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L’esthétique et les couleurs sublimes dans «I was dreaming of the past» de Mahfoudi

La Galerie d’art L’Atelier 21 à Casablanca accueille, du 24 janvier au 24 février, les œuvres de l’artiste-plasticien Omar Mahfoudi. Le vernissage de ce périple, entre Spleen et Idéal, sous le titre «I was dreaming of the past», est prévu demain mardi, à partir de 18 heures.

L’esthétique et les couleurs sublimes dans «I was dreaming of the past» de Mahfoudi

Ce natif de Tanger s’est intéressé, au début de sa carrière, au portrait. Mais, par la suite, après son voyage à Paris, sa peinture s’est ouverte sur de nouvelles perspectives. Il s’est, ainsi, penché sur le paysage, en développant un langage plastique agençant réalisme et fantastique. «Les coulures donnent un aspect diaphane aux peintures et dessins de Mahfoudi et confèrent un surcroît de mystère aux scènes peintes». Selon l’écrivain Olivier Rachet, la peinture de Omar Mahfoudi se caractérise par une transparence qui rend à la fois aériens et évanescents les paysages et les personnages donnés à voir. «Devant les toiles du peintre marocain, nous sommes ainsi amenés à nous demander de quoi cet épanchement ou cette dilution serait le nom. Tout d’abord, sa fluidité, obtenue aujourd’hui par l’utilisation de l’acrylique, mais ailleurs par l’utilisation d’une encre s’évaporant aléatoirement sur le papier ou sur la toile, raccorde dans un mouvement délibérément marqué par l’indistinction, le sujet et le paysage». Ces derniers représentent souvent de simples baigneurs, dans de vastes plans d’ensemble, comme s’ils étaient d’imperceptibles atomes perdus dans l’univers.

Olivier Rachet indique que «les crépuscules qui hantent cette peinture, sublimés par des tons tout aussi bien froids que chauds, traduisent autant une aspiration contrariée vers l’infini qu’une inquiétude cosmique devant les menaces pesant sur un environnement d’autant plus sublime de beauté qu’on le sait aujourd’hui menacé de disparition». Et d’ajouter que les coulures sont omniprésentes et dessinent le plus souvent des figures spectrales et des paysages eux-mêmes fantomatiques. Ne peut-on pas voir dans ces portraits de jeunes hommes intitulés «Les fleuristes de l’Atlas», des réminiscences de voyages heureux dans le Sud marocain ?, se demande Olivier Rachet. Il poursuit qu’à la frontière indistincte entre le sujet et le paysage correspond, dans les portraits, à une indifférenciation tout aussi troublante, mais d’ordre sexuel. Sans appuyer le propos, le peintre n’hésite pas à suggérer la présence de personnages quasiment androgynes, comme s’il s’agissait d’évoquer une réversibilité des rôles entre le masculin et le féminin à laquelle il s’est souvent référé, avec une grande pudeur. Reste que cette peinture, dit-il, aux réminiscences nombreuses se caractérise aussi par une esthétique qui regarde vers l’Extrême-Orient et la peinture de paysage japonaise.

On songe souvent, devant des lavis n’hésitant pas à alterner franchement les bleus, les oranges, les verts ou les mauves, au mouvement du ukiyo-e dont l’auteur d’estampes Hokusai représente le modèle indépassable. À sa façon, Omar Mahfoudi donne forme à un monde flottant, insaisissable, soumis à un principe de métamorphose permanent. Tout fluctue, et si l’on se souvient de baignades heureuses, on ne se baigne jamais dans le même fleuve. On ne sait pas toujours que le peintre des «Trente-six vues du mont Fuji» est aussi l’inventeur du terme de manga désignant, à l’origine, «une esquisse au fil de l’eau». Quelle meilleure définition de la peinture actuelle de Mahfoudi dont l’inachèvement n’a d’égale que la dilution de couleurs plus sublimes les unes que les autres ? Le paradis est perdu à jamais, le passé ne renaîtra pas de ses cendres. Qu’à cela ne tienne, on continuera de diluer les couleurs pour atteindre qui sait, un jour, la beauté radieuse d’une aube ou d’un crépuscule.

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