Le Maroc figure parmi les pays africains qui concentrent le plus d’opportunités dans les services financiers. C’est l'un des constats mis en avant par un récent rapport du cabinet McKinsey, intitulé : «Fintech in Africa: The end of the beginning». Avec 70% du PIB de l’Afrique et 50% de sa population, le Royaume, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, l’Égypte, le Ghana, le Kenya, le Nigeria, le Sénégal, l’Afrique du Sud, la Tanzanie et l’Ouganda devraient tirer profit du développement de la fintech sur le continent. «La Fintech africaine est foisonnante et les investissements affluent : le montant moyen des opérations réalisées est en forte augmentation, ce qui se traduit en emplois et en croissance pour les économies de la région», souligne François Jurd de Girancourt, directeur associé au bureau casablancais du cabinet.
Selon lui, l’histoire ne fait que commencer. «Les services financiers ont atteint un point d’inflexion, et de nombreux pays africains gagneraient à capitaliser sur la dynamique de ces dernières années pour libérer tout le potentiel du secteur», estime-t-il.En ce qui concerne le Maroc, le directeur associé rappelle les programmes élaborés par le pays pour stimuler l’inclusion financière et réduire le nombre de transactions en espèces. Si l’argent liquide est «toujours roi en Afrique», et que les transactions via des moyens de paiements digitaux ne représentent que 10% des opérations, «la croissance sans précédent que connaît la Fintech actuellement bouleverse non seulement les habitudes bancaires des citoyens, mais aussi et plus largement leur quotidien, sur l’ensemble du continent», souligne le rapport. Ainsi, sur l’ensemble des «11 marchés d’opportunités» identifiés, de nombreuses zones inexplorées et autant d’opportunités demeurent.
Le parcours ne sera cependant pas dénué d’embûches : le contexte de financement plus contraint ainsi que la fragmentation des marchés et la pénurie de talents ne sont, en effet, que quelques-uns des défis majeurs que devra relever le jeune secteur de la Fintech. Somme toute, les perspectives qui s’offrent aux Fintech africaines n’ont jamais été aussi bonnes, notamment grâce à la dynamique installée depuis plusieurs années. Avec les bonnes mesures d’accompagnement et d’incitation, une vague de licornes africaines est sur le point de déferler. Les auteurs du document soulignent également le rôle des acteurs de la Fintech, dont les solutions de paiement peuvent être jusqu’à 80% moins onéreuses que celles des banques traditionnelles, les intérêts générés par leurs produits d’épargne jusqu’à trois fois plus élevés et les coûts des transferts de fonds jusqu’à six fois moins importants. En clair, «ils apportent une valeur ajoutée nouvelle et substantielle à leurs clients», est-il noté.
D’ici 2025, le marché africain des services financiers, qui inclut aussi bien la Fintech que le secteur bancaire traditionnel, devrait afficher une croissance de 10% par an pour atteindre 230 milliards de dollars. «Avec un taux de croissance annuel moyen de près de 20% entre 2020 et 2025, les segments des paiements et des portefeuilles électroniques devraient connaître la plus forte croissance», détaille McKinsey. Cela dit, en dépit du «boom» d’investissements dans les Fintechs africaines, le continent reste encore à la traîne en ce qui concerne le nombre de licornes qu’il produit par rapport au niveau de financement octroyé. Pendant que l’Asie, hors Chine, en produit 138, l’Afrique n’en est qu'à 10, y compris les Fintechs intégrées à des opérateurs télécoms. En mesurant le nombre de licornes par rapport à la population, l’étude montre que le Brésil occupe la première place du classement, avec 48 licornes par milliard d’habitants. L’Amérique latine, hors Brésil, a généré, quant à elle, 54 licornes par milliard d’habitants et l’Asie du Sud-Est 49 par milliard d’habitants. «Si l’Afrique accuse un retard majeur avec seulement 8 licornes par milliard d’habitants, le continent est néanmoins en train de rattraper le retard sur l’Amérique latine et l’Asie du Sud-Est», relève cabinet McKinsey.
Et pour soutenir cette croissance des Fintechs, le rapport salue les mesures prises par de nombreuses autorités réglementaires africaines pour uniformiser les normes de marché de manière à bâtir un écosystème propice à l’innovation. «Plusieurs pays ont adopté des directives détaillées en matière de licences et de protection des données, au cours des trois dernières années. Le déploiement de telles mesures vise à clarifier la situation pour les nouveaux entrants, contrebalancer le risque potentiel lié aux réglementations futures et mettre en place des bacs à sable réglementaires de manière à stimuler l’innovation dans le secteur», précise François Jurd de Girancourt. En somme, le continent africain a tout à gagner en développant des Fintechs.
La croissance économique de l’Afrique peut ainsi compter sur le déploiement de ce secteur. Il s’agit là du début d’une nouvelle ère. À noter que le chiffre d’affaires des Fintechs africaines s’établit entre 4,5 et 6 milliards de dollars, contre 150 milliards pour le marché des services financiers. Ce qui représente un taux de pénétration inférieur à celui des pays développés (2 à 3% contre 3 à 5% à l’échelle mondiale).