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Mardi 19 Mars 2024
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Mohamed Saâd, président de l’Ausim : «MoroccoTech ne sera pas une coquille vide !»

MoroccoTech se veut inclusif et fédérateur, militant pour la startup. Cette plateforme dispose, selon Mohamed Saâd, président de l’Ausim, invité de L’info en Face, du principal atout pour réussir sa mission : elle fédère autour d’elle les principaux acteurs concernés par la digitalisation : Ausim, CGEM, AMDIE, ADD, APEBI et Technopark.

Mohamed Saâd, président de l’Ausim : «MoroccoTech ne sera pas une coquille vide !»

La crise a-t-elle été un accélérateur de la digitalisation comme beaucoup l’avaient prédit au début de la pandémie ? «Après deux ans, je crois qu’il y a un bon coup d’accélérateur dans le digital que ce soit pour l’entreprise ou pour le citoyen. Dans plusieurs secteurs, les entreprises ont compris l’enjeu, ont investi dans les infrastructures et ont changé de mindset», répond d’emblée Mohamed Saâd, président de l’Association des utilisateurs des systèmes d’information (Ausim), invité de l’Info en Face du Groupe Le Matin.

Une faible production de contenu

Ceci dit, reconnaît le président de l’Ausim, sur le volet enseignement, il subsiste encore des problèmes : beaucoup d’écoles ont récemment fermé de nouveau leurs portes, car n’assurant pas de l’enseignement à distance et dans certains cas, même quand cet enseignement à distance est assuré, il n’est pas de bonne qualité. «Concernant l’indice E-Government Development Index (EGDI), nous sommes relativement à la traîne. Et l’un des axes qui nous font défaut est justement celui de l’infrastructure & télécoms. Il subsiste encore des zones grises où il n’y a pas de télécoms ou bien elles sont encore chères pour le citoyen lambda», indique Mohamed Saâd. Le haut débit manque drastiquement et seuls quelques secteurs géographiques sont équipés. «C’est pourquoi nous militons depuis longtemps pour une mutualisation des infrastructures entre les opérateurs télécoms. L’État, certes, met en place les grandes politiques sectorielles, mais un tel projet devrait aussi reposer sur le partenariat public-privé».

Un contrat-programme ?

Et justement, MoroccoTech, récemment annoncé, s’inscrit dans cette logique. «Un certain nombre de partenaires ont été fédérés autour de cette action», rappelle Saâd qui croit dur comme fer à cette initiative. En effet, l’Ausim, la CGEM, l’AMDIE, l’ADD, l’APEBI et le Technopark sont tous de la partie. «Une commission stratégique qui va encore réunir tous les partenaires se tiendra dans les semaines à venir pour mettre en place un plan d’action et, si ça se trouve, un contrat-programme», révèle en avant-première le patron de l’Ausim. En gros, MoroccoTech se veut inclusif et fédérateur, militant pour les startups. «Mais on ne peut pas parler de MoroccoTech, ni d’une digital nation sans parler d’inclusion digitale. Celle-ci peut être définie par trois grandes notions, dont l’accès à l’information. Or nous avons beau afficher un taux d’équipement en mobile de 150% et très haut niveau d’équipement en 3G et 4G, le fait est que les Marocains consomment beaucoup de réseaux sociaux, mais produisent peu de contenu scientifique de qualité comparativement à d’autres pays», souligne Mohamed Saâd.

L’Intelligence artificielle, nerf de la guerre ?

«Il est important d’ériger l’IA en priorité nationale dans le chantier de la transformation digitale du pays», a souligné Ahmed Réda Chami, président du CESE (Conseil économique, social et environnemental), lors d’un atelier virtuel dédié à la présentation de l’avis du Conseil intitulé «Vers une transformation digitale responsable et inclusive». Un avis discutable, selon l’invité de L’info en Face. «Il y a aussi l’informatique quantique, le Cloud. Ce n’est pas la technologie qui fait le développement d’une nation. La digitalisation, je l’attaque d’un point de vue “besoin”. C’est ce qui détermine quelle technologie est prioritaire. Pour moi, par exemple, le Cloud First est beaucoup plus important que l’IA. Une fois qu’on aura mis en place les fondamentaux d’une Open Data et d’un Smart Data ouvert pour les universités et les startups l’IA viendra».

Le coding, la langue étrangère du futur qu’il faut apprendre dès maintenant

La digitalisation des services rendus au citoyen est un gros chapitre de la Digital Nation. Il faut créer une industrie, avec 10% du PIB. Mais pour y arriver, le Maroc doit être capable de créer de l’innovation, pas de l’acheter à l’étranger. C’est pourquoi il faut, selon Mohamed Saâd, repenser le mindset de l’Université et des écoles d’ingénieurs. Le coding est également important et il faut apprendre dès le plus jeune âge et «nous sommes en train de voir avec le ministère comment l’intégrer dans les cursus des collégiens et lycéens», révèle L’invité de L’Info en Face.

La fiscalité digitale pour attirer les investissements

Force est de constater qu’il existe un grand vide quant à la fiscalité incitative pour les investissements dans le digital et autour des startups. «Il faut faire coïncider l’horloge politique et digitale du pays. Il faut que l’on soit sur la même longueur d’onde, être tous connectés pour réussir. De manière plus globale, il est important pour le Maroc de changer de paradigme et d’aller vers un business model qui fasse émerger le secteur du digital», souligne Mohamed Saâd. Mais avec quel capital humain va-t-on réussir cette émergence ? «L’emploi dans le secteur du digital, ça va venir. Mais il faudrait quand même que l’on ait de la compétence et de l’expertise sur ce volet-là. Le sujet qui m’interpelle, c’est ce pont que l’on doit créer entre l’entreprise et l’université», explique-t-il. On doit se diriger vers le financement, par des entreprises, des départements de Recherche & Développement (R&D) dans les universités. Ces dernières ne peuvent pas combler à elles seules le déficit en capital humain. «C’est pour cette raison que je dis que l’Ofppt est un acteur important dans cette équation», souligne Mohamed Saâd.

Les programmes d’alternance peuvent donc être très utiles pour construire un modèle viable. Pour résumer, l’investissement dans la R&D est faible et les ressources humaines sont rares. Le patron de l’Ausim reste, cependant, optimiste et qualifie cela de «challenging». Quoi qu’il en soit, le secteur technologique au Maroc est en constante croissance. «Un dirham investi en 2016 à la Bourse de Casablanca sur l’indice Tech, qui regroupe 7 valeurs technologiques, rapporte 485% de performance aujourd’hui, soit mieux que le Nasdaq et l’Euronexx. C’est dire combien ce secteur est prisé au Maroc par les investisseurs et les entreprises», conclut Mohamed Saâd.

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