Ce sont les Gitans, dont l'histoire est unique et étrange, où la légende enrobe et pénètre la réalité, une histoire volatile qui semble effleurer la terre, d'un peuple ivre de tourner autant qu'elle, comme un derviche tourneur dont le tourbillonnement rapproche du ciel. Car dans toutes les régions du monde où il se sent partout chez lui, le Gitan peut converser avec les étoiles. Chez le Gitan, toute la richesse est en la force de son être, vibrant de passions, de souffrance, et aussi de joie de vivre...
Toute cette histoire habite l'art du flamenco, expression intense de cet être qui se veut universel, cri d'amour pour l'humanité. Expression caractérisée par sa puissance, sa sensualité et sa mystique, qui, atteignant les cimes de l'esthétisme, recèle un humanisme profond. C'est un de ces fabuleux spectacles que nous a offert cette semaine l'Institut Cervantes au Complexe Moulay Rachid de Casablanca, avec la troupe des illustres artistes de flamenco de renommée internationale, la chanteuse Carmen Linares et le danseur Antonio el Pipa.
Ce dernier, appartenant à l'une des dynasties «flamenco» les plus importantes de l'Espagne, originaire de la ville emblématique de cet art, Jerez de la Frontera, est actuellement considéré comme «l'héritier de la pure et authentique danse gitane, se révélant, pour aussi ingénue et exclusive qu'elle puisse paraître, un véritable spectacle d'avant-garde», souligne l'Institut Cervantes. Il a fait partie des plus prestigieuses compagnies, s'est produit dans les plus grands théâtres du monde, a notamment partagé la scène avec l'illustre ténor José Careras... Quant à Carmen Linares, elle est bardée de grands prix artistiques inter110naux auxquels un autre est venu s'ajouter cette semaine même : Prix 110nal de Musique catégorie Interprétation, accordé par le Ministère espagnol de la Culture, à travers l'Institut 110nal des Ars Scéniques et de la Musique. Carmen Linares est également sollicitée par les plus grands théâtres et festivals du monde. Sa voix «pleine d'accent et de musicalité unie à un style très personnel, lui a permis de montrer les inépuisables possibilités de l'art flamenco. (...) dotée d'une profonde connaissance et d'un vaste répertoire, elle a débouché sur un art enrichissant capable de combiner le chant hondo, avec des groupes de chambres et des orchestres symphoniques. (...). Ses derniers récitals (...) ont été qualifiés par la critique comme anthologiques»...
Sur la scène du Complexe Moulay Rachid, le rideau s'est ouvert sur un ensemble dont «l'orchestre» n'est composé que d'un guitariste, avec un jeune homme et une jeune femme «claqueurs des mains», devant accompagner cette chanteuse charismatique à l'attitude princière, à la voix rauque, chaude, émouvante. Dans le chant gitan la voix rauque est la plus prisée et la plus noble. Le chant est ardent, parfois lancinant et déchirant, émaillé de «coplas» (homologues des «Mawawil» arabes) graves et imposants, entrecoupés de solos ou «taqsims» de guitare exquis, aux mains de l'extraordinaire guitariste Paco Cortes. Carmen Linares chante tantôt l'amour et la gaieté (Tangos et Alegrita), tantôt le travail à la mine, sa douleur et son injustice (Tarantas et Martinete), tantôt la grande chanson flamenco issue de «la séguiriya» castillane, chant de fête qui, transposé en flamenco devient un chant de solitude et d'amour contrarié.
Puissance, mystère et sensualité
Le chant est impénétrable, donne l'impression qu'il ne peut être interprété que par le Gitan, inaccessible aux autres. Si bien que certaines notes peuvent paraître «fausses» à l'oreille inaccoutumée, lorsqu'elles traduisent le déchirement extrême et l'amertume, ou lorsque le chant prend sa propre liberté sauvage par rapport à la musique. A ce propos il faut indiquer que contrairement à tous les autres membres de la troupe qui s'est produite au complexe Moulay Rachid, Carmen Linares qui est devenue la plus grande chanteuse de Flamenco n'est pas d'origine Gitane. En fait, chaque chanteur s'inspire des interprétations particulières des grands noms du chant Flamenco qui représentent en quelque sorte des écoles.
