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Hausse des prix : le gouvernement défend ses choix, l’opposition et les syndicats dubitatifs

La hausse des prix continue de défrayer la chronique au Maroc. Des partis de l'opposition et certains syndicats s'en prennent au gouvernement pour son «inertie» face à cette vague d'inflation qu'endurent les citoyens. L'Exécutif, lui, se veut rassurant quant à un retour à la normale dans quelques jours et rappelle qu'il a entrepris de nombreuses mesures visant notamment la Caisse de compensation, sans quoi la situation aurait pu être bien pire.

Hausse des prix : le gouvernement défend ses choix, l’opposition et les syndicats dubitatifs

La flambée des prix domine les débats politiques ces derniers temps. Alors que depuis des mois, les prix en épicerie suscitaient déjà d'intenses discussions, en raison de leur augmentation pour presque tous les produits, les récentes envolées des prix des fruits, des légumes et des viandes laissent les citoyens perplexes. Mais du côté de la classe politique, c’est une occasion pour marquer des points, que l’on soit dans la majorité ou dans l’opposition. Si la première s’emploie à se montrer à l’écoute des doléances des citoyens en prenant des mesures plus ou moins efficaces (du moins à cours terme), la deuxième, par opportunisme ou par volonté sincère de défendre les couches les plus vulnérables, n’hésite pas à dénigrer les efforts du gouvernement.

Le gouvernement s'engage à stabiliser les prix à l'approche du Ramadan

Lors du Conseil du gouvernement tenu le 9 février, le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, a incité les ministres à mobiliser l’ensemble des services relevant de leurs départements à l'effet de «renforcer le contrôle du marché national, de garantir son approvisionnement régulier en denrées alimentaires, de lutter contre la spéculation et de protéger le panier de la famille marocaine, alors que nous sommes à l’approche du mois du Ramadan».

Le même jour, une réunion interministérielle de haut niveau de veille et de suivi de l’approvisionnement des marchés et des prix s’est tenue au siège du ministère de l’Intérieur pour discuter des moyens les mieux à même de ramener les prix à leurs niveaux habituels, notamment à l’approche du mois du Ramadan. Réunion à l’issue de laquelle il a été décidé de renforcer la mobilisation de tous les services de l’Exécutif au niveaux central et local afin mieux contrôler les marchés, assurer leur approvisionnent normal et combattre les pratiques malhonnêtes, d’autant que le mois sacré connaît d’ordinaire des pics de consommation. Cette réunion a été marquée par ailleurs par l'activation d’une commission interministérielle de haut niveau chargée de la veille qui assurera jusqu’à la fin du mois du Ramadan le suivi de l’état d’approvisionnement des marchés nationaux et des prix des denrées de base, le traitement des problématiques, ainsi que l’encadrement et le renforcement des administrations et instances compétentes.

Contrôles des points de vente au détail : quelle est leur pertinence ?

Suite à cette réunion interministérielle de haut niveau, les commissions mixtes locales ont été mobilisées pour contrôler les prix et la qualité des produits proposés à la vente. Mais bien des observateurs se sont interrogés sur la pertinence de ces contrôles au niveau des détaillants. Selon eux, c'est au niveau des marchés de gros et des réseaux d'intermédiaires et de spéculateurs qu'il faut intervenir, car ce sont précisément ceux-là qui font grimper les prix.
Interpellé à ce sujet lors du point de presse qu’il a tenu le 16 février, le ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha Baïtas, a défendu ces opérations de contrôle précisant que 45.384 points de production, de stockage et de vente des produits ont été contrôlés par ces commissions mixtes locales depuis le début de l’année, contrôles ayant donné lieu à 2.475 infractions concernant aussi bien la qualité que les prix, et à la transmission de 2.110 dossiers aux procureurs du Roi. Le responsable gouvernemental a également fait savoir que le travail accompli par les commissions mixtes durant cette période a permis de saisir 192 tonnes de produits alimentaires stockés de façon illicite et a révélé aussi l’existence d’entrepôt de stockage illicite dans plusieurs villes du Royaume.

