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Film d'animation : quand les adultes s'invitent chez les petits

De plus en plus de films d'animation dans le paysage cinématographique, et cette évidence : ils ne sont pas réservés aux enfants. Malheureusement certains, très réussis, se font doubler par des grosses productions comme le dernier Walt Disney.

Film d'animation : quand les adultes s'invitent chez les petits
Trois bons films d'animation sortis mercredi dernier ont dû s'effacer cette semaine pour laisser leur place à des géants nouvellement débarqués. Princesse Mononoké, Fourmiz et Les aventures de Rocky et Bullwinkle se sont faits rapidement dégager de la programmation par La Planète au trésor et Scooby-Doo. Actualité oblige ? Scooby-doo est sorti en France il y a deux mois environ et La Planète au Trésor, la semaine dernière. Mais cet exploit en matière de réduction des délais d'arrivée des films au Maroc ne parvient pas à cacher une réalité : La Planète au Trésor et Scooby-Doo ont un public acquis d'avance alors que les trois autres faisaient salle vide.
Pour La Planète au trésor, la raison est simple : il s'agit du dernier Walt Disney, une marque, une référence. On va le voir presque par automatisme, comme pour agrandir sa collection, quasiment sûr de la qualité de ce qu'on va trouver. Le jeu consistera ensuite à comparer le dernier né avec les précédents, voire à tracer la ligne évolutive du style Disney. Et puis le dernier Disney, «on en a entendu parler», avant même sa sortie. Aussi sait-on déjà, grâce à la fée marketing, qu'il est question d'une chasse au trésor dans l'espace à bord d'un magnifique galion intergalactique. Peut-être sait-on aussi qu'il s'agit d'une nouvelle adaptation, en dessin animé cette fois, du roman de Robert Louis Stevenson L'Ile au trésor (1883). Avec un scénario et un texte de choix, on peut donc attendre de ce nouveau Disney qu'il sorte un peu des schémas de la maison. Et se demander si la transposition dans l'espace de cette histoire maritime tiendra la route. Des vents venus de France charrient de bonnes rumeurs.
Pour Scooby-Doo, il faut bien le dire, le public français qui a déjà testé, n'a pas sauté au plafond. La bande-annonce laisse imaginer un divertissement rigolo et un peu bête, à consommer sur place. Rien à voir avec la série dont le film est tiré : un dessin animé culte pour les vingt-trente ans qui n'ont pas oublié le cri de Scooooby-Dooooo. Certains ne pourront résister à la tentation de raviver des souvenirs d'enfance et de vérifier la fidélité du film. D'autres bouderont l'adaptation de peur d'être déçus. Chacun fera bien comme il veut. Reste que les jeunes générations n'en ont que faire du Scooby-Doo d'origine. Pour elles, le vrai Scooby-Doo sera le nouveau.
Les aventures de Rocky et Bullwinkle, Fourmiz et Princesse Mononoké n'ont pas eu la chance d'être précédés par de telles réputations. Et s'il faut saluer la remise à l'affiche de ces films datant de plusieurs années, on ne peut que regretter qu'ils n'aient eu qu'une semaine pour faire leurs preuves. Cela n'a d'ailleurs pas suffi. Et c'est bien dommage : par leur qualité, ils illustrent bien la diversité et la vivacité du film d'animation.
Ils comportent, en outre, plusieurs niveaux de lecture. Celui, sympathique, d'un divertissement accessible dès le plus jeune âge. L'autre, plus profond, plus dense, pouvant séduire les spectateurs plus âgés, voire même les cinéphiles.
Les aventures de Rocky et Bullwinkle, moitié-film, moitié-dessin animé, ressuscite une série de la télévision américaine des années Soixante. Ses héros : Bullwinkle, l'élan sans cervelle et Rocky, l'écureuil volant.
Comme c'était l'époque de la guerre froide, ils devaient affronter Boris et Natasha, deux espions criminels de Pottsylvanie à la solde du terrible Fearless Leader.
Leur émission a été remisée au placard des rediffusions et on les a oubliés. Mais trente-cinq ans plus tard, les trois brigands trouvent le moyen de sortir de leur monde pour pénétrer la réalité. Leur projet : zombifier le peuple américain en l'intoxiquant avec des émissions débiles. Seuls Rocky et Bullwinkle peuvent les en empêcher. Jouant sur la frontière virtuel-réel, le scénario s'enrichit d'une méchante critique de la télévision américaine et, par là même, de la société qui la vénère.
Fourmiz, autre production américaine, s'inscrit entièrement dans un monde recréé, une fourmilière, animée en images de synthèse.
Derrière la petite histoire, une revendication sociale : Z, ouvrier insignifiant, découvre qu'en pensant par lui-même, il peut échapper à sa condition et à l'angoissant système de la colonie.
Sans le savoir, il déclenche une révolte qui, loin d'entraîner la destruction de la colonie, sauve tout le monde d'une mort atroce.
Il s'en tire, de surcroît, avec la considération de la prétendue inaccessible princesse.
Le plus drôle étant peut-être que Z est un parfait antihéros, type Woody-Allen (qui lui prête sa voix dans la version originale). Il doit ce qu'il engendre non à son courage, dont il est totalement dépourvu, mais à son bon cœur et à sa matière grise.
Il y a aussi un arrière fond social dans Princesse Mononoké mais dans un univers très différent. Le dessin fait pénètrer entièrement dans le conte japonais et ses légendes anciennes, avec dieux, déesses, animaux imaginaires, magie et malédictions. C'est à l'époque très lointaine où les hommes et les bêtes se disputent la forêt. L'Esprit qui la protège, véritable splendeur utopique et graphique, est trop pacifique pour les empêcher de s'entre-tuer. Deux adolescents vont jouer les intermédiaires : le jeune Ashitaka, sorte de missionnaire contre la haine, et la princesse Mononoké, élevée parmi les loups.
Hormis les personnages qui rappellent le coup de crayon du manga, la nature et les créatures imaginaires sont d'une beauté envoûtante. Loin de tous les schémas classiques, dépaysant et onirique, Princesse Mononoké est une petite merveille de poésie.
Malheureusement, ces trois films ne sont plus à l'écran. Mais ceux qui les ont ratés pourront toujours se consoler avec les cassettes vidéos.
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