Le deuxième acte de la soirée consacre la danse sur chant flamenco. Lorsqu'elle atteint les plus hautes cimes de la beauté, expression souveraine, la danse fait fusionner l'artiste et l'oeuvre pour exalter la splendeur de la création divine qu'est le corps humain, qui devient écriture somptueuse des émotions et sentiments les plus passionnés de l'Homme et qui s'adresse à ce qu'il y a de plus noble en lui. Le Flamenco est à même de porter à son paroxysme cette force d'expression. Et si dans le mot «flamenco» on peut lire «flamme», il n'est pas abusé de dire que c'est une danse de feu. Antonio El Pipa s'empare de la scène en y entrant de son pas de velours élégant et provoquant, fier et altier, viril, félin. Son corps s'embrasera aux ruissellement des premières notes de guitare. Premières couronnes de bras, premières cambrures du dos... Et la fougue impériale qui marque le regard du danseur déchaînera son corps élancé avec une liberté dont la suprématie se mesure à sa maîtrise, son aisance, son talent. Les pirouettes les plus effrénées et les «zapateados» (frappements de pieds typiques de la danse gitano-espagnole) les plus endiablés sont impétueusement tranchés par des mouvements incisifs d'une grâce olympienne, qui métallisent le silence fugitif entre deux temps. Puis, surprise de la soirée, une magnifique danseuse, altière, gagne la scène. Maria José Franco danse en solo avec une sublime féminité tout aussi imprégnée de force et de puissance, exprimant une nature hautaine et farouche, torride et indépendante. Le ravissement est à son comble lorsque ces deux jeunes danseurs d'un talent et d'une beauté extraordinaires se rencontrent en duo sur la scène. Sensualité suprême enveloppée de majesté, jeu ultime de séduction et de pouvoir. La suite de la soirée offrira encore au public le plaisir d'écouter l'épatante chanteuse et danseuse à la voix alto colossale, Juana la del Pipa, cousine de Antonio el Pipa. Une soirée sublime qu'il ne fallait pas du tout manquer...
Des origines hindoues,
un exode infini
Le flamenco fascine au plus haut point, par sa beauté, par toute cette puissance, cette magie et cette sensualité majestueuse qu'il détient. Chant pour l'humanité, il chante l'âme gitane qui fascine tout autant. Afin de présenter le spectacle flamenco, l'Institut Cervantes a fait venir pour une conférence le poète écrivain expert en flamenco, Pr José Maria Velasquez-Gaztelu. Coscénariste, producteur discographique des meilleurs enregistrements sur le monde du flamenco, conférencier en Orient et en Occident, Pr Vélasquez-Gaztelu a tran114é le flamenco dans le monde entier et a reçu le Prix 110nal de Flamenco en 1972, 1979 et 1977. Cette conférence à Casablanca est celle qu'il a prononcée récemment à l'Université Al Azhar du Caire. Certes, comme il l'annonce, sur l'histoire gitane plane encore une grande part d'inconnu et de doutes. Mais les spécialistes s'accordent à reconnaître les origines premières hindoues des Gitans.
Le principal point de départ géographique des premiers groupes fut le Punjab, au Nord oriental de l'Inde. Par ailleurs, l'on décèle plusieurs types d'affinités entre les habitants de cette région hindoue et le monde gitan : au niveau linguistique (la langue romane parlée par les Gitans comporte des similitudes avec celle usitée dans cette partie de l'Inde), au niveau de certaines activités comme le travail des minéraux, l'orfèvrerie, la sorcellerie et la voyance, les arts du cirque, au niveau des genres musicaux, du mode de vie, sur le plan physiologique et par rapport à cette vocation commune pour le nomadisme. Pr Velasquez-Gaztelu développa la question de l'exode perpétuel de différents groupes gitans, qui connut une grande expansion en diverses époques et travers le monde entier. On dit que le roi Mohammed El Ghazi l'Afghan aurait envahi le Punjab 7 fois entre l'an 1000 et 1026 en y assujettissant des milliers d'indigènes à l'esclavage, qui progressivement sont devenus nomades et Gitans. Plusieurs vagues sorties de l'Inde ont traversé le Pakistan, l'Afghanistan , l'Arménie et le Caucase pour atteindre la Russie, pendant que d'autres ont empunté les rives du Tigre et de l'Euphrate, et d'autres ont gagné la Syrie, une grande vague la Turquie, et l'émigration s'est suivie vers la Grèce, les Balkans, avant d'arriver en Europe Centrale, étape décisive dans l'histoire gitane.
