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Les difficultés du métier d'artiste

Tout le monde connaît la vie des artistes - à quelques exceptions près - qui vivotent et qui s'accrochent à la vie comme à leurs instruments avec l'énergie du désespoir en livrant un combat à armes inégales.

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Certains vivent dans les affres de la misère, d'autres vieillissent dans le dénuement le plus complet, entrant dans l'oubli le plus abject et le plus ingrat.
D'autres meurent à petit feu en souffrant en silence et en mou.
Notre société est ingrate et peu reconnaissante à ceux-là mêmes qui ont lutté corps et âmes pour que vive l'art marocain, certains continuant à croire en leur vocation comme Ahmed Souleïman Chawki, Haj Younès, Abdallah Issami et autres professeurs qui enseignent avec dévouement et qui ont formé des générations mais qui, eux-mêmes demeurent délaissés, ne jouissant d'aucune reconnaissance. N'oublions pas aussi Houcine Toulali, mort avec une “pension” mensuelle de misère, ainsi que Chekkara et Tamsamani, ce géant, ce virtuose du piano et du luth qui a ébloui des admirateurs d'ici et de l'étranger, Fouiteh qui nous a appris à chanter l'amour et en même temps le patriotisme.
Sous le protectorat, l'artiste marocain a mobilisé les masses par des chants, du théâtre, de la littérature, ou de la peinture. Ce militantisme est un cri du cœur pour l'art et la patrie.
N'oublions donc pas ces soldats que je qualifierais d'inconnus ou de morts pour la patrie.
Nos épopées pour la Marche Verte et pour tous les événements à caractère national, sont là pour témoigner des services rendus à la patrie.
Les artistes (tous les artistes, tous les arts) qui sont logés à la même enseigne, sont considérés comme des parias que personne ne veut connaître et reconnaître, par contre quand il s'agit de ce qui vient de l'étranger, nous sommes les meilleurs fans que les nationaux des artistes concernés.
Qui est responsable de cette situation ? Tout le monde, vous et moi, les médias, la télévision, le ministère de la Culture, celui de l'Education nationale, les communes, les autorités locales, centrales, etc., mais surtout pas les artistes eux-mêmes et sûrement pas la qualité de notre art. Pourquoi ne pas rendre ses lettres de noblesse à la musique et au chant en instituant une obligation pour les écoles primaires (publiques et privées) d'enseigner ces disciplines comme cela se faisait naguère, ce qui permettrait de faire travailler davantage les professeurs en les payant. Ils doivent d'ailleurs relever de la fonction publique et non des communes qui leur versent des salaires de misère : 15 DH l'heure.
Feu Sa Majesté Hassan II avait lancé un programme ambitieux : créer une association des artistes où ils peuvent tous adhérer afin de pouvoir être à l'abri des vessicitudes de la vie.
Lors d'une récente émission de la RTM - assez rare, il faut le reconnaître - qui a traité ce sujet avec Mustapha Alaoui qui avait invité le ténor de notre théâtre, Tayeb Seddiki, l'animateur lui avait reproché, à l'instar de la comédie française, de n'avoir rien fait qui puisse aider, dans le cadre d'une sorte de syndic ou d'amicale des artistes, à défendre leurs intérêts; Seddiki avait vigoureusement réagi en arguant le fait qu'il ne fut pas mandaté pour une telle action et que les moyens sont inexistants. Or, on ne peut plus continuer à pratiquer les politiques de l'autruche, il est temps de nous réveiller tous et de rendre leur dignité à ces combattants de la culture marocaine, à ces vecteurs du rayonnement du Maroc à l'étranger.
Un premier pas est en train de se réaliser qui va dans le sens des points soulevés ci-dessus, en effet, un projet de loi est au secrétariat du gouvernement pour approbation.
Selon le nouveau texte, qui est une première dans notre pays, l'activité et la définition de l'artiste sont clairement décrits car tout le monde peut s'appeler artiste, si on ne posait pas des critères. Le deuxième mérite de cette loi est de préconiser la création d'une agence d'“intermédiation” pour les artistes.
Sous l'appellation de “ANAPEC”, cette institution aura pour lourde tâche de réorganiser et de revaloriser la profession. Il faudrait l'appeler ainsi dorénavant, de permettre à l'artiste de bénéficier d'assurance accidents de travail et de la couverture sociale. Pourquoi pas aussi de caisse de retraite soit la CMR, le RCAR ou la CIMR et aussi la CNSS. Un système de cotisation pourrait être envisagé de deux façons : part salariale, à verser par l'ANAPEC après retenue sur les salaires qu'elle paiera en envisageant un système de minima analogue à celui des marins pendant les périodes non travaillées. Le deuxième mode de financement sera effectué par un prélèvement sur tous les spectacles de deux dirhams par billet, par exemple. Mais il ne faudrait pas oublier les vétérans qui ont dépassé l'âge de 50 et 60 ans et qui ne peuvent plus cotiser, en instituant un système de dérogation. Mais l'ANAPEC ne doit pas dériver et se transformer à l'instar d'autres offices, en boîte à recrutement de masse qui portent en eux le mal qui les tuera : le pléthore des effectifs où les administratifs dépassent les opérationnels.
Les économistes américains établissent un rapport de 10 % : pour une entreprise de 100 opérationnels, son effectif d'administratifs sera de 10.
En nous penchant sur les problèmes des artistes, en essayant de les résoudre, nous rendrions justice aux concernés et à notre pays qui doit briller au sein des nations par ses productions culturelles et occuper la place qu'il se doit d'avoir.
Je n'ai pas cité tous les artistes du Maroc - qu'ils m'excusent - mais je suis persuadé qu'ils ont tous le même degré de mérite et ils ont tout droit à notre reconnaissance ne serait-ce que morale.
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