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Tunis : Nass El Ghiwane et Jil Jilala chantent en duo

Les groupes Nass El Ghiwane et Jil Jilala ont chanté, vendredi soir, en duo à Tunis dans le cadre du 38e festival international de Carthage.
Les deux groupes ont rivalisé de virtuosité et leurs chansons et paroles, puisées dans le patrimoine culture

Tunis : Nass El Ghiwane et Jil Jilala chantent en duo
Nass El Ghiwane et Jil Jilala qui ont chanté l'amour, la vie, ses souffrances et ses joies ont démontré, avec brio, que ce genre de répertoire n'a pas pris une seule ride. La chanson ”Sabra et Chatila” qui reste d'actualité, a été reprise par l'assistance non sans émotion. Elle a rappelé les atrocités et le massacre de Jenine perpétrés par le gouvernement de Sharon: liquidation physique des cadres et civils palestiniens, destruction des maisons etc. Faisant ainsi fi des conventions internationales et des résolutions des Nations Unies.

Le public n'a senti ni digression, redondance ou monotonie dans les chansons du duo qui a fait impression.

En annonçant ce spectacle mémorable, le quotidien tunisien “Le Renouveau” a souligné que cette soirée, placée sous le signe de la nostalgie, réunit deux expériences qui ont fortement marqué l'histoire récente de la musique marocaine: au cours des années 70 et 80, elles étaient incontestablement les plus écoutées au Maroc et probablement dans le monde arabe. Il a ajouté que ces deux expériences ont plus d'un point commun: les sources, la musique gnawa, le rythme et le verbe.

Dans une déclaration à l'agence MAP, Rachid Batma (Nass El Ghiwane) et Abdelkrim Al Kasabji (Jil Jilala) ont estimé que l'idée de chanter en duo a porté ses fruits car les deux groupes ont des affinités tels des atomes crochus.

Pour Rachid Batma, le succès d'une chanson est tributaire du support des médias et de la capacité des artistes d'innover sans verser dans l'uniformité en vue d'assurer la relève. Nous sommes des artistes et non des stars qui chantent les problèmes de l'homme, a-t-il dit, ajoutant que la chanson commerciale tue l'art.

Selon Abdelkrim Al Kasabji, le rythme et les paroles jouent un rôle important dans la communication avec le public, se félicitant du succès de cette soirée au cours de laquelle les deux groupes ont bien accordé leurs violons.

Ces deux groupes ont marqué l'histoire de la musique marocaine. Ils représentent, en fait, un certain renouveau de la chanson à une époque où celle-ci connaissait une certaine récession. En effet, les années 70 ont vu l'émergence un nouveau genre où vont briller Nass El Ghiwane, Jil Jilala et sur leurs traces LemChaheb, les frères Bouchenak et bien d'autres groupes qui ont trouvé dans la chanson ghiwanie un moyen d'expression à la fois inédit et très proche du public. Le groupe Nass El Ghiwane a été créé à Casablanca en 1970. Il se composait de cinq jeunes issus du quartier Hay Mohammedi à Casablanca.

Leur idée était simple : il fallait revisiter le patrimoine pour créer des textes portant sur des questions de société. Il fallait écrire des textes engagés. Groupe novateur, ils ont su respecter les traditions musicales sur fond de paroles engagées. Leur musique est la synthèse de tous les rythmes du pays : aissawa, berbère de l'Atlas et surtout gnaoua. Ils ont réuni des instruments d'origine différente en faisant se côtoyer le guembri gnawi avec le bendir (grand tambourin) des chanteurs populaires par exemple. Leurs mélodies puisaient aussi bien dans le Malhun que dans les chants gnaouas.

Symbolisant le renouveau de la musique marocaine contemporaine, ils vont rencontrer tout de suite un succès immédiat.

Mais dans la décennie 80, on a assisté à l'enlisement progressif de la chanson marocaine façon Nass El Ghiwane. Après une volonté sincère de rénovation musicale, elle s'est répétée, alors que les nouveaux groupes censés dynamiser le paysage musical sont largement en deçà de leurs aînés du début des années 70.

Après quelques décennies, le groupe existe encore pourtant que de crises ont jalonné son parcours ! L'une des chansons tire augure de cette situation («Daqqa tab'â daqqa…», (Coup après coup…) et à trois reprises au moins le groupe a été menacé de dislocation : d'abord à la mort de Boujemaâ (dit Boujmiî) le 26 octobre 1974; ensuite pendant la maladie et la mort de Batma en 1997 et enfin après le départ fracassant de Abderrahman Kirouj la même année.

Des premiers Nass El Ghiwane restent les deux vétérans Omar Sayed et Allal Yaâla : Omar le modérateur a acquis suffisamment d'expérience pour sauver le groupe et le remettre à chaque fois sur les rails ; Allal est la force tranquille qui cache un caractère difficile, il est pourtant le musicien averti qui n'hésite pas, quand il le faut, à participer à une joute rythmique; Rachid Batma (le frère de Larbi) a prouvé qu'il n'est pas ici par complaisance mais à cause d'un formidable sens du rythme et pour des qualités vocales certaines ; Rédouane, la dernière recrue, a certes appris à domestiquer le hajhouj, mais il a encore sur les épaules la pesanteur de l'image laissée par Abderrahman Paco.

Il est vrai que le groupe se renouvelle autour de Omar et Allal, en tentant une recherche des rythmes et des textes, mais tout le monde est conscient que les choix sont limités car il existe une sonorité Nass El Ghiwane telle une empreinte spécifique mais aussi réductrice.

Toute la question est alors de savoir comment se rénover sans la trahir ?
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