Errants, travailleurs saisonniers, transhumant sans cesse à cheval en caravane et à pied, en guenilles et vielles semelles, bravant l'inconnu et l'hostilité de différentes civilisations, ils ont cultivé un comportement spécifique pour investir leur environnement changeant, pénétrer diverses contrées, ouvrir leurs passages. Ils s'ingéniaient à étonner les autres, à les séduire par leurs chants et danses, par leur magie,... Ils ont eu recours au mensonge, à la divi110n, à la comédie, au déguisement, attirant l'admiration ou la compassion des peuples qu'ils croisaient. Ils invoquaient leur recherche de la miséricorde pour leur peuple repenti. Peu à peu leur condition s'améliora, ils prirent des noms et surnoms de rois et de princes, des habits de luxe, des titres de propriété, des attestations de passage, des lettres de soutien du Pape. Ils s'introduisirent dans les hautes sphères sociales jusqu'aux palais européens... Mais leurs masques finissaient par tomber et l'on se lançait à leur poursuite ou à leur persécution.
Le «tarab»
et la «baraka»
d'Al Andalus
Le conférencier traitera ensuite de l'installation des Gitans en Andalousie. Leur arrivée en Espagne, dit-il, entre 1425 et 1447 constitue pour eux un événement majeur. Ils se sont regroupés en Adalousie qui est devenu leur territoire de prédilection, une sorte de terre promise. Ils se sont trouvés dans leur élément. Al Andalus est un carrefour de civilisations, et tant dans l'histoire de l'humanité savante qu'artistique, un réceptacle fécond et déterminant. Et son faste est de faire du métissé le racé... La culture gitane y a nourri sa force et sa fougue, y a trouvé une finesse poétique, musicale et gestuelle qu'elle a su assimiler, et dont elle est devenue porteuse.
Pr Velazquez-Gaztelu explique comment la rencontre de la culture tzigane avec les chants et danses arabes a été déterminante dans l'émergence de l'art du flamenco, même si ce dernier résulte d'une évolution plus ancienne qui a recueilli avec le temps de nombreux métissages. Il retraçera l'histoire de Zeriab et de la musique arabe andalouse en éclairant son influence sur l'art gitan. Il met aussi l'accent sur le fait que du temps du règne des Arabes en Espagne, les Gitans vivaient dans la paix et la tolérance, mais qu'après la Reconquista ils ont du pâtir de persécustions, de punitions injustes de tortures de la part des rois catholiques, et ce jusqu'au XVIII ème siècle. Tout cela s'exprime également dans le chant flamenco. Il relèvera la magnificence toute particulière le l'art du flamenco, sa puissance expressive incomparable qui ébranle les plus profondes émotions humaines, que l'on pourrait qualifier, comme pour la musique andalouse, de «tarab» privilégié par une sorte de «baraka».
Toute cette histoire habite l'art du flamenco, expression intense de cet être qui se veut universel, cri d'amour pour l'humanité. Expression caractérisée par sa puissance, sa sensualité et sa mystique, qui, atteignant les cimes de l'esthétisme, recèle un humanisme profond. C'est un de ces fabuleux spectacles que nous a offert cette semaine l'Institut Cervantes au Complexe Moulay Rachid de Casablanca, avec la troupe des illustres artistes de flamenco de renommée internationale, la chanteuse Carmen Linares et le danseur Antonio el Pipa.
Ce dernier, appartenant à l'une des dynasties «flamenco» les plus importantes de l'Espagne, originaire de la ville emblématique de cet art, Jerez de la Frontera, est actuellement considéré comme «l'héritier de la pure et authentique danse gitane, se révélant, pour aussi ingénue et exclusive qu'elle puisse paraître, un véritable spectacle d'avant-garde», souligne l'Institut Cervantes. Il a fait partie des plus prestigieuses compagnies, s'est produit dans les plus grands théâtres du monde, a notamment partagé la scène avec l'illustre ténor José Careras... Quant à Carmen Linares, elle est bardée de grands prix artistiques inter110naux auxquels un autre est venu s'ajouter cette semaine même : Prix 110nal de Musique catégorie Interprétation, accordé par le Ministère espagnol de la Culture, à travers l'Institut 110nal des Ars Scéniques et de la Musique. Carmen Linares est également sollicitée par les plus grands théâtres et festivals du monde. Sa voix «pleine d'accent et de musicalité unie à un style très personnel, lui a permis de montrer les inépuisables possibilités de l'art flamenco. (...) dotée d'une profonde connaissance et d'un vaste répertoire, elle a débouché sur un art enrichissant capable de combiner le chant hondo, avec des groupes de chambres et des orchestres symphoniques. (...). Ses derniers récitals (...) ont été qualifiés par la critique comme anthologiques»...
