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Maroc-Angola : des signes positifs préfigurent une percée diplomatique en Afrique australe

Les relations entre le Maroc et l'Angola évoluent sur une trajectoire positive depuis des années. Depuis les deux rencontres entre Sa Majesté le Roi Mohammed VI et le Président angolais João Lourenço, en novembre 2017 à Abidjan et en avril 2018 à Brazzaville, les deux pays ont constamment réaffirmé leur volonté de renforcer leurs relations bilatérales. Une volonté qui a été réitérée récemment à l'occasion de la visite l’ambassadeur itinérant de la République d’Angola Bernardo Mbala Dombele à Rabat.

Maroc-Angola : des signes positifs préfigurent une percée diplomatique en Afrique australe
Nasser Bourita recevant le 6 mai dernier à Rabat l'ambassadeur itinérant Bernardo Dombele Mbala, envoyé spécial du Président de la République d'Angola.

La visite au Maroc, le 6 mai dernier, de l’ambassadeur itinérant de la République d’Angola, M. Bernardo Mbala Dombele, annonce probablement une évolution positive et qualitative des relations entre le Royaume et l’Angola, pays très important au niveau de l’Afrique australe, le dernier en Afrique à avoir recouvré son indépendance du Portugal en 1975. Ces dernières années, des signaux positifs quoique timorés ont été envoyés par ce pays, connu pour ses positions plutôt alignées sur celles de l’Afrique du Sud concernant l’intégrité territoriale du Maroc. Mais visiblement, la géopolitique mondiale qui change, ainsi que le rôle prépondérant du Maroc à l’échelle continentale et son engagement en faveur de l’émergence de l’Afrique, remettent en cause nombre d’idées reçues et de crédos dépassés.D’ailleurs, lors de sa visite au Maroc, où a remis à Nasser Bourita un message adressé par le Président angolais à Sa Majesté le Roi Mohammed VI, l’émissaire du Président angolais a souligné la nécessité de renforcer les relations d’amitié qui lient l’Angola et le Maroc.

Assiste-t-on aux prémices d’un revirement de la position de Luanda s’agissant du Sahara marocain ?

Voici ce qu’en pense le professeur de Relations internationales à l’Université Mohammed V de Rabat, Mohammed Zakaria Abouddahab. Pour commencer, M. Abouddahab, dans une déclaration au «Matin», tient à rappeler que le Maroc a soutenu l’Angola durant ses années de lutte pour l’indépendance. «Pourtant, l’Angola a pris, de par le passé, une position hostile par rapport à l’intégrité territoriale du Royaume, allant même jusqu’à la reconnaissance de la prétendue “Rasd”. Cela tenait à une interprétation erronée de l’histoire et, notamment, du rôle du Maroc dans le soutien des mouvements africains de libération nationale, comme l’ANC sud-africain (African National Congress) ou le MPLA (Mouvement populaire de libération de l’Angola)», rappelle le professeur de Relations internationales. «La confusion a été donc de taille et l’on sait, entre autres, combien le Maroc a apporté un soutien logistique à Nelson Mandela, alors en lutte contre l’Apartheid, et à des activistes indépendantistes angolais, dont l’ancien doyen des ambassadeurs africains au Maroc qui portait, faut-il le rappeler, un passeport marocain avant l’indépendance de son pays !» rappelle encore M. Abouddahab. Cela étant dit, l’Angola, poursuit le professeur, connaît depuis quelques années une réelle émergence et, pour le Maroc, ce serait stratégiquement une opportunité s’il parvenait à mettre l’économie au cœur de la coopération entre les deux pays, ce qui serait aussi valable pour d’autres pays de la région comme la Namibie. Une coopération qui, de l’avis de M. Abouddahab, pourrait, bien entendu, s’élargir à d’autres secteurs, comme la culture, l’éducation… sachant que le Maroc reçoit, depuis plusieurs années, des étudiants angolais, quand bien même ces derniers seraient lusophones.

Comme leurs semblables capverdiens ou bissau-guinéens, ils bénéficient de bourses de la part de l’AMCI (Agence marocaine de coopération internationale) et d’un programme de mise à niveau linguistique avant leur immersion au sein des établissements universitaires du Royaume. «Il conviendrait donc de tabler sur le long terme pour agir sur la position de l’Angola au sujet du Sahara marocain», dit M. Abouddahab. D’ailleurs, c’est une tautologie que de dire que le Maroc a adopté une approche découplée quant à ses relations avec des pays qui maintiennent leur reconnaissance de la prétendue “Rasd”, suivant en cela la règle “Flag follows Trade”, en d’autres termes, l’économique conduit, ipso facto, au politique, fait-il remarquer. De manière plus approfondie, le Maroc devrait opérer une percée diplomatique au sein de l’Afrique australe, incluant des actions avec la SADC (Southern African Development Communauty), la plus large communauté économique africaine avec ses 16 membres : l’Afrique du Sud, l’Angola, le Botswana, les Comores, la RDC (République démocratique du Congo), le Swaziland, le Lesotho, Madagascar, le Malawi, l’Ile Maurice, le Mozambique, la Namibie, les Seychelles, la Tanzanie, la Zambie et le Zimbabwe, estime M. Abouddahab. Il s’agit, en l’espèce, d’une démarche considérable, mais de longue haleine, lorsque l’on sait l’hostilité à l’égard du Maroc du pays le plus influent de cette région, à savoir l’Afrique du Sud, indique le professeur de Relations internationales. Néanmoins, souligne-t-il, rien n’est impossible en diplomatie : une stratégie se déroulant sur le temps long pourrait aplanir bien des difficultés et dissiper beaucoup de malentendus. «Le processus étant en branle, les premiers résultats commencent à se faire sentir, notamment après le retour du Maroc au sein de l’Union africaine», conclut M. Abouddahab.

 

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