Menu
Search
Mardi 23 Décembre 2025
S'abonner
close
Mardi 23 Décembre 2025
Menu
Search

Les coptes d'Egypte

Les coptes sont les chrétiens d'Egypte. Leur nom est l'abréviation du grec Aiguptos, “Egyptien”. Dans un même héritage, les Coptes allient à un christianisme original et bien acculturé un peu de la mémoire des pharaons, beaucoup d'apports de l'Egypte hell

No Image
La foi nouvelle, le christianisme, aurait été prêchée à Alexandrie par Saint Marc, peut-être dès 43-48, mais la première figure historique vraiment connue est Démétrios, évêque d'Alexandrie de 189 à 232.
L'école chrétienne d'Alexandrie (ou Didascalée), fondée vers 180, a donné naissance à certains des plus grands auteurs de la littérature chrétienne en langue grecque. Clément d'Alexandrie qui la dirigea de 200 à 203, voulait mettre la pensée grecque au service de la foi chrétienne. Origène (185-253), dans la lignée de Philon, recourt à la lecture mystique et allégorique des Ecritures, qui apparaîtra bientôt comme le trait caractéristique de l'école d'Alexandrie, par opposition à celle d'Antioche de Syrie, plus attachée à l'exégèse littérale. Directeur de la Didascalée à partir de 231, Saint Denys d'Alexandrie (m.264), a lui aussi laissé une oeuvre théologique considérable.

La première église d'Alexandrie


Plusieurs empereurs persécutèrent les chrétiens, jusqu'à Constantin qui, en 313, décréta la liberté religieuse. Du IV e.s. au début du VII e.s., l'Egypte fait partie d'un empire romain d'Orient où le christianisme à désormais droit de cité et est même devenu la religion de l'Etat à partir de 391.
L'Eglise d'Egypte participe activement aux controversées christologiques de ce temps, et c'est dans la vallée du Nil que naît le monachisme. Mais, au lendemain du concile de Chalcédoine (451), l'Eglise copte se sépare des sièges de Rome et de Constantinople avec lesquels elle est en désaccord à propos de la double nature du Christ (à la fois Dieu et homme).
Concernant la langue copte, elle est le produit de l'évolution de l'égyptien parlé au temps des pharaons et a été transcrite au moyen d'un alphabet grec adapté. C'est Sehoute, abbé d'un monastère prés de Sohag, qui, au début du V e.s., hissa le copte à un niveau littéraire digne des autres langues de l'Orient chrétien.
En 641, les musulmans s'emparent de l'Egypte, libérant les Coptes d'une tutelle byzantine devenue intolérable. Les relations entre chrétiens et musulmans, à l'exception de crises passagères, vont être généralement bonnes. L'Eglise fit assez tôt le pari de l'acculturation dans une Egypte qui s'arabisait et s'islamisait lentement. Les chrétiens allaient participer pleinement à l'épanouissement de la culture arabo-musulmane, jusqu à abandonner finalement la langue de leurs ancêtres. Dès la fin du X e.s. apparaissent les premiers auteurs coptes écrivant en arabe, les chrétiens arabisant de plus en plus leurs noms. A partir de la fin du XII e.s., la liturgie elle-même commence à être partiellement célébrée en arabe. Aux XIII et XIV e.s. l'arabisation de la culture copte ira s'intensifiant.

La traversée du dessert


Dans le domaine des arts, les productions coptes ont brillé du IV au XIII e.s. Les architectes chrétiens ont souvent été mis à contribution dans la construction des monuments musulmans, civils et religieux. La période du VII au XIII e.s. représente la grande époque de la peinture chrétienne en Egypte. Ces traditions picturales se retrouvent dans les manuscrits enluminés. Enfin, la production des tissus coptes, célèbres, n'a pas cessé durant cette période, les chrétiens détenant même une sorte de monopole de cette activité sous les Fatimides.
Les années 1319-20 ont été marqués par de tragiques évènements. Des heurts entre musulmans et coptes au Caire se soldèrent par une répression dans tout le pays et marquèrent le commencement d'un lent déclin pour la communauté copte. Les taxes dont les chrétiens sont de plus accablés pour financer la politique militaire des Mameluks réduisent à néant toute vie culturelle. L'Eglise elle-même, empêtrée dans la simonie, sombre dans une léthargie presque totale. La situation ne s'améliore pas, loin de là, avec la conquête de l'Egypte par les Ottomans (1517).
Les savants de l'expédition d'Egypte dirigée par Napoléon, de 1798 à 1801, estimeront la population copte à 160.000 âmes. Aussi n'accordèrent-ils que peu d'attention à son passé, hormis quelques vieux monastères ou antiques tissus. Néanmoins, c'est la connaissance du copte, plus peut-être que la fameuse pierre trilingue de Rosette, qui allait permettre à Champollion de percer le secret de l'ancienne écriture hiéroglyphique (1822). Sa rédaction, en 1815, d'un dictionnaire de copte, allait être l'étape préparatoire de la découverte qui fera sa gloire.

