Exclusif – Homologation des véhicules : la Narsa veut privatiser la réception à titre isolé

Le Maroc veut mettre son système d’homologation des véhicules au diapason des grandes économies européennes. Ainsi, selon des informations exclusives obtenues par «Le Matin», l’Agence nationale de la sécurité routière planche actuellement sur un appel d’offres relatif à l’étude préalable pour l’externalisation de la Réception à titre isolée. Autrement dit, l’État prépare la privatisation des prestations d’homologation effectuées par l’administration publique, au travers du Centre national des essais et des homologations (CNEH) ou des Centres immatriculateurs.
«Cette étude doit identifier et analyser les aspects susceptibles de conditionner les termes du projet et l'élaboration des plans d’action et des documents (textes réglementaires, cahiers des charges métier et informatique, dossiers de consultations…) nécessaires à sa mise en œuvre», explique la Narsa au «Matin».
L’étude en question doit englober un plan d’investissement détaillé et un plan financier et opérationnel équilibré. Ces derniers devraient prendre en compte tous les facteurs et les attentes du secteur. L'étude servira également à réguler l’offre et la demande en termes de nombre de Centres de contrôle et de moyens matériels et humains exigés aux niveaux national et local, et ce sur la base de différents paramètres et agrégats géographiques et socio-économiques.

Près de 40.000 véhicules concernés par la RTI tous les ans

Notons que les projections des augmentations de ventes de véhicules neufs au Maroc à horizon 5 ou 10 ans montrent que le système en vigueur actuellement sera rapidement dépassé.
Limités aussi bien en nombre que géographiquement, les agents chargés de ce type de prestations croulent déjà sous les demandes. Selon nos informations, les RTI concernent environ 40.000 véhicules chaque année si on englobe les motos.
Selon la Narsa, il s’agit avant tout de contrecarrer le manque de plus en plus aigu de compétences et des effectifs techniques chargés de l’homologation à titre isolé des véhicules dans les services provinciaux et préfectoraux et améliorer, de ce fait, la qualité du service rendu aux citoyens et aux professionnels.
«Sans présager des résultats de l’appel d’offres, il faudra recruter et former des ingénieurs spécialisés en homologations, d'autant que le pays reconnaît 5 normes internationales (européenne, américaine, canadienne, Pays du Golfe et UNECE). Il faudra également adhérer à la base de données des homologations européennes pour simplifier le travail du futur délégataire de ce service public. Ces investissements étant importants tant financièrement qu’en temps, seul le secteur privé semble à même d’y répondre», nous explique un importateur automobile de la place.
L'externalisation de la RTI amène la question du prix de la prestation. Celui-ci augmentera-t-il ? Du côté de la Narsa, pas de réponse. Mais selon des sources bien au fait du dossier, il est fort probable qu'elle implique une hausse des tarifs.

Le premier Centre d’essai automobile d’Afrique à Oued Zem

Le Maroc dispose de pratiquement tous les atouts pour devenir un pôle mondial de l’automobile. En 2020, le groupe français UTAC et le groupe britannique Millbrook, tous deux partenaires privilégiés des acteurs de l’automobile en Europe et dans le monde, se sont renforcés dans le Royaume avec l’ouverture d’un bureau à Casablanca dédié à l’homologation. «Le Groupe a choisi d’implanter au Maroc l’une de ses activités majeures, l’homologation automobile, afin de répondre aux demandes croissantes des constructeurs mondiaux. Le bureau de Casablanca va ainsi proposer toute l’expertise et l’expérience dans le domaine de l’homologation. En effet, chaque pays dispose de réglementations différentes, de structures administratives complexes et de processus de travail spécifiques. Grâce à sa longue expérience et le suivi de la réglementation européenne et internationale, UTAC Ceram Millbrook maîtrise tout le processus d’homologation : conseil, support réglementaire, accréditation, traitement administratif et essais. Cette nouvelle implantation vient compléter le dispositif mondial du Groupe, qui comprend des sites en France, en Grande-Bretagne, aux États-Unis et en Finlande», avaient annoncé les deux partenaires en 2020.

La même année, le français UTAC et son partenaire britannique annonçaient la création à Oued Zem, à 150 km de Casablanca, d’un centre d’essai automobile incluant une piste de 4 km, des bancs d’essai, des laboratoires permettant d’accéder au sésame de l’homologation européenne. Cela correspond à la demande des constructeurs implantés au Maroc, mais aussi à celle de constructeurs internationaux voulant faire des essais discrets du côté d’Oued Zem.
Le Centre de Oued Zem, le premier du genre en Afrique, et dont l’ouverture avait été annoncée pour décembre 2021, propose plusieurs types de services pour permettre aux constructeurs et équipementiers présents sur le sol marocain d’effectuer des essais- d’endurance et de fiabilité complète sur bancs, mais aussi sur pistes et routes.
Ce nouveau site offre la possibilité de développer des véhicules grâce à des essais dynamiques, notamment sur une piste de 4 km dite «coast down», unique en Europe et en Afrique, mais aussi des bancs d’essai pour le développement des chaînes de traction thermique, hybride et électrique, des bancs à rouleaux 4x4 ou encore des essais acoustiques, en choc piéton, pour les flottes de véhicules automatisés et connectés et pour le roulage, permettant de déterminer les émissions polluantes en conditions réelles. En complément, il sera possible d’y effectuer des formations à la conduite ou d’y organiser des événements. «UTAC Ceram sera en mesure de bénéficier d’une meilleure compétitivité sur certains types de prestations et ainsi de compléter son offre. Par ailleurs, le Maroc dispose d’une proximité géographique particulière avec l’Europe, ce qui représente un atout primordial pour les acteurs internationaux. Le Groupe recrutera localement près de 100 personnes en cinq ans».
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Qu'est-ce qu'une réception à titre isolé ?

Une Réception à titre isolé (RTI) atteste de la conformité d’un véhicule aux réglementations et normes en vigueur concernant la sécurité et la protection environnementale. Il s’agit d’une homologation individuelle d’un véhicule n’étant pas réceptionné par type. Cette homologation est indispensable pour l’immatriculation du véhicule.
La RTI peut concerner aussi bien un véhicule neuf comme un véhicule d’occasion. Les cas les plus fréquents sont les véhicules importés sans homologation européenne et les véhicules modifiés. «L’homologation par type permet d’homologuer tous les véhicules du même type. Exemple : toutes les Dacia Logan ont le même type et les frais d’homologation sont payés une seule fois. La Réception à titre isolé permet d’homologuer un seul véhicule. Exemple : Ferrari, Aston Martin, les séries limitées, les grosses motos. Le coût unitaire est d'un peu plus de 1.000 DH», explique au «Matin» un concessionnaire marocain.