La sonnette d'alarme a été tirée par un nouveau rapport conjoint de la Commission de l'Union africaine (CUA), de la Commission économique des Nations unies pour l'Afrique (CEA), de la Banque africaine de développement (BAD) et du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Ses auteurs indiquent que les différentes crises qu’a subies le monde ces dernières années auraient entravé les efforts du continent pour atteindre les objectifs de développement durable ODD.
Fait alarmant, le rapport explique que, sans des politiques visant à accélérer les progrès vers ces Objectifs, au moins 492 millions de personnes se retrouveront en situation d'extrême pauvreté d'ici à 2030, et au moins 350 millions d'ici à 2050. Commentant ce bilan, l'administratrice-assistante et directrice régionale du bureau du PNUD pour l'Afrique, Ahunna Eziakonwa, affirme que «l’Afrique ne peut plus attendre, et le moment est venu pour le continent de redéfinir sa voie de développement et de s’approprier son programme de développement».
Le rapport 2022, intitulé «Mieux reconstruire après la maladie du coronavirus, tout en faisant progresser la pleine mise en œuvre de l'Agenda 2030 pour le développement durable», présente ainsi une analyse approfondie de cinq ODD. Il s'agit de l’éducation de qualité, l’égalité des sexes, la vie aquatique marine, la vie terrestre et les partenariats pour les objectifs.Education, égalité des genres... Gap à rattraper sur les 5 ODD
Dans le détail, concernant l’Objectif 4 portant sur l’éducation de qualité, les auteurs indiquent que le continent n’a progressé que lentement dans l’offre d’une éducation de qualité pour tous. «Malgré une amélioration considérable de la scolarisation, quelque 288 millions d’enfants en âge d’être scolarisés ne le sont pas, en particulier dans les pays touchés par des conflits», souligne le document. Pour y remédier, il faudrait accroître le financement des infrastructures éducatives, en se concentrant sur l’enseignement pré-primaire, en investissant dans la formation des enseignants et dans la connectivité numérique, entre autres.
Pour ce qui est de l’ODD 5, qui s’intéresse à l’égalité des genres, le rapport alerte sur la lenteur des progrès et recommande l’application de cadres juridiques afin de protéger les femmes et les filles contre les discriminations, les violences domestiques, le mariage des enfants et les mutilations génitales féminines. «Par exemple, bien que les femmes constituent une grande partie de la main-d'œuvre africaine, seuls 29,8% des postes de direction en Afrique, hors Afrique du Nord, étaient occupés par des femmes en 2022, soit une modeste augmentation par rapport aux 29,3% de 2015».S’agissant de l’Objectif 14 relatif à la vie aquatique marine, le document indique que les polluants organiques et chimiques issus des activités humaines continuent de mettre en péril l’écosystème marin du continent. C’est pourquoi le rapport recommande le renforcement des capacités institutionnelles pour faire appliquer les lois et les réglementations relatives à l’utilisation durable des ressources marines.
Pour l’ODD 15 sur la vie terrestre, le rapport indique que la perte de couverture forestière, de biodiversité et de dégradation des sols reste élevée et généralisée en Afrique. Les données montrent que la dégradation des sols affecte 46% des terres et 65% de la population africaine, ce qui coûte 9,3 milliards de dollars par an à la région.Enfin, les auteurs affirment que peu de progrès ont été mis en œuvre pour ce qui est de l’Objectif 17 portant sur les partenariats. La production de recettes intérieures et les flux d'investissements directs étrangers (IDE) de l'Afrique continuent de stagner par rapport aux autres régions. La gestion de la dette a été un défi pour les gouvernements africains, le service de la dette amputant des ressources en capital déjà rares pour le développement durable. Le rapport note qu’en 2020, l'Afrique a perdu près de 89 milliards de dollars, en raison des flux financiers illicites (IFF).
Pour faire progresser le développement durable, le rapport suggère de renforcer la mobilisation des ressources domestiques et de réduire les flux financiers illicites. Il invite également les acteurs internationaux à soutenir le déploiement d'instruments financiers innovants, tels que les obligations vertes et bleues et les échanges dette-climat.Afin de maintenir le cap sur l’atteinte des objectifs, l'Afrique doit favoriser la mobilisation des ressources et l'épargne nationales, et stimuler les TIC pour accélérer la mise en œuvre des ODD et de l'Agenda 2063.