Les dotations de la Caisse de compensation passent de 16 à 32 milliards de dirhams en 2022

Face aux critiques selon lesquelles le gouvernement n'agit pas pour soutenir le pouvoir d'achat des citoyens, bon nombre de responsables gouvernementaux évoquent notamment l'effort budgétaire destiné à la Caisse de compensation, dont les dotations initiales ont doublé en 2022. Aussi, le gouvernement évoque le soutien accordé à l’Office nationale de l’électricité et de l’eau potable (ONEE) à hauteur de 5 milliards de dirhams pour maintenir le prix de l’électricité inchangé et les aides directes accordées aux transporteurs. «Imaginez ce qu'aurait été la situation sans ces mesures», fait remarquer le député istiqlalien Abdelmajid Fassi Fihri, lors de son passage à l'émission «L’info en Face».

Mesures sans impact sur le pouvoir d'achat des citoyens, selon l'opposition

Pour les partis de l'opposition, ces mesures prises par le gouvernement restent sans impact sur le pouvoir d'achat des citoyens. Par exemple, pour la hausse vertigineuse des prix des carburants, le gouvernement reste passif. Pire encore, il profite de la manne générée par la TVA et la TIC qui entrent dans la composition de ces prix. «Le gouvernement peut suspendre la TVA pour une période donnée, comme cela a été fait pour les bovins domestiques. Il existe des solutions. Toutefois, le gouvernement a besoin de ces rentrées, puisque la hausse des prix s'accompagne d'une majoration des recettes», souligne le président du groupe parlementaire du Mouvement populaire, Driss Sentissi. De même, le président du groupe du Parti du progrès et du socialisme, Rachid Hamouni, est d’avis que l’aide accordée aux transporteurs ne sert à rien et qu’elle pourrait être injectée directement dans la Caisse de compensation sur une période définie pour toucher directement les citoyens.

Contrôler plutôt les marchés de gros

Pour sa part, le président du groupement justice et développement à la Chambre des représentants, Abdellah Bouanou, et plus précisément en ce qui concerne les prix des carburants à la pompe, a déclaré qu'avec le prix actuel du baril sur le marché de Rotterdam, les prix au Maroc devraient être plus bas. « Sans parler des pétroliers qui attendent dans les eaux internationales que les prix baissent pour venir vider leurs chargements », a-t-il encore déclaré. « Je ne vais pas parler de cela. Discutons simplement de ce que le Conseil de la concurrence a dit à propos de l’instauration d’une taxe exceptionnelle sur les surprofits des sociétés d'importation, de stockage et de distribution du gasoil et de l’essence. Le gouvernement a refusé d’instaurer cette taxe », fait remarquer M. Bouanou. « Je n'ai aucun problème à contrôler l'épicier, le détaillant en fruits et légumes et le boucher. Il est également bon de restructurer les marchés de gros. Mais l'idéal c'est de commencer par le haut et de se débarrasser des monopoles et de la rente », a-t-il martelé.

Que disent les syndicats ?

Du côté des syndicats les plus représentatifs, la Confédération démocratique du travail (CDT) a appelé ses affiliés à organiser des manifestations dans les différentes provinces du Royaume le dimanche 19 février, une grève générale dans la fonction publique et une marche nationale, mais sans que la date soit encore fixée. Dans un communiqué, la CDT déplore «la hausse sans précédent des prix, la dégradation du pouvoir d'achat des citoyens, leur appauvrissement, l'aggravation des disparités sociales et spatiales suite à une succession de crises». La centrale dénonce, dans son communiqué, «la tendance du gouvernement à persister dans les mêmes politiques adoptées depuis des décennies ainsi que son alignement sur les intérêts du capitalisme rentier et sa volonté de servir ses intérêts», alors qu'il adopte, d’un autre côté, des mesures d'austérité en ce qui concerne les volets sociaux. La CDT, dans une autre communiqué publié à la suite de l'interdiction par les autorités locales de ses manifestations dans plusieurs villes, a aussi mis en garde le gouvernement et l'a tenu entièrement responsable de ce qui pourrait résulter de la situation sociale empreinte de tensions, selon elle.
 

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