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Pas plus de 5.298 travailleurs domestiques déclarés à la CNSS à fin 2021

Selon la loi 19.12 fixant les conditions d’emploi des travailleuses et travailleurs domestiques, les employeurs de maison sont obligés de déclarer leurs employés auprès de la Caisse nationale de sécurité sociale. Mais plus de trois années après l’adoption de cette loi, son application traîne. Seuls 5.298 travailleurs domestiques ont été déclarés à fin 2021.

Pas plus de 5.298 travailleurs domestiques déclarés à la CNSS à fin 2021

Le chantier national de la généralisation de la protection sociale avance à grands pas. Mais si l’on constate que l’inscription des travailleurs non salariés à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) progresse rapidement ces derniers mois, pour les employés de maison, c’est loin d’être le cas. Bien que le cadre juridique concernant le secteur du travail domestique soit clair, son application traîne. En effet, la déclaration des employés de maison à la sécurité sociale est devenue obligatoire depuis octobre 2018, conformément aux dispositions de la loi 19.12.

Pourtant, le nombre de travailleurs domestiques déclarés à la CNSS ne dépasse pas les 5.298 à fin 2021. «Plus de 3 ans se sont écoulés depuis l’entrée en vigueur de la loi fixant les conditions de travail et d’emploi des travailleuses et des travailleurs domestiques. Nous restons, toutefois, à des niveaux relativement faibles par rapport aux objectifs initialement prévus dans le cadre du chantier de la généralisation de la couverture sociale», déclare au «Matin» Reda Benamar, directeur des Études, communication et développement à la CNSS. Et d’ajouter qu’«à fin 2019, le nombre de travailleurs domestiques déclarés à la CNSS ne dépassait pas les 1.097. Il est passé ensuite à 3.444 à fin 2020 pour atteindre 5.298 à fin 2021, pour 4.116 employeurs».

Pourquoi ce chantier avance-t-il si lentement ? D’après Hassan Laajaj, consultant en droit social et relations professionnelles et ancien directeur de travail, plusieurs facteurs pourraient expliquer ce triste constat. «Les entraves à la déclaration des employés de maison sont d’ordre économique, culturel, social et administratif. La plupart des employeurs “maîtres de maisons” qui ont procédé à la déclaration de leurs employés domestiques sont des gens instruits, qui suivent de près l’actualité et qui ont également les moyens nécessaires pour supporter la charge de la CNSS. Ces derniers ne représentent malheureusement qu’une minorité. De nombreuses personnes ignorent toujours l’existence de cette obligation même si beaucoup de temps est passé depuis l’adoption de la loi», souligne l’expert.

«Il y a également beaucoup de couples appartenant à la classe moyenne qui sont obligés de recruter des employés de maison, mais qui n’ont pas les moyens pour supporter la charge de l’affiliation à la CNSS. D’autres ont tout simplement peur des procédures administratives et de l’engagement. De leur côté, les employés sont généralement soit des personnes démunies et peu exigeantes, soit elles préfèrent elles-mêmes ne pas être reliées à un contrat. Pour remédier à cela, il faut y aller doucement pour dépasser les résistances, et ce en combinant la simplification des procédures de déclaration, la diminution de la charge, la sensibilisation des employeurs et des employés...», ajoute-t-il.

De son côté, Saïd Lamani, consultant en droit du travail et relations professionnelles et ex-inspecteur du travail, explique que ce qui rend cette loi difficilement applicable est la difficulté d’accès et de contrôle du lieu de travail qui n’est autre que la maison. «Grâce à la loi 19.12, le travail domestique peut enfin être encadré et réglementé en fixant les droits du personnel de maison et les obligations des employeurs. Mais si on ne peut que se réjouir de l’adoption d’une telle loi, il n’est malheureusement pas facile de s’assurer de son application. Dans ce cas précis, le contrôle ne peut être systématique, puisqu’il doit être fait au sein des foyers», indique-t-il. Et de préciser : «En effet, selon cette législation un contrôle des inspecteurs du travail ne peut être programmé qu’en cas de plainte d’une des parties. C’est la seule façon qui existe pour avoir le droit de constater les violations commises au domicile. C’est pourquoi il est important de fournir plus d’effort de communication, notamment dans le cadre du chantier national de la généralisation de la protection sociale». 

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Une problématique mondiale

L’Organisation internationale du travail (OIT) a publié, en juin dernier, un rapport déplorant un chiffre alarmant sur les travailleurs domestiques. L’Organisation a, en effet, déclaré que 90% des travailleurs domestiques dans le monde sont privés de plusieurs droits et que seuls 6% d’entre eux disposent d’une couverture sociale complète. Le rapport met aussi en évidence des différences majeures entre les régions. En Europe et Asie centrale, plus de 57% des travailleurs domestiques sont légalement couverts par l’ensemble de ces prestations. Un peu plus de 10% ont ce droit dans la région des Amériques. Quasiment aucun travailleur domestique n’est entièrement couvert dans les États arabes, l’Asie et Pacifique et l’Afrique. Selon l’OIT, ce sont pourtant des régions qui comptent des pays où les travailleurs domestiques sont employés en grand nombre. Les travailleurs domestiques, au nombre de 75 millions dans le monde, dont trois quarts sont des femmes, se heurtent, pour la plupart, à de multiples obstacles qui les empêchent de bénéficier d’une couverture légale et d’un accès effectif à la sécurité sociale, comme l’a expliqué le rapport.

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