L’économie nationale devrait encore faire les frais de l’inflation en 2023. Dans son Budget exploratoire pour le prochain exercice, le Haut-Commissariat au Plan (HCP) pronostique une croissance de 3,7% après un ralentissement de 1,3% attendu cette année. Ces projections ont été élaborées sur la base d’une évolution des impôts et taxes sur les produits nets de subvention de 1,5%. «Les prévisions économiques pour l’année 2023 tiennent compte d’une croissance mondiale modérée induisant un ralentissement prévisible de la demande mondiale adressée au Maroc et du maintien des niveaux élevés des prix des matières premières au niveau mondial. Ces projections se basent également sur un scénario d’une production céréalière moyenne et prennent en considération la reconduction de la politique budgétaire mise en vigueur durant l’année 2022», explique Ayache Khellaf, secrétaire général du HCP, lors de la conférence de présentation du Budget exploratoire 2023, le 14 juillet à Rabat.
Selon lui, ces perspectives restent, toutefois, marquées par un niveau élevé d’incertitudes et des risques baissiers liés notamment à l’évolution de la situation géopolitique et les effets qui en découlent en particulier les perturbations des chaînes d’approvisionnement et la pénurie des produits de base.
Sur la base de toutes ces hypothèses, le secteur primaire devrait afficher une valeur ajoutée en hausse de 11,8% en 2023, conforté par le raffermissement des cultures hors céréales et de l’activité de l’élevage durant la campagne 2022-2023. En revanche, les activités non agricoles devraient enregistrer une valeur ajoutée en décélération à près de 2,9% en 2023 au lieu des 3,5% prévus cette année. Le secteur secondaire, quant à lui, devrait afficher une croissance de 3,5%, profitant d’une amélioration prévisible des industries de transformation et celle du secteur minier, en relation notamment avec le redressement attendu de la demande adressée au phosphate et de ses dérivés. Par ailleurs, le secteur du bâtiment devrait continuer de pâtir des effets négatifs de la hausse de l’inflation des produits de construction. Le secteur tertiaire devrait, de son côté, connaître une croissance modérée de 2,5% en 2023 au lieu de 4,5% attendue en 2022, attribuable notamment au ralentissement prévu des services marchands de 2,1% après 4,5% prévu pour l’année en cours et de 4,1% des services non marchands en 2023.
La demande intérieure croîtrait de 3,3% en 2023
La demande intérieure qui devrait monter de 3,3% en 2023 (contre 1,3% prévu en 2022) contribuerait ainsi de près de 3,6 points à la croissance du PIB au lieu de 1,5 point en 2022. Cette hausse s’explique par l’accroissement prévu de la consommation des ménages de 2,4%, profitant de l’amélioration des revenus, portant sa contribution à la croissance économique de 1,4 point au lieu de 0,9 point en 2022. De même, la consommation des administrations publiques devrait maintenir sa contribution à près d’un point. Par ailleurs, l’investissement brut devrait s’accroître de près de 3,5% contribuant positivement à la croissance de 1,1 point au lieu d’une contribution négative attendue en 2022. En parallèle, souligne le HCP, la demande extérieure devrait avoir une contribution nulle à la croissance suite notamment à une hausse en volume des importations des biens et services de 4,1% en 2023 contre une évolution de 5,2% des exportations en 2023.
En outre, la hausse des prix des produits énergétiques et alimentaires devrait continuer de peser sur la balance commerciale dont le déficit devrait rester élevé pour atteindre 17,5%, quoiqu’en allègement par rapport au 17,9% du PIB en 2022. Tenant compte des échanges des services, le déficit en ressources devrait s’alléger passant de 11,6% du PIB en 2022 à 10,8% du PIB l’année suivante. Avec un accroissement du PIB nominal de 4,5% en 2023 et de la consommation finale nationale de 4,1%, le taux d’épargne intérieure devrait, quant à lui, s’afficher en amélioration à 21,2% du PIB en 2023 au lieu de 20,8% prévu pour l’année en cours. En tenant compte des revenus nets en provenance du reste du monde qui devraient représenter près de 5,3% du PIB, l’épargne nationale devrait se maintenir à 26,5% du PIB en 2023, mais resterait inférieure au niveau d’investissement brut à 30,9% du PIB. De ce fait, le besoin de financement de l’économie devrait atteindre 4,4% du PIB en 2023 en allégement par rapport à 4,7% du PIB prévu pour 2022.
