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Les régions face aux défis climatiques

Les territoires sont confrontés à un changement climatique irréversible qui les oblige à revoir leurs modèles de développement et à lancer, dès aujourd'hui, des projets de territoire sobres et résilients. Chaque territoire est appelé à le faire en fonction de la transformation climatique qu'il subit dans sa zone géographique, de la disponibilité des ressources renouvelables ou non, des héritages et de la structure sociale de sa population. Pour en parler, l’initiative citoyenne OTED a organisé jeudi dernier la quatrième édition de «Parlons Territoires» sur le thème «Territoires : les chantiers de l’adaptation climatique».

Les régions face aux défis climatiques
Docteur Ibrahim Hafidi, directeur général de l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (Andzoa).

C’est un sujet d'actualité brûlante : les territoires sont confrontés à un changement climatique irréversible qui les oblige à revoir leurs modèles de développement et à créer, dès aujourd'hui, des projets de territoire sobres et résilients. Pour parler des chantiers de l’adaptation climatique au niveau des territoires, l’initiative citoyenne OTED a organisé, jeudi dernier, sa quatrième édition «Parlons Territoires» sur le thème «Territoires : les chantiers de l’adaptation climatique».
La modératrice Nadia Lamlili et ses cinq intervenants ont mis en évidence des projets de territoire ayant pour point de départ le climat. Les experts ont donné des éléments pour agir dans le cadre de l'adaptation climatique dans différents secteurs : alimentation et agriculture, industrie, emploi, mobilité et transports, biodiversité, justice sociale et utilisation des savoirs
locaux. «Au Maroc, on ne part pas de rien. Nous avons déjà des actions d'adaptation climatique dans les territoires qu'il s'agira d’incorporer dans une démarche inclusive où le politique est aligné sur la vision du territoire et non l'inverse», rappelle Lamlili.

La région du Souss-Massa : premier plan climat territorial du Maroc

Très affectée depuis longtemps par les changements climatiques, la région du Souss-Massa a déployé dès 2006 un Plan territorial de lutte contre le réchauffement climatique (PTRC). Elle est également l’une des premières régions qui ont mis en place une stratégie de gestion rationnelle des ressources hydriques. «Dans le PTRC, nous avons d'abord établi un diagnostic de vulnérabilité en prenant en compte les indicateurs du GIEC (températures, pluviométrie et incendies). Nous sommes passés par la suite au volet atténuation des effets du réchauffement climatique. Grâce à un bureau d'études, nous avons pu identifier les quantités des gaz à effet de serre que nous dégageons dans la région. Nous avons ainsi identifié les secteurs les plus générateurs, comme dans l’énergie, notamment l'éclairage domestique, l'éclairage public et les transports, entre autres», a expliqué Ibrahim Hafidi, directeur général de l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (Andzoa).

Pour l’ancien président de la région du Souss-Massa pendant deux mandats successifs de 2009 à 2021, il a fallu mettre en place des actions de gestion des ressources hydriques, des barrages, des mesures pour mobiliser plus d'eau, mais également d'économie de l'eau. «On a réalisé un grand travail d'économie de l'eau et également des actions de lutte contre les inondations (…). Nous avons un contrat de nappe qui a été élaboré avec tous les partenaires, surtout des agriculteurs de l'agriculture moderne», précise-t-il.
Au niveau national, 9 régions ont déjà commencé leurs PTRC et 5 sont déjà achevés comme celui du Souss-Massa qui arrive à échéance cette année (2017-2022). «Nous étions les premiers, mais le nôtre est déjà dépassé. Donc nous devons l'actualiser et, bien sûr, continuer sur nos projets», ajoute l’expert.

50 millions de dollars pour 10.000 hectares d’arganier

Nécessitant des financements importants, la région du Souss-Massa a dû mobiliser des fonds locaux et internationaux pour l’aboutissement de son PTRC. La région a donc commencé par identifier les projets qu’elle pourrait financer seule, notamment en ce qui concerne l'eau et la lutte contre les inondations. D’autres projets ont été soumis à des bailleurs de fonds : «Nous avons également bénéficié de certains fonds pour le climat. Par exemple, pour la plantation de l'arganier qui a été très affecté par le changement climatique. Ayant nécessité un budget de 50 millions de dollars, ce projet consiste en la plantation de 10.000 hectares d’arganier», indique-t-il.

3 millions d'arbres perdus, 3 millions d’arbres replantés !

À quoi ressemblerait une région climatiquement adaptée ? Faut-il créer une agence comme celle de la région du Souss-Massa pour chaque territoire vulnérable au Maroc ? S’interroge la modératrice Nadia Lamlili. «L'Agence, dont je suis directeur général, a été créée pour résoudre ce problème de dégradation des oasis et des zones de l'arganier également, puisque les deux espaces sont très vulnérables. Pour les oasis, on a perdu la moitié du patrimoine municipal au cours des deux dernières décennies du XXème siècle et la moitié du patrimoine arganier», observe Hafidi. Pour réparer les dégâts causés par le réchauffement climatique à la région, l’Agence a mis en place une stratégie pour réhabiliter les deux écosystèmes des oasis et de l’arganier sans oublier le volet socio-économique. Ainsi, entre 2012 et 2022, beaucoup d'actions ont été initiées en vue de rétablir l'écosystème. «Nous avons perdu 3 millions d'arbres, et nous avons replanté 3 millions d'arbres dans le cadre du Plan Maroc vert. Un objectif réalisé fin 2020. La même année, 200.000 hectares de forêts ont été réhabilités et 10.000 hectares d'arganier ont été replantés. On avait prévu un budget de 92 milliards de dirhams comme investissements publics, mais nos projets ont finalement nécessité 105 milliards de DH», souligne-t-il.

