Souvent sous-estimée, l’obésité est considérée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme étant la première maladie non infectieuse de l’histoire, répandue dans presque tous les pays, au point de parler d’épidémie, voire de pandémie du 21e siècle. Elle continue à gagner du terrain et touche aujourd’hui plusieurs millions de personnes à travers le monde. Au Maroc, selon les données les plus récentes rapportées par l’enquête nationale sur les Facteurs de Risque Communs des maladies non transmissibles 2017-2018, l’incidence de surpoids chez les adultes de plus de 20 ans est de 53%, dont 20% sont obèses. L’obésité sévit plus dans le milieu urbain (22.8%) que dans le milieu rural (14.9%). Les femmes (29%) sont plus exposées à cette forme de malnutrition que les hommes (11%). Le ministère de la Santé souligne, par ailleurs, que la prévalence de l’obésité a connu une augmentation de 34% entre l’année 2004 et 2017.
«La dernière étude sur les facteurs de risque des maladies non transmissibles réalisée par le ministère de la Santé a montré qu’un adulte sur cinq souffre d’obésité au Maroc. Loin d’être un simple défaut de l’apparence physique, l’obésité a été déclarée par l’OMS en tant que maladie qui, elle-même, est liée à plusieurs risques de développement de maladies non transmissibles, telles que l’hypertension artérielle, le diabète, le cancer…», souligne Pr. Jaâfar Heikel, médecin épidémiologiste nutritionniste, président du Collège national des médecins nutritionnistes et de la Société marocaine de nutrition Santé et Environnement. Ce dernier explique, par ailleurs, que l’obésité n’est pas due uniquement à un déséquilibre nutritionnel, mais il s’agit d’une maladie plurifactorielle. «Plusieurs facteurs peuvent conduire à une obésité, comme le déséquilibre des dépenses énergétiques ou le manque d’activité physique, les problèmes génétiques, l’existence d’autres maladies… Il est très important de comprendre cette dimension multifactorielle de l’obésité qui est liée à l’organique mais aussi à l’environnement socioéconomique et à la situation psychologique», indique Pr Heikel. «Nous avons créé, au Maroc, le “Moroccan obesity task force”, qui est un groupement de médecins et de scientifiques qui s’intéressent à la prévention primaire, secondaire et tiercière de l’obésité. Ces experts assurent que pour prévenir et lutter contre cette maladie, il faut agir à tous les niveaux très tôt. Il faut notamment apprendre à l’enfant, dès la naissance, de bonnes habitudes alimentaires et adopter durant les différents cycles de la vie une approche multidimensionnelle et intégrée», a-t-il ajouté. L’expert affirme, par ailleurs, que les publicités, les médias ainsi que la société civile jouent un rôle très important dans la lutte contre l’obésité lorsqu’ils transmettent des messages positifs aux jeunes générations.
Il est à rappeler que le ministère de la Santé et la protection sociale a élaboré un plan opérationnel de prévention et de contrôle du surpoids et de l’obésité chez les enfants 2018-2025. Il vise à prévenir le développement de ces affections, ainsi que l’évolution du surpoids vers l’obésité et l’apparition des complications secondaires à cette surcharge pondérale. Ce plan se décline ainsi en trois axes stratégiques à savoir l’amélioration de l’offre de soins en matière de dépistage et de prise en charge du surpoids et de l’obésité de l’enfant et de la femme, la promotion d’une alimentation saine et d’une activité physique régulière, et ce à toutes les étapes de la vie de l’individu et enfin la lutte contre un environnement obésogène de la surcharge pondérale.
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Surpoids et obésité chez l’enfant et l’adolescentLe surpoids et l’obésité constituent des affections redoutables, évoluant d’une manière insidieuse et n’épargnant malheureusement pas les plus jeunes. L’enquête nationale sur la population et la santé de la famille de 2018 a montré que chez les enfants âgés de moins de cinq ans, la prévalence du surpoids est de 10,8% et celle de l’obésité est de 2,9%. Ces derniers touchent plus les garçons que les filles, 12,3% contre 9,2% pour le surpoids et 3,6% contre 2,2% pour l’obésité. Selon le milieu de résidence, l’urbain est plus frappé par le surpoids que le milieu rural (11,7% contre 9,7%). Des écarts assez importants dans la distribution de surpoids sont observés entre régions. En effet, les régions les plus exposées sont Laâyoune, Sakia Lhamra (19%), suivie par Beni-Mellal Khénifra (17,4%) et l’Oriental (13%) alors que celle la moins touchée est Marrakech Safi (6.8%). S’agissant des adolescents âgés de 13 à 17 ans, la prévalence de surpoids est de 13,9%, 10,7% chez les garçons et 17,8% chez les filles, et la prévalence de l’obésité est de 3%, 2,7% chez les garçons et 3,3% chez les filles.