La charge de compensation pèsera lourd sur le Budget
La poursuite prévue de l’évolution des dépenses budgétaires alourdies par le niveau élevé des prix des produits subventionnés et par l’effort budgétaire dans la généralisation de la protection sociale et de la réforme de la santé et de l’éducation devraient exercer davantage de pression sur les Finances de l’État en 2023. Concrètement, les dépenses ordinaires devraient se stabiliser à près de 19,7% du PIB et rester toutefois supérieures à la moyenne annuelle de 18,7% enregistrée sur la période 2015-2020. Cette hausse s’explique principalement par le maintien des dépenses de compensation à près de 2,5% du PIB au lieu d’une moyenne de 1,4% au cours de la même période. En outre, indique le HCP, l’accroissement attendu des dépenses des autres biens et services et celles de la masse salariale devraient alourdir davantage les dépenses ordinaires. Quant aux recettes ordinaires, elles devraient ralentir en 2023 pour s’établir à 19,5% du PIB en léger recul par rapport à leur niveau estimé en 2022, suite notamment au ralentissement prévu des recettes de l’IS et celles de la TVA à l’importation et des droits de douane. De leur côté, les recettes non fiscales devraient atteindre 2,2% du PIB, bénéficiant de la mobilisation des mécanismes innovants de financement et des recettes de monopoles.
En tenant compte des dépenses d’investissement qui devraient s’établir à 5,5% du PIB, le déficit budgétaire devrait se maintenir à près de 5,5% du PIB en 2023. Face à cette situation déficitaire, et tenant compte du niveau des stocks en devises, et des flux nets des investissements directs étrangers en hausse de près de 10%, le besoin de financement devrait être couvert par des emprunts extérieurs et intérieurs. Dans ces conditions, le taux d’endettement du Trésor devrait poursuivre sa tendance haussière pour atteindre près de 71,2% du PIB, largement supérieur à 62,4% enregistré en moyenne durant la période 2014-2021. Tenant compte de la dette extérieure garantie, qui devrait reculer à près de 12,4% du PIB en 2023, la dette publique globale devrait atteindre 83,6% du PIB au lieu de 83,3% estimé en 2022 et 77,1% en moyenne entre 2014-2021.
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Financement du Budget : Une nouvelle sortie du Trésor à l’international est indispensable
La pression exercée sur le Budget de l’État devrait accentuer le besoin de financement du Trésor. Ainsi, estime le HCP, le recours au marché international pour le financement de ce besoin s’avère indispensable afin d’éviter une pression sur les liquidités domestiques, quoique le resserrement monétaire des grandes Banques centrales à l’échelle internationale devrait induire la hausse des taux d’emprunt. Dans ce cadre, une sortie du Trésor à l’extérieur de 40 milliards de dirhams est prévue selon la Loi de finances 2022 après une absence en 2021. Résultats des courses, le poids de la dette extérieure du trésor dans l’endettement global du Trésor devrait augmenter pour se stabiliser à 23,6%, demeurant toutefois moins élevé que son benchmark de référence, soit 25%, mais plus élevé que son niveau moyen de 22,2% observé durant la période 2014-2019.
S’agissant de la dette intérieure du trésor, elle devrait représenter 76,4% de la dette du Trésor. Du coup, l’endettement global du Trésor devrait poursuivre son trend haussier pour atteindre 70,4% du PIB en progression de 8,5% en 2022. Tenant compte de la dette extérieure garantie qui devrait représenter près de 12,9% du PIB, le poids de la dette extérieure publique devrait se maintenir à près de 29,5% du PIB à fin 2022, en recul par rapport à son niveau de 32,6% en 2020. Globalement, la dette publique devrait s’accroître pour passer à 83,3% du PIB au lieu de 82,5% en 2021.
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