L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a averti la semaine dernière que le monde fait face à une recrudescence inquiétante du choléra, après des années de déclin. En effet, durant les neuf premiers mois de l'année, 26 pays ont fait état d'épidémies, contre moins de 20 par an entre 2017 et 2021. L’OMS a également précisé que le nombre de décès dû à cette maladie a considérablement augmenté dernièrement. Le taux moyen de létalité lié au choléra enregistré en 2021 est presque trois fois plus élevé qu'au cours des cinq précédentes années.
Comment expliquer cette situation ? D’après l’Organisation onusienne, les événements climatiques extrêmes tels que les inondations, les cyclones et les sécheresses réduisent davantage l'accès à l'eau potable, ce qui crée un environnement idéal pour le développement du choléra.
Doit-on alors craindre la réapparition de cette maladie dans notre pays ? Contacté par nos soins, Dr Mouad Mrabet, coordinateur du Centre national des opérations d’urgence de santé publique au ministère de la Santé, assure que le risque d’apparition d’une épidémie de choléra au niveau national est très faible. «Aucun cas de choléra n’a été détecté au Maroc depuis 1997. Il faut savoir que les principaux facteurs qui jouent un rôle important dans l’apparition de l’épidémie du choléra et son développement sont la dégradation des conditions d'hygiène et les problèmes d'assainissement et d'accès à l'eau potable. Or, le Maroc dispose d’un bon niveau d’assainissement et d’accès à l’eau potable. De ce fait, le risque d’apparition de l’épidémie de choléra dans le Royaume est très faible», explique-t-il.
Dr Mrabet indique, en outre, que le risque zéro n’existe pas. «Que ce soit au Maroc ou dans des pays développés en Europe, par exemple, il y a toujours le risque d’avoir un cas importé. Et comme le choléra est une maladie très contagieuse, les cas pourront se multiplier rapidement. Rappelons que dès l’apparition d’un cas suspect dans le pays, celui-ci sera déclaré. Et s’il est confirmé, il sera ensuite pris en charge», a précisé le responsable. Ce dernier affirme, par ailleurs, que la prise en charge de cette infection s’est nettement améliorée en comparaison avec le passé.
De son côté, Dr Tayeb Hamdi, médecin, chercheur en politiques et systèmes de santé, souligne que le système de santé marocain peut bien faire face à une épidémie de choléra, même si les risques sont faibles. «Cette maladie se développe essentiellement dans des zones très peuplées, avec un accès limité à l'eau potable ou sans réseaux d'assainissement. C'est pourquoi on ne peut pas vraiment dire que le Maroc court le risque de développer une épidémie de choléra. Mais à cause des changements climatiques, on n’est jamais à l’abri de déclenchement de ce genre de maladie. Heureusement, le Maroc a la capacité de retrouver la source de contamination rapidement et d'encercler les nouveaux cas s’ils apparaissent et les prendre en charge», déclare au «Matin», Dr Hamdi. Ce dernier rappelle que le choléra est une infection diarrhéique aiguë causée par l'absorption d'eau ou de produits alimentaires contaminés par la bactérie vibrio cholerae. «Elle se déclenche par une diarrhée et des vomissements continus provoquant une déshydratation qui peut être mortelle en l'absence de traitement. Celui-ci consiste essentiellement en la réhydratation orale. Le meilleur moyen de prévenir cette infection est d’avoir une hygiène de vie irréprochable», affirme le médecin.
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Les vaccins existent, mais en quantité insuffisante
L’OMS rappelle que le choléra est une maladie diarrhéique aiguë, dont on peut mourir en quelques heures en l'absence de traitement. Mais la plupart des personnes infectées n'auront aucun symptôme ou ne présenteront que des symptômes bénins et peuvent être traitées avec succès avec des sels de réhydratation orale. L’Organisation rappelle, en outre, l’existence des vaccins efficaces contre cette maladie. Mais ils sont en nombre insuffisant, car la demande dépasse l'offre. «Il reste encore quelques millions de doses pour cette année», a déclaré Philippe Barboza, chef d'équipe de l'OMS pour le choléra et les maladies diarrhéiques épidémiques. «Le principal problème est qu'il n'existe qu'un seul fabricant de vaccins. Nous devons trouver des moyens d'impliquer davantage de fabricants. La situation est grave, mais elle n'est pas désespérée. Le choléra est, après tout, évitable et traitable. En faisant preuve de clairvoyance et en prenant des mesures appropriées, nous pouvons inverser la tendance», a-t-il conclu.