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Une numérisation complète de l’économie augmenterait de 46% le PIB par habitant sur 30 ans dans la région MENA

Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, la numérisation complète de l’économie, y compris des services financiers, entraînerait une augmentation du PIB par habitant d’au moins 46% sur 30 ans au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA). Ce qui représenterait à long terme un gain estimé à au moins 1.600 milliards de dollars pour la région. Le rapport fait néanmoins état d’un «paradoxe du numérique» dans toute la région, notamment au Maroc, qu’il faudra corriger pour stimuler fortement le potentiel de croissance et de création d’emplois.

Une numérisation complète de l’économie augmenterait de 46% le PIB par habitant sur 30 ans dans la région MENA
Ce potentiel de croissance s’explique principalement par le fait que les technologies numériques réduisent les coûts d’information qui entravent les transactions économiques.

La Banque mondiale vient de publier son rapport phare sur l’économie numérique dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). Ce document démontre comment l’utilisation généralisée de services numériques, tels que l’argent mobile et les paiements dématérialisés, est susceptible de stimuler fortement la croissance économique. Il dresse, néanmoins, un bilan mitigé pour le Maroc concernant sa transition digitale. Il fait également état d’un «paradoxe du numérique» dans toute la région MENA : alors que le nombre de comptes de médias sociaux dans la région est élevé par rapport à ce qu’il devrait être compte tenu du produit intérieur brut (PIB) par habitant, les outils numériques, comme Internet, sont peu utilisés par exemple pour effectuer des paiements. Or, estime le rapport, la numérisation complète de l’économie pourrait entraîner une augmentation du PIB par habitant d’au moins 46% sur 30 ans. Ce qui représenterait à long terme un gain estimé à au moins 1.600 milliards de dollars pour la région. Dès la première année, le gain cumulé de PIB par habitant s'élèverait à près de 300 milliards de dollars. Mais beaucoup reste à faire pour atteindre ce potentiel.

En effet, si environ 66% des habitants de la région MENA utilisent internet (contre seulement 61% en Amérique latine et Caraïbes et 54% en Asie de l’Est et Pacifique), en revanche, le taux d’utilisation des paiements numériques dans les pays en développement de cette région (c’est-à-dire sans tenir compte des États membres du Conseil de coopération du Golfe) se situe à seulement 32%, alors qu’il atteint 43% en Amérique latine et Caraïbes et 73% en Europe et Asie centrale. Pour le Maroc, 62% de la population utilisent internet, soit un taux inférieur à la moyenne de la région MENA. Et le taux d’utilisation des paiements numériques dans le pays ne dépasse pas 17%, contre une moyenne de 50% au Moyen-Orient et Afrique du Nord et de 74% pour les pays du Golfe.

La pénétration de l’argent mobile inférieure au potentiel

En outre, dans la plupart des pays arabes, à l’exception des Émirats arabes unis, la pénétration de l’argent mobile est inférieure au potentiel, compte tenu de leurs niveaux de revenu. À titre d’exemple, la part de la population disposant d’un compte d’argent sur mobile dans les pays du Golfe (21 %) est inférieure à celle de l’Afrique subsaharienne (24%). Au Maroc, cette part se situe à seulement 1%, contre une moyenne de 8% pour la région MENA, l’Asie de l’Est & Pacifique et de 6% en Europe et Asie centrale. De même, au Maroc, le taux d’utilisation d’Internet pour l’e-commerce est très faible (1,6%), comparé à une moyenne de 18,3% pour la région MENA, 34,7% en Europe et Asie centrale et 69,5% en Amérique du Nord. Le taux affiché au Maroc est même inférieur à celui enregistré en Afrique subsaharienne (3,6%). Le Maroc fait également pâle figure sur le volet utilisation des services bancaires en ligne, avec un très faible taux de 1%, contre une moyenne de 19% pour MENA, 23% en Afrique subsaharienne et de 26% au niveau mondial. En outre, sur l’Indice de développement de l’administration en ligne, il se situe pour le Maroc au niveau de 57, contre 61 pour la région MENA et 60 à l'échelle mondiale. Le Royaume, néanmoins, se distingue concernant les «Entreprises utilisant le courrier électronique», avec un taux de 97%, contre une moyenne de 65% pour la région MENA et de 70% à l’échelle mondiale. Idem, lorsqu’il s’agit des «Entreprises disposant de leur propre site web» : 55% contre une moyenne mondiale de 44%.

Selon les experts de l'institution de Bretton Woods, cette réticence plus au moins globale de la région MENA envers le recours aux technologies numériques pour les transactions financières est probablement imputable au manque de confiance de la société à l’égard de l’administration publique et des sociétés commerciales. Elle s’explique aussi par des réglementations qui compliquent la transformation numérique. Or «les bénéfices du passage à une économie plus numérique sont exponentiels et les gouvernements devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour éliminer les obstacles qui freinent cette transition. Les gains seront d’autant plus importants que la transition est rapide», souligne Ferid Belhaj, vice-président de la Banque mondiale pour la région MENA. Selon lui, une transformation numérique créerait des emplois dans une région où le taux de chômage atteint un niveau inacceptable, en particulier chez les jeunes et les femmes.

Selon le rapport, l’adoption universelle des technologies numériques permettrait, en effet, de doubler le taux d’activité des femmes, avec une hausse d'environ 20 points de pourcentage sur une période de 30 ans (soit une progression du nombre de femmes actives de 40 à 80 millions). L’emploi dans le secteur manufacturier augmenterait d’au moins 5% sur 30 ans, avec à la clé 1,5 million d'emplois supplémentaires sur cette période, soit une moyenne de 50.000 nouveaux emplois chaque année.

Les recommandations de la Banque mondiale

Pour renforcer et accélérer l’adoption universelle des technologies numériques dans la région, le rapport préconise notamment d’ouvrir davantage le marché des télécommunications à la concurrence, ce qui pourrait contribuer à accroître l’offre et l’utilisation de l’argent mobile et des paiements numériques et, de surcroît, à améliorer l’inclusion financière en élargissant l’accès aux comptes courants.

Des mesures sont également nécessaires pour mettre en place un cadre réglementaire plus solide et propice au développement de l’e-commerce, notamment en ce qui concerne les systèmes de signature électronique, la protection de la confidentialité des données et la cybersécurité. «Plus généralement, il est essentiel de prioriser les réformes indispensables à la généralisation des paiements dématérialisés pour parvenir à résoudre le paradoxe du numérique et accélérer la transformation digitale de l’économie dans la région MENA», estime la Banque mondiale. À noter que le Maroc et la Banque mondiale ont signé un partenariat de financement pour un programme d’appui à l’inclusion financière et numérique. Ce programme a démarré en 2020 avec un premier prêt de 500 millions de dollars. En juin 2021, un deuxième prêt de 450 millions de dollars a été approuvé par l’institution de Bretton Woods. Ce projet a été lancé pour accélérer les réformes déjà engagées par le Royaume visant à améliorer l’inclusion financière et l’accès à des infrastructures et des services numériques compétitifs et de qualité pour les entreprises et ménages.

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