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Sécurité alimentaire : les constats et recommandations de la commission parlementaire

La commission de travail thématique sur la sécurité alimentaire, relevant de la Chambre des conseillers, vient de publier son rapport sur la sécurité alimentaire au Maroc. Le document de 147 pages comporte notamment des conclusions et des recommandations portant sur les aspects stratégiques, le système de stockage, la gouvernance, la sécurité alimentaire, l'amélioration des indices du système sanitaire, le contrôle et les chaînes de production.

Sécurité alimentaire : les constats et recommandations de la commission parlementaire

Constituée le 13 avril 2022, la commission de travail thématique sur la sécurité alimentaire relevant de la Chambre des conseillers vient de rendre public son rapport. En tenant compte des indices relatifs aux quatre critères déterminants retenus par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (voir encadré) ainsi que des indices relatifs à l'état des produits alimentaires essentiels au Maroc (céréales, sucre, huile d'olive, viande, lait, œufs et poisson), cette commission a tiré des conclusions et formulé quelque 85 recommandations qui font office d'aboutissement final de ce rapport thématique.

Conclusions : des carences et des dysfonctionnements subsistent à plusieurs niveaux

Dans ses conclusions, la commission thématique a relevé plusieurs lacunes et dysfonctionnements. Ainsi, et en ce qui concerne le stockage stratégique, la commission a recensé des dysfonctionnements au niveau législatif et de l'organisation. Sur le plan législatif, on note des insuffisances apparentes qui caractérisent le dispositif relatif au stockage. La loi relative à la gestion des stocks de sécurité ne présente en effet pas une définition précise de la notion de stock stratégique. Celle-ci interfère avec la notion de stock de roulement pour les opérateurs. De même, ladite loi ne prévoit pas de critères spécifiant de manière précise les modalités d'organisation et de gestion des stocks. Les mesures de contrôle et de suivi qu’elle contient ne revêtent pas un caractère obligatoire et ne sont pas assorties de sanctions. Il est également fait mention dans le rapport du retard dans l'adoption du décret d'application de la loi 12-94 relative à l'Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses, lequel devra fixer les modalités de constitution d'un stock stratégique et de son approvisionnement.

Sur le plan de l'organisation, le document fait état d'un déficit manifeste en termes de capacité de stockage et de constitution de stocks stratégiques. Il évoque également la prédominance du stockage traditionnel au niveau des entrepôts, représentant 65% par rapport au stockage en silo, qui offre une meilleure qualité de stockage et offre un suivi plus simple et plus précis.
En ce qui concerne la filière céréalière, le rapport fait état de plusieurs dysfonctionnements portant notamment sur la dégradation de la qualité de la production céréalière, les conditions de stockage inadaptées, une difficulté à concilier le produit national et le produit importé. On constate également une insuffisance des mesures incitatives et des subventions consenties aux stockeurs, la faible intégration de l’industrialisation dans la chaîne de valeur et le problème d'interférence de plusieurs intermédiaires sur plusieurs marchés.

Pour ce qui est de la filière des fruits et légumes, le rapport mentionne le problème des pertes survenant après la récolte et qui touche 20 à 40% de la production. Il y a également un manque au niveau des espaces de stockage et de moyens de transport, surtout en période post-récolte. Le document cite en outre certains dysfonctionnements en lien avec le problème du morcellement incessant et accentué des exploitations agricoles, du fait des successions, et la difficulté à commercialiser la production des petites et moyennes exploitations, en raison d'une faiblesse d'organisation et d'encadrement.

