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"Dragon rouge" de Brett Ratner : Hannibal en série

Retour de Hannibal le Cannibal après Le Silence des Agneaux et Hannibal. Egalement adapté d'un roman éponyme de Thomas Harris, Dragon rouge flirte avec l'horreur au détriment du suspens et de bons ressort dramatiques.

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La loi des séries touche même les tueurs. Non contents de tuer en série, ils deviennent héros de séries. Hannibal Lecter, le terrible docteur cannibal du Silence des Agneaux, héros du film éponyme Hannibal, revient dans Dragon rouge. Un troisième épisode que l'écrivain Thomas Harris (dont ces films sont tirés) situe en réalité avant les deux autres. Avant son aventure avec l'agent Clarice Starling (Jodie Foster), le docteur Lecter (Anthony Hopkins) a été mis sous les verrous par Will Graham (Edward Norton), autre limier du FBI. Leur affrontement s'est achevé dans un bain de sang. Glorifié pour avoir démasquer ce psychiatre qui dégustait des organes humains préparés façon gourmet, Graham s'est retiré en Floride, loin de toutes ces horreurs. Mais il possède une certaine faculté : pouvoir se mettre émotionnellement à la place d'un tueur et retracer mentalement ses gestes. Ce qui le rend précieux aux yeux du FBI et estimable à ceux du prisonnier Lecter. Nouvelle idée de génie du bureau fédéral : associer un criminel brillant (dans sa discipline) et un agent hors pair pour un duo de profilers de choc. Malgré la peur qu'il lui inspire, Graham a besoin du docteur : un nouveau cinglé décime des familles entières pour se transformer en dragon rouge, fantasmagorie tirée d'une aquarelle baroque de William Blake.
La valeur d'un thriller, ce qui excite le supens et les neurones, repose en grande partie sur la mythologie qu'il met en oeuvre et la densité psychologique des personnages. Dragon rouge brasse cette matière mais néglige son énigme et la recouvre d'une laque superflue visant à provoquer le dégoût du spectateur. Stimuli horrifique : de la viande d'homme dans l'assiette, des bouts de verre enfoncés dans les yeux des victimes... l'horreur plutôt que la peur. Sans compter qu'on la fabrique plus qu'on ne la suscite avec une suite de scènes gratuitement crispantes, histoire de maintenir le climat.
Déroulé classique voire poncif, Dragon Rouge a quand même osé un chemin parallèle en suivant l'assassin. Un enfant martyre dans un corps de légionnaire. Un fou qu'une douce aveugle réussi à aimer. Ralph Fiennes et Emily Watson nous jouent avec brio une romance de cauchemar. Ne «voyant» pas la menace, elle aime un dérangé qui ne se résoud pas à la tuer. Des relents de Hitchock à la Psychose... Cettre broderie est le meilleur ressort du film. Les autres sont baclés. Confère l'adage de départ : «l'effroi est le prix du discernement», le personnage du journaliste avide qui aurait mérité une bien meilleure place ou le jeu de Anthony Hopkins, à la limite de l'autoparodie.
On sait que les thrillers sont montrés du doigt en raison de la potentielle influence néfaste qu'ils pourraient avoir sur les cerveaux mous. Mais on pourrait soutenir une autre hypothèse : ils vont souvent si loin dans l'horreur que les tueurs en herbe auraient de quoi se décourager d'avance. Après Hannibal, difficile de faire pire. DepuisLe Silence des Agneaux, lui-même n'a pas fait mieux.
Film américain (2002) réalisé par Brett Ratner.
Avec : Edward Norton, Anthony Hopkins, Ralph Fiennes, Harvey Keitel, Mary-Louise Parker.
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