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Driss Benhima, Ancien ministre Directeur de l'Agence du nord : «On me reproche parfois ma capacité d'«autoécoute»

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Certains Casablancais vous regrettent, vous regrettez aussi Casablanca ?

Il y aurait beaucoup de choses à dire sur ces regrets : parfois ils sont de bonne foi, et ils font plaisir, et parfois ils expriment des arrière-pensées que je ne partage pas. Personnellement j'ai tourné la page. Tant que j'étais en poste à Casablanca j'ai fait les choses comme moi j'estimais qu'elles devaient être faites, avec dévouement, engagement et détermination.
Une fois que la mission est terminée, je ne me pose plus de questions sur cette période, ça n'a plus d'intérêt.

Vous avez été directeur d'office, ministre et wali avant d'être directeur de l'Agence du nord. Lequel de ces postes vous sied le mieux?

Cela dépend des angles de vue. La fonction la plus noble, évidemment, c'est celle de membre du gouvernement parce que les ministres sont les porteurs de l'espoir d'une nation. Maintenant, à titre personnel, je suis un ingénieur. Je suis devenu au bout de pas mal d'années un chef d'entreprise professionnel, que ce soit dans le privé ou le public. Ce qui m'a apporté le plus de satisfactions je dirais, c'est d'avoir été un manager dans une sphère de responsabilités structurées et bien délimitées.

Comment concevez vous votre poste à la tête de l'Agence pour le développement des provinces du nord ?

L'Agence du nord est un excellent instrument pour anticiper les événements et les plier à une stratégie réfléchie à l'avance. C'est une illustration du métier d'ingénieur : recueillir les données pertinentes quant à l'avenir du nord, se faire une idée des tendances lourdes, imaginer et mettre en œuvre les actions de nature à limiter les tendances négatives et à favoriser les tendances positives. Après quelques mois à l'Agence, je crois que le nord va nous surprendre : il est plein de potentialités et idéalement placé pour en profiter. Il faut s'y attendre et il faut s'y préparer.

Que répondez-vous à ceux qui disent que les technocrates ne sont pas faits pour gérer les affaires du gouvernement ?

Je pense vraiment que ni mon opinion ni la leur n'a d'importance. Je crois toutefois qu'il faut rappeler la Constitution à ce sujet. Il n'y a pas obligation constitutionnelle à être un élu ou un membre d'un parti politique pour faire partie du gouvernement. Personnellement je n'accepte pas cette séparation et cette fausse dualité entre la compétence technique et la sensibilité politique. Il me suffit que les responsables soient patriotes.

Certains vous ont critiqué pour, disent-ils, vos flèches lancées contre les journalistes. C'est de la provocation ou du franc-parler ?

Je n'ai jamais généralisé, j'ai parlé d'articles précis sur une affaire précise parus d'ailleurs dans un quotidien régional aujourd'hui disparu, peut-être après objet rempli ? Ce que j'ai pu dire n'était que le résultat de ma lucidité et de mon analyse.

Il n'y a donc que les vérités qui blessent ?

Pour moi, ça ne peut être que cela. Ce qui est remarquable, c'est que j'écoute les discours les plus officiels, je lis les articles qui s'y réfèrent et j'y trouve des analyses aussi dures que les miennes. Par ailleurs, il est normal que certains sujets attirent des polémiques plus tranchées que d'autres.

Qu'est-ce que vous détestez le plus, la bêtise ou le mensonge?

(Long moment de silence). Je crois qu'il faut vivre avec. Cela fait partie de la réalité des choses.

Vous pensez que vous avez besoin de cours de diplomatie pour vivre en société ?

C'est vrai que j'ai tendance à trouver tout consensus suspect. Le consensus peut faire perdre le sens des choses. Je crois que j'ai pris ça de mon père qui était encore plus intransigeant que moi. Quant à vivre en société, je m'en sors très bien, merci.

Dans votre travail, vous êtes un homme d'équipe ou un chef qui centralise toutes les décisions ?

Je ne peux pas répondre à la place de mes collègues. J'essaie de faire en sorte que l'équipe qui m'entoure soit au même niveau d'information et d'analyse que moi. Je ne cache pas ma copie car je pense qu'en étant dotés des mêmes informations, les membres d'un groupe arriveront aux mêmes conclusions et, de ce fait, adhéreront aux mieux aux décisions finales.

Vous êtes un pragmatique ou un idéaliste, voire un rêveur ?