Concernant les marchés de gros, le rapport fait part de dysfonctionnements en relation avec leurs équipements, du délabrement de leurs infrastructures, de la non-prise en compte des conditions d'hygiène, de santé et de sécurité. Il signale également la caducité des textes législatifs régissant ces marchés et leur inadéquation face aux évolutions économiques et sociales. S'agissant de la filière des viandes, le rapport note une faiblesse quant à l'organisation de la filière des viandes rouges, tandis que pour la filière avicole, le rapport relève la forte présence d'intermédiaires qui opèrent dans ce secteur en toute illégalité.
Pour la filière sucrière, le rapport fait état de la régression de la superficie cultivée qui est passée de 54.345 hectares en 2017 à 46.172 hectares en 2021. Régression due notamment au déficit en eau et aux conditions d'irrigation difficiles, notamment dans le périmètre de Doukkala et Tadla. Pour la filière oléicole, le rapport souligne un dysfonctionnement structurel au niveau de la production, étant donné que 98,7% des matières premières oléagineuses proviennent des marchés internationaux sous forme d'huile brute, au moment où la production locale ne contribue que pour 1,3%.

Ce que recommande la commission thématique

En conclusion de son rapport, la commission thématique sur la sécurité alimentaire formule une série de recommandations portant sur les aspects stratégiques, le système de stockage, la gouvernance, la sécurité alimentaire, l'amélioration des indices du système sanitaire, le contrôle et les chaînes de production.
Ainsi, et en ce qui concerne la dimension stratégique, la commission recommande la création d'une Institution nationale indépendante pour la souveraineté et la sécurité alimentaires, laquelle serait chargée de coordonner les stratégies nationales en la matière et d'anticiper les crises susceptibles de menacer la sécurité alimentaire.

La commission recommande également d'accélérer l'opérationnalisation du Registre social unifié pour promouvoir la réforme du système de compensation et ainsi mettre en place des mécanismes propres au ciblage des subventions.
Pour ce qui est du système de stockage, la commission recommande la mise en place d'un dispositif législatif et réglementaire pour le système de gestion et les conditions de stockage et d'approvisionnement. Elle recommande également la création d'un mécanisme de régulation et d'organisation, qui devra assurer la gestion globale du stock stratégique. S’agissant de la gouvernance, la commission recommande de favoriser la convergence entre les politiques publiques afférentes à la nutrition et aux aliments.

En matière de sécurité alimentaire, la commission appelle à la consolidation du système de stockage national des céréales et à l'adoption d'un dispositif de contrôle rigoureux et transparent du stock stratégique de blé. La commission recommande également de faire évoluer le mécanisme d'intervention pour améliorer la condition nutritionnelle des catégories vulnérables, notamment les enfants et les nourrissons. Elle recommande aussi d'appuyer, intensifier et étendre les programmes de protection sociale destinés aux couches démunies et vulnérables.

En ce qui concerne l'amélioration des indices du système sanitaire, la commission a formulé, entre autres recommandations, d’étendre la couverture universelle de soins de santé, d’investir pour que tout un chacun ait accès à l'eau potable et de mettre en œuvre des politiques visant à garantir l'accès de tous à des services de soins de santé de qualité.
La commission recommande de renforcer les contrôles sur l'utilisation des antimicrobiens par les vétérinaires, en particulier chez les animaux produisant des aliments, et de promulguer des lois visant à rationaliser l'utilisation des produits chimiques dans l'agriculture afin de garantir la sécurité et la qualité des produits alimentaires. En conclusion de son rapport, la commission a émis également une série de recommandations visant à organiser, développer et contrôler l'ensemble des filières de production.

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Critères de la FAO

Pour la réalisation de son rapport, la commission de travail thématique sur la sécurité alimentaire relevant de la Chambre des conseillers a tenu compte des indices relatifs aux quatre critères déterminants retenus par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, à savoir :
• La disponibilité alimentaire : la disponibilité d'aliments en quantité suffisante et d'une qualité appropriée.
• L’accès à la nourriture : accès de tous à des ressources adéquates (droits) leur permettant d'acquérir une nourriture adéquate et nutritive.
• L’utilisation : l'utilisation de la nourriture dans le cadre d'une diète adéquate, d'eau potable, d'assainissement et des soins de santé de façon à obtenir un état de bien-être nutritionnel qui permette de satisfaire tous les besoins physiologiques.
• La stabilité : pour parvenir à la sécurité alimentaire, une population, un ménage ou une personne doit avoir un accès permanent à une nourriture adéquate.

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