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Interviews exclusives des promoteurs de l'Initiative de Genève

Ils l'ont publiée, signée et font le tour du monde pour la défendre. Les deux architectes de l'Initiative de Genève étaient de passage au Maroc cette semaine, une étape importante dans leur tournée, pour promouvoir le plan de paix qu'ils ont élaboré au bo

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Yasser Abed Rabbo : «Notre projet jette : les bases d'une réconciliation historique»



Sa présence lors des dernières négociations de Camp David et de Taba lui a inspiré le projet de " l'Initiative de Genève " sur lequel il travaille depuis plus de deux ans avec une délégation israélienne dirigée par Yossi Beilin. Proche du Président Arafat, Yasser Abed Rabbo, est l'autre architecte du dernier plan de paix alternatif, signé le 1er décembre courant à Genève. Il revient ici sur les détails, les espoirs et l'histoire de cette Initiative.



Pouvez-vous nous dire comment est née l'Initiative de Genève et quand ?

L'idée de l'initiative de Genève est née après la suspension des négociations de paix à l'élection de Ariel Sharon (les Israéliens ont interrompu les discussions à Taba du 18 au 28 janvier 2001, pour cause de campagne électorale. Ehud Barak sera battu par Ariel Sharon lors de l'élection du 6 février 2001 NDLR). Nous avons alors pensé qu'il était de notre devoir de prouver à notre opinion publique et à Israël que l'occasion de parvenir à une paix est encore possible. La solution étant de terminer les négociations interrompues. Nous avons donc commencé notre travail au milieu de l'année 2001, en nous référant à toutes les précédents plans, négociations et projets de paix pour étudier de plus près leurs points faibles et les causes qui ont mené à l'échec de Camp David (juillet 2000, les discussions avaient échoppé notamment sur la question du retour des réfugiés et la souveraineté sur les Lieux saints de la ville d'Al-Qods). Nous nous sommes donc mis d'accord avec quelques uns des négociateurs israéliens pour continuer le travail et d'utiliser l'expérience d'autres négociateurs, et d'experts en cartographie et dans plusieurs autres domaines. Ce qui fait que l'initiative de Genève est le résultat d'efforts conjugués de plusieurs dizaines voire de centaines de personnes et pas seulement de Yossi Beilin et moi-même.

L'opinion publique internationale a pris connaissance de votre projet il y a quelques semaines seulement. Mais comment avez-vous fait pour diffuser l'information concernant ce plan de paix à l'intérieur de Territoires palestiniens et en Israël ?

Nous avons procédé à la plus large campagne d'information dans les anales des initiatives politiques. En Israël, plus de deux millions de copies de l'Initiative de Genève ont été distribuées aux gens. Dans les Territoires palestiniens, les services de la poste ne fonctionnent pas à cause de l'occupation israélienne. Nous avons donc publié près de quatre fois le texte dans les journaux palestiniens et plus de cent mille copies ont été distribuées manuellement aux gens. Les différentes télévisions et radios locales ont aussi aidé à diffuser le message. Nous constatons aujourd'hui avec plaisir qu'un grand nombre de personnes sont au courant du projet et ont jeté un coup d'œil sur son texte. C'est très important pour nous, car nous devons aussi nous battre contre des forces extrémistes des deux côtés qui essayent de diffuser de fausses informations sur l'Initiative de Genève.

De quelles forces parlez-vous ?
En Israël c'est tout simplement le gouvernement actuel. Du côté palestinien se sont quelques unes des forces de l'opposition. Pas toutes heureusement.

Vous comptez sur le soutien des Palestiniens, pourtant des membres de la délégation palestinienne qui se rendaient il y a quelques jours à Genève pour signer l'initiative ont été attaqués par des concitoyens qui les traitaient de traîtres ?

Ces attaques viennent du fait que l'initiative de Genève est une initiative réaliste et la solution équilibrée qu'elle propose dérange les extrémistes des deux bords. Notre projet jette les bases d'une réconciliation historique sur les bases des frontières de 67 pour la création de deux Etats, et le partage de la souveraineté d'Al Qods. Cela pose problème à tous ceux qui sont opposé à la résolution pacifique de ce conflit.

Pourquoi publier aujourd'hui un nouveau plan de paix alors que la " Feuille de route " existe déjà. Cette dernière ne répond-t-elle pas à toutes les questions en suspens ?