Je n'oppose pas les deux concepts et j'essaye d'être partagé entre les deux. D'un côté, ça ne sert à rien de perdre en ayant raison, c'est un travers de gauchiste modèle années 70. Si on veut gagner, il ne faut pas hésiter à faire des compromis. La question centrale est donc de savoir si on fait trop de compromis ou pas. C'est une question qui se pose de manière concrète tout le temps et qui a fait, par exemple, l'objet d'un débat au sein de l'Agence du nord sur les critères d'acceptation des projets à retenir : faut-il être intransigeant sur la rentabilité des projets et en décevoir les promoteurs ou tenir compte de leur motivation au détriment des inquiétudes sur la faisabilité ? C'est un équilibre à trouver entre la réussite et le compromis.

En situation de crise vous agissez rapidement ou vous prenez le temps de cerner toute la problématique avant d'agir ?

Il faut espérer que la crise vous laisse le temps de cerner la problématique avant de devoir prendre les décisions, on appelle ça : gérer la crise. Il reste après à s'en remettre au Seigneur pour avoir la main sûre…

Vous faites très attention à ce que disent les autres ou alors vous avez confiance en ce que vous faites et ne prêtez pas attention à ce qu'on dit ?

C'est vrai qu'on me reproche parfois ma capacité d' « autoécoute ».

C'est une qualité ou un défaut ?

Ca ne peut être qu'un défaut qui est dû à deux facteurs. D'abord j'ai souvent des convictions fortes et sincères et je me considère blessé quand on ne me fait pas l'honneur de me répondre de manière aussi sincère. J'ai alors l'esprit qui se ferme, en particulier devant l'argument d'autorité, c'est-à-dire l'affirmation gratuite assénée sans démonstration. Deuxièmement, j'ai dit plus haut que nous étions dans une société de faux consensus qui évite la confrontation, même celle des idées qui, pourtant, peut être parfaitement respectable. Je donne une impression d'arrogance intellectuelle alors qu'en fait le monologue m'est imposé.

Enfant, vous étiez calme ou capricieux ?

J'étais un enfant très calme et on ne m'aurait pas laissé être capricieux…

Vous êtes un amoureux des livres ou un féru du zapping ?

Plutôt la lecture, mais je peux me surprendre à zapper en lisant.

Quel est le dernier livre qui vous a plu ?

La reine du Sud. C'est un livre dont une partie se passe au nord du Maroc. Il a été écrit par Arturo Perez-Reverte, et je vous recommande le cycle qu'il a écrit sur les aventures du Capitaine Alatriste, qui est un héros attachant. Un personnage dont les valeurs de loyauté et de sacrifice sont parfois mises à mal mais qui garde sa dignité et son allant.

Vous lisez tout ou vous avez une préférence pour un genre particulier de lecture ?

Même les brochures de téléphone portable à l'occasion, mais les romans et les biographies essentiellement. Je suis un grand lecteur de romans.

Le Ramadan se passe bien pour vous ?

Cette année oui. Le climat est idéal, j'ai un travail intéressant et le stress n'est pas au rendez-vous.

Vous travaillez à Rabat et vivez à Casablanca. Vous supportez sans problème de faire la navette ?

J'adore. Je voyage par train, car le stress de la voiture est très pénible. Franchement, je suis très satisfait du service de l'ONCF. Je félicite les chemins de fer pour cette réalisation très utile. C'est un rythme à prendre qui demande un peu de discipline, mais qui est très agréable.

Lorsque vous êtes à bord du train, vous lisez un livre ou vous regardez défiler le paysage?

Je fais les mots fléchés du Matin du Sahara.

Que pensez-vous de la réforme de la Moudaouana ?

Il y a deux étapes. La première étape était au niveau symbolique et politique. Elle vient d'être accomplie, et le pas qui a été franchi est énorme. La deuxième étape consiste en l'application concrète des décisions prises. Elle va demander de la vigilance et de l'attention de la part de tous les acteurs. C'est comme lorsqu'une armée perce le front ennemi et qu'il faut exploiter la brèche.

La Coupe du monde au Maroc, vous y croyez toujours ?

Plus que jamais d'après ce que je lis ; et je me retrouve parfaitement dans la campagne actuelle de promotion qui prolonge avec, de nouveaux atouts et des concurrents moins impressionnants, les candidatures précédentes. C'est le même discours de candidature mieux soutendu techniquement par les infrastructures réalisées depuis l'an 2000, en particulier par le programme des stades que nous avions nous-mêmes, lancé.

Quel sera votre conseil au nouveau comité de candidature ?

Continuez comme vous avez commencé. Une campagne éthique et engagée qui met en valeur tous les atouts de notre pays.
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