trouvent mieux, jusqu’au point de se sentir dévalorisés. Ils se sentent souvent tristes et seuls. Plus ils regardent des photos et statuts de personnes qu’ils connaissent ou suivent qui semblent heureux, plus ils sombrent dans la dépression», déclare au «Matin» Mohcine Benzakour, psychosociologue. «C’est un véritable cercle vicieux qui finit par s’installer. Facebook, Instagram et les autres réseaux sociaux nourrissent cette envie de suivre l’actualité des autres, tout en entretenant l’impression de valoir moins qu’eux, et continuer à penser qu’ils ont une vie parfaite, du moins en images.

On note aussi les effets néfastes de ces plateformes, en particulier Instagram, sur la façon dont les adolescents voient leur corps. On constate que plusieurs d’entre eux s’estiment aujourd’hui “moches”. Une impression qu’ils ont surtout depuis leur inscription sur le réseau social. D’ailleurs, les problèmes de l’image corporelle sont l’une des principales raisons pour lesquelles l’utilisation des réseaux sociaux entraîne chez les ados des cas de dépression, pouvant aller jusqu’au suicide, malheureusement», développe Benzakour. L’impact négatif des réseaux sociaux sur nos bien-être mental et estime de soi a été confirmé par les résultats de nombreuses études effectuées par des chercheurs à travers le monde. Cet impact sur la santé mentale est encore plus grave chez les jeunes. «Les études ont montré une interaction négative entre les réseaux sociaux et la dépression. C’est dû au fait que nous allons souvent sur les réseaux sociaux lorsque nous ne nous sentons pas bien et cherchons une distraction. Or notre cerveau filtre déjà les informations selon le mode “négatif” de ce fait, il va repérer seulement les posts et vidéos qui montrent que “telle personne a une meilleure vie que moi…” On appelle cela des biais de pensée», nous explique Jihane Sâadi, psychologue. Et d’ajouter que «si nous allons sur les réseaux sociaux, car nous sentons un manque ou malaise dans notre vie, cela sera amplifié une fois que nous serons connectés, car nous serons seulement attentifs aux posts qui confirment que notre vie n’est pas exceptionnelle. Il faut donc être conscient de l’intention qui nous pousse à aller sur ces réseaux sociaux». 

La psychologue rappelle également que les réseaux sociaux font aujourd’hui partie intégrante de la sociabilisation des jeunes. «Les réseaux sociaux permettent aux jeunes de créer des liens et de rester connectés à leurs amis, mais encore une fois il faut rester vigilant. L’adolescence est un âge de comparaison sociale. Nous nous comparons à nos pairs afin de nous situer dans la société, déterminer nos valeurs et trouver des amis qui nous acceptent. Mais il faut être conscient que ce phénomène de comparaison sociale s’exacerbe avec les réseaux sociaux», affirme Jihane Sâadi. «Nous ne nous comparons plus simplement à nos camarades de classe, mais à des millions de personnes du même âge qui vivent dans d’autres pays et qui ont un autre système de vie, et pourtant nous nous comparons à eux. J’encourage toujours les adolescents à réaliser que sur les réseaux, nous ne partageons que nos “highlight”, que nos points forts. Personne ne poste lorsqu’il est triste, anxieux ou confus. Il ne faut pas comparer nos moments difficiles ou “low” avec les moments forts des autres», poursuit-elle. 

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Conseils de Jihane Sâadi, psychologue : «Il faut aborder les réseaux sociaux en pleine conscience en prenant le temps de choisir le contenu qui nous inspire et nous motive, plutôt que l’inverse»

«Je conseille d’abord aux internautes de déterminer leur intention avant d’aller sur les réseaux sociaux. Est-ce que j’y vais, car je me sens mal et cherche une distraction, alors que cela va l’exacerber, ou bien j’y vais simplement par plaisir ? Si l’intention de base est “négative”, le résultat sera négatif : on risque d’en sortir en se sentant encore plus diminué par rapport aux autres. Il faut également prendre conscience de ce qu’on ressent lorsque l’on parcourt ces plateformes. Comment je me sens face à tel post ou vidéo ? Est-ce que cela m’inspire ou bien me fait sentir que je ne suis pas assez bien ? Est-ce que cette personne me ressemble, partage les mêmes valeurs que moi ? Pourquoi suis-je intéressé par ce contenu ? Toutes ces questions permettent d’aborder les réseaux sociaux en pleine conscience et donc nous contrôlons le contenu et choisissons ce qui nous inspire et nous motive, plutôt que l’inverse. Enfin, avant d’aller sur les réseaux, je conseille de prendre un moment pour savoir ce dont on a besoin. Est-ce que j’ai besoin de repos, de faire une activité qui me plaît, ou bien d’être entendu et soutenu ou tout simplement passer du temps avec des amis ? Il vaut mieux se tourner vers ces activités en priorité plutôt que de passer directement sur les réseaux sociaux. Je sais que beaucoup de jeunes les utilisent comme distraction, mais ils sont passifs face au contenu qu’ils visionnent. Cela ne leur donne pas la motivation de réaliser les activités qui les inspirent, ou de travailler sur leurs rêves et ambitions. Cette passivité leur fait sentir qu’ils sont encore plus impuissants pour créer la vie dont ils rêvent, ce qui renforce le sentiment d’infériorité et augmente le sentiment d’impuissance dans leur vie. Voilà pourquoi les réseaux sociaux peuvent rester une source partielle d’inspiration, mais pas seulement. Je pense que pour se construire, il faut s’enrichir d’expériences, et il est préférable qu’ils se tournent vers eux même et se posent les bonnes questions plutôt que d’être soumis à ce que “les autres” pensent comme étant “cool”».

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