Sur la scène du Complexe Moulay Rachid, le rideau s'est ouvert sur un ensemble dont «l'orchestre» n'est composé que d'un guitariste, avec un jeune homme et une jeune femme «claqueurs des mains», devant accompagner cette chanteuse charismatique à l'attitude princière, à la voix rauque, chaude, émouvante. Dans le chant gitan la voix rauque est la plus prisée et la plus noble. Le chant est ardent, parfois lancinant et déchirant, émaillé de «coplas» (homologues des «Mawawil» arabes) graves et imposants, entrecoupés de solos ou «taqsims» de guitare exquis, aux mains de l'extraordinaire guitariste Paco Cortes. Carmen Linares chante tantôt l'amour et la gaieté (Tangos et Alegrita), tantôt le travail à la mine, sa douleur et son injustice (Tarantas et Martinete), tantôt la grande chanson flamenco issue de «la séguiriya» castillane, chant de fête qui, transposé en flamenco devient un chant de solitude et d'amour contrarié.
Puissance, mystère et sensualité
Le chant est impénétrable, donne l'impression qu'il ne peut être interprété que par le Gitan, inaccessible aux autres. Si bien que certaines notes peuvent paraître «fausses» à l'oreille inaccoutumée, lorsqu'elles traduisent le déchirement extrême et l'amertume, ou lorsque le chant prend sa propre liberté sauvage par rapport à la musique. A ce propos il faut indiquer que contrairement à tous les autres membres de la troupe qui s'est produite au complexe Moulay Rachid, Carmen Linares qui est devenue la plus grande chanteuse de Flamenco n'est pas d'origine Gitane. En fait, chaque chanteur s'inspire des interprétations particulières des grands noms du chant Flamenco qui représentent en quelque sorte des écoles.
Le deuxième acte de la soirée consacre la danse sur chant flamenco. Lorsqu'elle atteint les plus hautes cimes de la beauté, expression souveraine, la danse fait fusionner l'artiste et l'oeuvre pour exalter la splendeur de la création divine qu'est le corps humain, qui devient écriture somptueuse des émotions et sentiments les plus passionnés de l'Homme et qui s'adresse à ce qu'il y a de plus noble en lui. Le Flamenco est à même de porter à son paroxysme cette force d'expression. Et si dans le mot «flamenco» on peut lire «flamme», il n'est pas abusé de dire que c'est une danse de feu. Antonio El Pipa s'empare de la scène en y entrant de son pas de velours élégant et provoquant, fier et altier, viril, félin. Son corps s'embrasera aux ruissellement des premières notes de guitare. Premières couronnes de bras, premières cambrures du dos... Et la fougue impériale qui marque le regard du danseur déchaînera son corps élancé avec une liberté dont la suprématie se mesure à sa maîtrise, son aisance, son talent. Les pirouettes les plus effrénées et les «zapateados» (frappements de pieds typiques de la danse gitano-espagnole) les plus endiablés sont impétueusement tranchés par des mouvements incisifs d'une grâce olympienne, qui métallisent le silence fugitif entre deux temps. Puis, surprise de la soirée, une magnifique danseuse, altière, gagne la scène. Maria José Franco danse en solo avec une sublime féminité tout aussi imprégnée de force et de puissance, exprimant une nature hautaine et farouche, torride et indépendante. Le ravissement est à son comble lorsque ces deux jeunes danseurs d'un talent et d'une beauté extraordinaires se rencontrent en duo sur la scène. Sensualité suprême enveloppée de majesté, jeu ultime de séduction et de pouvoir. La suite de la soirée offrira encore au public le plaisir d'écouter l'épatante chanteuse et danseuse à la voix alto colossale, Juana la del Pipa, cousine de Antonio el Pipa. Une soirée sublime qu'il ne fallait pas du tout manquer...
Des origines hindoues,
un exode infini
Le flamenco fascine au plus haut point, par sa beauté, par toute cette puissance, cette magie et cette sensualité majestueuse qu'il détient. Chant pour l'humanité, il chante l'âme gitane qui fascine tout autant. Afin de présenter le spectacle flamenco, l'Institut Cervantes a fait venir pour une conférence le poète écrivain expert en flamenco, Pr José Maria Velasquez-Gaztelu. Coscénariste, producteur discographique des meilleurs enregistrements sur le monde du flamenco, conférencier en Orient et en Occident, Pr Vélasquez-Gaztelu a tran114é le flamenco dans le monde entier et a reçu le Prix 110nal de Flamenco en 1972, 1979 et 1977. Cette conférence à Casablanca est celle qu'il a prononcée récemment à l'Université Al Azhar du Caire. Certes, comme il l'annonce, sur l'histoire gitane plane encore une grande part d'inconnu et de doutes. Mais les spécialistes s'accordent à reconnaître les origines premières hindoues des Gitans.
