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Mostafa Labrak : «Le Maroc devrait se préparer à un choc pétrolier»

Avec la guerre en Ukraine, la menace d'une forte poussée inflationniste des prix de l’énergie est bien réelle. Importateur net de ses besoins en énergie, le Maroc ne pourrait échapper à un éventuel choc pétrolier, prédit Mostafa Labrak, directeur général d’Inergysium consulting, invité de L'Info en Face.

Mostafa Labrak : «Le Maroc devrait se préparer à un choc pétrolier»
Le problème actuel n’est pas uniquement le prix du pétrole mais surtout la disponibilité et les tensions sur l’approvisionnement.

Personne n’avait imaginé qu’à la sortie de la crise sanitaire, l’économie mondiale se trouverait plongée dans un tel chaos. Ruptures de stocks et goulots d’étranglement sont apparus tout au long des chaînes d’approvisionnement. Les prix s’enflamment, à commencer par ceux de l’énergie. La crainte de l’inflation resurgit, rejaillissant jusque sur les politiques monétaires. Or, aujourd’hui avec l’éclatement de la guerre en Ukraine, les menaces sont réelles même pour les économies les plus solides.

«Avant la guerre, la Covid demeure le premier responsable de cette poussée inflationniste sur les prix de l’énergie. La pandémie a empêché le monde d’anticiper la croissance tout simplement. Rien que pour l’énergie, les investissements dans l’exploration de nouveaux gisements ont été retardés par manque de visibilité. Ce manque d’investissement a engendré des retards dans la production d’où la rareté des produits», explique Mostafa Labrak, directeur général d’Inergysium consulting, une société d’études et conseils dans les domaines liés aux carburants, au trading et à l’approvisionnement. 

Lors de son passage devant Rachid Hallaouy dans l’émission de «L’Info En Face», l’expert n’y est pas allé avec le dos de la cuillère : au regard du contexte actuel, le Maroc à l’instar des autres pays devrait se préparer à un choc pétrolier : «Il y a un semblant de conflit qui se trame. Car, valeur aujourd’hui, la Russie c’est toujours le 2e producteur avec 10 millions de barils de pétrole par jour. C’est aussi le premier producteur de gaz naturel. Le pays continue actuellement de produire, car c’est encore l’une des principales sources de devises. Mais si la Russie arrête demain de produire, le monde va avoir un réel problème de rareté».

Quelles sont donc les alternatives possibles ? Le pétrole iranien est-il une option ?, s’interroge Rachid Hallaouy. «Je pense que les Iraniens ont une carte à jouer s’ils veulent revenir sur le marché et aller vers la levée de l’embargo (….). Mais le problème actuel n’est pas uniquement le prix mais surtout la disponibilité et les tensions sur l’approvisionnement. C’est aussi un moment où les spéculations vont continuer. Car vivre avec un pétrole à 120 ou à 110 dollars le baril n’est pas le plus problématique. Je rappelle qu’entre 2012 et 2013, nous avions passé deux années avec un prix supérieur à 100 dollars. Or, à l’époque le problème de rareté ne se posait pas», décrypte l’analyste. Ayant démarré en décembre 2015, la compensation des hydrocarbures camouflait entre 2012 et 2013 l’impact de la hausse de prix sur la bourse des citoyens, puisque le prix du litre était subventionné à hauteur de 3 à 5 DH, poursuit l’analyste.

Quid du gaz ?

C’est un fait, la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine pourrait avoir des conséquences sur l’approvisionnement en gaz naturel. La Russie est le second producteur mondial de gaz derrière les États-Unis, mais est le premier pays exportateur au monde. En 2019, selon les données d’Eurostat, près de 38% du gaz consommé dans l’Union européenne provenait de Russie. Le pays est donc de loin le premier fournisseur de gaz naturel des Européens. «Le choc sera aussi gazier (…) mais le gaz n’est pas le plus important au Maroc, car il est utilisé aujourd’hui beaucoup plus dans deux centrales de gaz. Celles-ci sont à l’arrêt, mais cela n’a pas empêché la production d’électricité puisque les autres centrales à charbon sont disponibles », ajoute Mostafa Labrak.

La question qui se pose dès lors : le pays pourrait-il continuer à subventionner les prix du gaz butane malgré les hausses importantes auxquelles il se prépare au niveau mondial ? «Le Maroc consomme 10% de gaz propane dont les prix sont libres, mais le pays consomme pratiquement 3 millions de tonnes de gaz butane, qui s’accroit annuellement de 5%. Avec 102 DH de subvention sur la bouteille de gaz, d’où une ardoise de 17 milliards de DH par an, l’État ne pourra que continuer à prendre en charge ces dépenses en plus, car l’enjeu social compte pour beaucoup», soutient Labrak.

 

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