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Entretien avec Hind Chaouat, artiste visuelle

L'artiste marocaine Hind Chaouat participe à l'exposition collective «Woman Life Freedom» (DFW – Femme, Vie, Liberté) organisée jusqu'au 21 janvier au Irving Arts Center au Texas, États-Unis. Cette manifestation vise à sensibiliser aux droits et libertés des femmes. Retour avec l'artiste marocaine sur sa participation à l'exposition, son installation «For Mahsa Amini» et son engagement en faveur des droits des femmes.

Entretien avec Hind Chaouat, artiste visuelle

Vous êtes la seule artiste marocaine à participer à l’exposition Woman Life Freedom DFW au Irving Arts Center au Texas. Pouvez-vous nous parler de cette expérience ?
Ma participation à ce projet est une nouvelle opportunité de véhiculer des valeurs universelles récurrentes dans ma démarche artistique où la femme est le plus souvent au cœur de mes préoccupations. Mon rôle en tant qu'artiste est de développer une démarche artistique qui interroge l'évolution ou la régression des comportements humains dans le monde d’aujourd’hui.

Qu'est-ce que vous présentez à cette exposition ?
Je présente l’installation «For Mahsa Amini», créée spécialement pour cette exposition, que je dédie à la jeune martyre iranienne décédée au nom de la liberté le 16 septembre 2022. Son «crime» a été de porter son hijab de manière inappropriée. La pertinence de l'œuvre proposée se reflète dans l'intemporalité du combat des femmes. Nous traitons encore aujourd'hui de questions qui rappellent l'époque médiévale.

Quels messages voulez-vous transmettre à travers les œuvres exposées ?

L’installation «For Mahsa Amina» se compose de la vidéo «Fawlessness»*, de la photographie «Kahina, Feminist Warrior» et une citation de Simone de Beauvoir. Ces 3 éléments dialoguent sur un mur rouge sang, qui a été spécialement peint pour accueillir l’installation. La couleur rouge symbolise le sang versé par cette jeune martyre iranienne et toutes les autres victimes qui se sont révoltées en réaction à cette tragédie. J’ai voulu élever Mahsa Amini au rang de guerrière avec la photographie «Kahina, Feminist Warrior», figure marquante du VIIe siècle et pionnière féministe. En contraste avec ce portrait, dans la vidéo «Flawlessness», une jeune femme se démaquille lentement, révélant ses blessures. «N'oubliez jamais qu'il suffira d'une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en cause. Ces droits ne peuvent jamais être tenus pour acquis. Vous devez rester vigilantes tout au long de votre vie.» La force de la citation de Simone de Beauvoir offre une perception plus pertinente et une gravité nécessaire à la compréhension de l'œuvre.

Vous participez à cette exposition à côté d'autres artistes internationaux. Comment vous voyez cet échange au niveau artistique mais aussi par rapport à la réaction du public ?
Il est important d'offrir des angles de vue de différentes régions du monde pour traiter une même thématique. Inclure des artistes internationaux dans une exposition est aujourd'hui une nécessité.
Nous sommes tous interdépendants et aspirons au fond à la même chose dans l'absolu. L'Iran doit être relié au reste du monde et il est de notre responsabilité, en tant qu'artiste, de dénoncer l'instrumentalisation d'une religion qui à la base prône l'amour, le respect, la tolérance et la liberté.
Le public américain, marqué par les actes de terrorisme du 11 septembre 2001, a eu pour conséquence une stigmatisation du monde musulman. Le dispositif artistique que j'ai mis en place pour participer à cet événement me permet de contribuer à mon échelle, à stopper, ou du moins à réduire le développement de stéréotypes négatifs.

Comment à travers votre métier revendiquez-vous votre statut de femme ?
La femme a toujours été au cœur de mes préoccupations artistiques. Mon rôle en tant qu’artiste est d’inciter à la réflexion, d’interroger. C’est le cas par exemple quand je retrace l'itinéraire de femmes au parcours d'exception avec «Visage du Maroc», que je conçois comme un work in progress qui a débuté en 2013.

Si vous aviez le pouvoir d’améliorer certaines choses dans la vie des femmes et les droits de l'Homme en général, que changeriez-vous ?
Je convaincrai toutes les femmes de se donner les moyens d'acquérir une autonomie financière. De s'épanouir à travers un métier qui les passionne, de transmettre à leurs enfants -si elles choisissent d'en avoir- des valeurs d'égalité et de fraternité. La France est le pays de «la Déclaration des droits de l'Homme» : Liberté, Égalité, Fraternité. Je souhaiterais vivement qu'elle soit plus qu’une déclaration mais une application pour tous les pays qui constituent notre planète. Je suis intraitable pour revendiquer l'abolition de la peine de mort.

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Biographie de l'artiste

Enfant polyglotte, Hind Chaouat, originaire de Fès, bénéficie d’un enseignement dont la pédagogie repose sur l’éducation sensorielle et kinesthésique. Lauréate d’Icart Photo du Groupe EDH à Paris, l’artiste est également titulaire d’une Maîtrise AES de l’Université des sciences sociales de Toulouse. En 2016, Hind Chaouat réalise la vidéo «Flawlessness» qui dénonce la violence à l’encontre des femmes et remporte plusieurs prix : Silver Dubai Lynx 2017/Silver Loeries Johanesbourg 2017/3 x Gold African Cristal Festival 2017/Gold Effie Awards Mena 2017 Dubai/Silver LIA 2017 Londres. C’est à partir de cette date que ses travaux sont enfin reconnus sur la scène internationale. L’artiste s’engage depuis une quinzaine d’années dans le déploiement d’une œuvre qui déstabilise les codes et les idées reçues. Aux frontières de la photographie d’art, de publicité et de mode, elle s’acharne à brouiller les pistes. Source : hindchaouat.com
 

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