Le principal point de départ géographique des premiers groupes fut le Punjab, au Nord oriental de l'Inde. Par ailleurs, l'on décèle plusieurs types d'affinités entre les habitants de cette région hindoue et le monde gitan : au niveau linguistique (la langue romane parlée par les Gitans comporte des similitudes avec celle usitée dans cette partie de l'Inde), au niveau de certaines activités comme le travail des minéraux, l'orfèvrerie, la sorcellerie et la voyance, les arts du cirque, au niveau des genres musicaux, du mode de vie, sur le plan physiologique et par rapport à cette vocation commune pour le nomadisme. Pr Velasquez-Gaztelu développa la question de l'exode perpétuel de différents groupes gitans, qui connut une grande expansion en diverses époques et travers le monde entier. On dit que le roi Mohammed El Ghazi l'Afghan aurait envahi le Punjab 7 fois entre l'an 1000 et 1026 en y assujettissant des milliers d'indigènes à l'esclavage, qui progressivement sont devenus nomades et Gitans. Plusieurs vagues sorties de l'Inde ont traversé le Pakistan, l'Afghanistan , l'Arménie et le Caucase pour atteindre la Russie, pendant que d'autres ont empunté les rives du Tigre et de l'Euphrate, et d'autres ont gagné la Syrie, une grande vague la Turquie, et l'émigration s'est suivie vers la Grèce, les Balkans, avant d'arriver en Europe Centrale, étape décisive dans l'histoire gitane.
Errants, travailleurs saisonniers, transhumant sans cesse à cheval en caravane et à pied, en guenilles et vielles semelles, bravant l'inconnu et l'hostilité de différentes civilisations, ils ont cultivé un comportement spécifique pour investir leur environnement changeant, pénétrer diverses contrées, ouvrir leurs passages. Ils s'ingéniaient à étonner les autres, à les séduire par leurs chants et danses, par leur magie,... Ils ont eu recours au mensonge, à la divi110n, à la comédie, au déguisement, attirant l'admiration ou la compassion des peuples qu'ils croisaient. Ils invoquaient leur recherche de la miséricorde pour leur peuple repenti. Peu à peu leur condition s'améliora, ils prirent des noms et surnoms de rois et de princes, des habits de luxe, des titres de propriété, des attestations de passage, des lettres de soutien du Pape. Ils s'introduisirent dans les hautes sphères sociales jusqu'aux palais européens... Mais leurs masques finissaient par tomber et l'on se lançait à leur poursuite ou à leur persécution.
Le «tarab»
et la «baraka»
d'Al Andalus
Le conférencier traitera ensuite de l'installation des Gitans en Andalousie. Leur arrivée en Espagne, dit-il, entre 1425 et 1447 constitue pour eux un événement majeur. Ils se sont regroupés en Adalousie qui est devenu leur territoire de prédilection, une sorte de terre promise. Ils se sont trouvés dans leur élément. Al Andalus est un carrefour de civilisations, et tant dans l'histoire de l'humanité savante qu'artistique, un réceptacle fécond et déterminant. Et son faste est de faire du métissé le racé... La culture gitane y a nourri sa force et sa fougue, y a trouvé une finesse poétique, musicale et gestuelle qu'elle a su assimiler, et dont elle est devenue porteuse.
Pr Velazquez-Gaztelu explique comment la rencontre de la culture tzigane avec les chants et danses arabes a été déterminante dans l'émergence de l'art du flamenco, même si ce dernier résulte d'une évolution plus ancienne qui a recueilli avec le temps de nombreux métissages. Il retraçera l'histoire de Zeriab et de la musique arabe andalouse en éclairant son influence sur l'art gitan. Il met aussi l'accent sur le fait que du temps du règne des Arabes en Espagne, les Gitans vivaient dans la paix et la tolérance, mais qu'après la Reconquista ils ont du pâtir de persécustions, de punitions injustes de tortures de la part des rois catholiques, et ce jusqu'au XVIII ème siècle. Tout cela s'exprime également dans le chant flamenco. Il relèvera la magnificence toute particulière le l'art du flamenco, sa puissance expressive incomparable qui ébranle les plus profondes émotions humaines, que l'on pourrait qualifier, comme pour la musique andalouse, de «tarab» privilégié par une sorte de «baraka».