Coptes des temps nouveaux


Si Napoléon se désintéresse des Coptes, tout autre fut l'attitude de Mohamed Ali (1805-1849). Il avait compris tout le parti qu'il pouvait tirer des Coptes dans sa volonté de se rapprocher de l'Occident, et il recourut volontiers à leurs services dans l'administration du pays.
L'histoire moderne des coptes diffère sensiblement des autres chrétiens d'Orient. Elle se caractérise par un attachement viscéral à leur pays. Les coptes se sont profondément investis dans tous les domaines de la vie de la nation égyptienne, tandis que la redécouverte de leur histoire et de leur riche patrimoine donnait naissance à une science nouvelle : la coptologie.
En 1855, le vice-roi Mohamed Said (1854-1863) abolit la gizya et fit accéder les coptes au service militaire, première étape vers un statut de pleine citoyenneté. Dès 1866, le khédive Ismail accueillait des coptes au sein du conseil consultatif qu'il instaurait. Enfin, le khédive Tewfik (1879-1892), lors de son accession au trône, proclamait l'égalité des chrétiens et des musulmans devant la loi, principe qui sera enregistré dans la loi organique de 1913 et dans la constitution de 1922. Désormais, les coptes seront continûment représentés à l'Assemblée législative égyptienne. Dans le même temps, le patriarche Cyrille IV (1854-1861), engageait la communauté copte dans un certain renouveau, l'ouvrant à la réalité œcuménique, réformant la liturgie, améliorent la formation du clergé, fondant des écoles et des imprimeries. Ce renouveau coïncide avec la redécouverte du patrimoine copte de l'Egypte que les fouilles archéologiques, dans le sillage d'une égyptologie en plein épanouissement, révélaient au grand public. La philologie copte n'était pas en reste. En 1880, paraissait la première grammaire copte vraiment scientifique. En 1929-1939, sortait des presses d'Oxford le monumental Coptic Dictionnary de Walter Crum, l'œuvre de toute une vie consacrée à l'étude et au dépouillement (240.000 fiches) des textes coptes.
Sur le plan politique, entre 1882 et 1952, les coptes jouèrent comme jamais un rôle de premier plan dans la vie de la nation égyptienne. Déjà en 1882, le patriarche Cyrille V avait soutenu la révolte d'Orabi. Les coptes s'impliquèrent à part entière dans la lutte politique pour l'indépendance, notamment au sein du parti Wafd, fondé par le musulman Saad Zaghloul.

Sauvegarder la convivialité


Cependant, à partir des années 1930, la montée en puissance des frères musulmans, compromet cette atmosphère d'unanimité nationale. Au “réveil” de l'Islam, répondent chez les coptes un regain d'identité et un dynamisme spirituel renouvelé.
Sous Nasser, quantité de chrétiens – mais aussi de musulmans – des milieux aisés et libéraux quittèrent le pays pour émigrer aux U.S.A, en Australie ou en Europe, jetant les bases d'une diaspora qui n'allait plus cesser de croître. Les années Nasser furent néanmoins une période de renouveau pour l'Eglise, surtout en raison de l'extraordinaire énergie et de la volonté de réforme du pape Cyrille VI (1959-1971). En une douzaine d'années, il réussit à restaurer et à rendre vie a la douzaine de monastères qui subsistaient. Cette résurrection du monachisme égyptien a eu d'insignes répercussions sur la vie de toute la communauté copte, car toujours en Egypte, les monastères ont entretenu un dialogue constant, une fécondation mutuelle avec la communauté laïque. La liturgie est au cœur de la vie des coptes. L'année copte est ponctuée par les fêtes et les pèlerinages aux tombeaux des saints et des martyrs ou aux lieux visités par la sainte famille.
Les recensements gouvernementaux donnent pour les coptes 6% de la population, soit environ 3,5 millions, inégalement repartis dans le pays (jusqu'a 20% dans la région d'Assiout, en Haute-Egypte, mais à peine plus de 1% dans certaines régions du Delta). L'Eglise avance un nombre plus élevé, jusqu'à 10 millions et plus.
Quel que soit leur nombre, les coptes ne peuvent être considérés comme une quantité négligeable. Ils font partie intégrante de l'identité de l'Egypte. C'est la raison pour laquelle de nombreux intellectuels coptes refusent de considérer leur communauté comme une minorité. Elle est indissociable de l'histoire et du tissu humain de l'Egypte. Coptes et Musulmans participent en fait du même écheveau serré des identités multiples qui ont forgé le profil actuel de la nation égyptienne, fait d'une sédimentation culturelle et religieuse longue de plusieurs millénaires.
Le risque est que face au modèle que veut promouvoir l'islamisme radical, ne réponde un revivalisme chrétien de plus en plus militant incarné par la hiérarchie de l'Eglise. Or, comme l'a écrit Hassanein Haikal, s'il est deux choses qui doivent rester pérennes, non négociables pour l'Egypte, ce sont : le Nil et l'unité de son tissu national.

Source : Christian Cannuyer, L'Egypte copte, Ed. Gallimard/IMA , 2000
Lisez nos e-Papers