Routes, accès à l'eau potable, électrification rurale, santé et éducation... la région est encore sur tous les fronts

Pour l'adaptation aux changements climatiques, la région a aussi bénéficié de grands projets de coopération et de financements extérieurs. «Nous avons un projet du Fonds d'adaptation aux changements climatiques de 10 millions d’euros et une quinzaine de communes rurales vont pouvoir en bénéficier», soutient le DG d’Andzoa.

100 millions d’euros mobilisés depuis 2018 à Tafilalet

Au Maroc, deux projets phares de l’Agence française de développement (AFD) sont réservés à l'adaptation climatique. Le premier est mis en œuvre depuis 2018 et est lié au développement de l'irrigation et à l'adaptation de l'agriculture aux changements climatiques dans la région du Tafilalet. Cofinancé notamment par le Fonds vert pour le climat, ce projet territorial a nécessité un budget total de 100 millions d’euros. «À la différence de projets plus classiques d'aménagements hydro-agricoles à la base d'un barrage, ce projet intègre une dimension de développement territorial très importante, avec une approche intégrant réellement les populations locales», a souligné Quentin Ballin, responsable d’équipe projet, division agriculture, développement rural et biodiversité à l’AFD.

En fait, le projet prévoit des activités d'accompagnement des agriculteurs locaux vers des pratiques agricoles plus résilientes face aux changements climatiques, notamment avec la diversification des cultures, le développement des pratiques agroécologiques, mais aussi avec des mesures d'économie de l'eau, notamment pour les nouvelles exploitations sur les terres collectives qui développent des cultures de palmiers dattiers.
«Le projet veut aussi essayer de favoriser les collaborations entre des ONG nationales et locales afin de pouvoir proposer pour un territoire, lorsqu'on a vraiment cette approche territoriale, un ensemble de mesures qui permettent à chacun de trouver des solutions à l'adaptation», précise Quentin Ballin.

70 millions d'euros pour Fès-Meknès, l'Oriental et le Souss-Massa

Le second est un projet à l'échelle nationale qui démarre cette année. Selon Ballin, il s’agit d’un projet d'appui à la nouvelle stratégie Génération Green du Maroc. Il vise à mettre en place les objectifs de la stratégie, notamment sur le volet humain au niveau national pour une partie, mais aussi de manière ciblée dans trois régions : Fès-Meknès, l'Oriental et le Souss-Massa. L’objectif est de répondre à des besoins dans des cercles qui ont été identifiés à des territoires qui ont un besoin d'investissement dans le secteur agricole, en amont et en aval de la production. «Il est aussi possible de financer, par exemple, la formation professionnelle agricole dans les territoires, de financer l'appui à l'entrepreneuriat avec notamment les nouveaux centres régionaux des jeunes entrepreneurs agricoles et également de lancer des appels à projets», précise le responsable qui a intégré la direction des opérations de l'AFD en 2018 pour instruire et suivre des projets sur ces thématiques.
Ce projet d'envergure qui mobilisera 70 millions d'euros pour ces trois régions cernera aussi les questions d'appui à l'entrepreneuriat post-création. «Il y a un certain déficit dans l'accueil post-création dans les premières années après qu’un entrepreneur ait lancé son projet. Celui-ci doit pouvoir gérer des commandes, sa trésorerie et ses crédits…», décrypte Ballin.
Il s’agit, selon le responsable de l’AFD, d’un projet assez ambitieux et multiple qui démarre pour une durée de 5 à 6 ans.

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La société d’investissements énergétiques
Le Contrat de performance énergétique : un modèle qui marche !


Bâtiments, éclairage public, industrie… les chantiers et les réalisations de la Société d’investissements énergétiques (SIE) sont là : «Nous avons engagé des programmes nationaux comme celui des mosquées vertes : 3.000 mosquées ont été mises à niveau en 5 ans et nous allons atteindre les 6.000 en 2022. La facture énergétique a été réduite en moyenne de 62 à 64%», indique Ahmed Baroudi, directeur général de la SIE. La SIE travaille également sur d’autres programmes nationaux comme l’accompagnement des écoles du Maroc à travers un programme pédagogique de manière à ce que les enfants soient sensibilisés au climat d'une manière ludique. Pour l’éclairage public la SIE a développé un modèle qui fonctionne. «Pour moi, le modèle qui marche le mieux, c'est le modèle des Contrats de performance énergétique tel qu'il a été développé et réalisé à Marrakech : une économie d'énergie de 68% dans la facture pour la municipalité et qui fait beaucoup de bien à son budget, sans oublier un taux d'éclairage de 96 ou 87%. L'ensemble des installations étant aux normes européennes», décrypte Baroudi.

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