" La Feuille de route " n'apporte pas une solution détaillée du conflit. Elle contient des dispositions de transition concernant la situation sécuritaire, les procédures de mise en confiance et l'arrêt des colonies. Concernant la solution finale la " Feuille de route " laisse juste un titre général qui est " la création de deux Etats à l'horizon 2005 ", selon la vision de George W. Bush. Donc pas de solutions ou propositions concernant les frontières des deux Etats, le statut d'Al Qods, la question des réfugiés, des eaux, des relations économiques… C'est pourquoi nous proposons des mesures à même de compléter la " Feuille de route " que nous ne contestons pas d'ailleurs. C'est le modèle détaillé que représente l'initiative de Genève qui fait sa force et la rend plus de crédibilité.

Justement à propos de ces points auxquels s'attaquent l'initiative de Genève. Comment voyez-vous le démantèlement des colonies juives et quelles seraient les frontières de l'Etat palestinien selon votre projet ?

Pour les colonies, il est prévu que les petites et moyennes colonies soient démantelées en premier, et nous donnons aux Israéliens une période de 30 mois pour procéder à un démantèlement réaliste et progressif du reste. Concernant les frontières ce sont celles de 67, combinées avec des échanges de 2.3% de terre avec les Israéliens.

Concernant le statut de la ville d'Al-Qods, vous vous êtes basés sur un principe " Clintonien ". La souveraineté de chacun des Etats sera sur les zones peuplées par ses citoyens. Sur le terrain, qui est majoritaire ?

La majorité écrasante des quartiers arabes est peuplée de Palestiniens ainsi qu'une grande partie de la vieille ville. Le Mur des Lamentations et le quartier juif revienne eux aux Israéliens.

Le sort des réfugiés palestiniens a toujours été la pierre angulaire du conflit israélo-palestinien. Est ce que la résolution pacifiste que vous proposez ne se fait pas au détriment des quatre millions de palestiniens qui vivent hors du pays ?

L'Initiative que nous proposons garantit leurs droits à tous les Palestiniens, notamment les réfugiés, dans le cadre d'un Etat souverain. C'est pourquoi nous avons dit qu'il y aura un retour des réfugiés en Palestine, dans les terres échangés (les 2.3%) et un retour limité et étudié entre les deux parties des réfugiés en Israël.
C'est aussi ce que dit l'Initiative de paix arabe (Il s'agit du plan de paix arabe, adopté à l'initiative de l'Arabie Saoudite lors du sommet arabe de Beyrouth le 28 mars 2002. Il sera remis le 25 avril 2002 par le Prince héritier saoudien Abdallah au président George W. Bush un document en huit points pour relancer le processus de paix, document que M. Bush juge "constructif" NDLR), qui parle d'une solution concertée pour le retour des réfugiés palestiniens. Il ne sera certes pas possible de faire revenir des millions de Palestiniens, mais il y aura des indemnités compensatrices des préjudices subis et des biens pour ceux qui ne pourront pas revenir. Sinon il faudra donc prendre l'une des trois options précitées (retour sur les Territoires, terres échangées, ou en Israël). Cette solution n'est peut être pas l'idéale et la plus juste, mais nous savons dans le contexte historique où nous avons vécu et les changements démographiques depuis 48 que la justice absolue est impossible. Et si nous campons sur nos positions, il n'y aura pas de résolution du conflit, pas de retour des réfugiés et pas d'Etat non plus.

Vous êtes assez proche de Yasser Arafat pour nous expliquer pourquoi il n'a toujours pas approuvé officiellement cette Initiative de Genève ?

Nous ne pouvons pas avoir de reconnaissance officielle de notre initiative à ce stade. J'ai moi-même demandé à l'Autorité palestinienne dont je fais partie en tant que membre du comité exécutif de l'OLP, de soutenir nos efforts et d'encourager l'initiative. Mais le soutien officiel de ces négociations devra se faire conjointement avec un représentant officiel du gouvernement israélien aussi. Aujourd'hui ce n'est pas encore le cas. Comme d'habitude Israël bloque le processus.

Plusieurs pays arabes avec à leur tête le Maroc ont exprimé leur soutien officielle à cette initiative. Qu'est ce que cela représente pour vous ?

Nous voulons exprimer notre gratitude pour le grand rôle qu'a joué S.M le Roi Mohammed VI et son Gouvernement dans le soutien de l'Initiative de Genève. Le Maroc était en tête des pays qui nous ont soutenu, avec l'envoi d'un émissaire spécial lors de la cérémonie de signature. Ceci sans oublier que plusieurs envoyés comme M.André Azoulay, Conseiller de Sa Majesté le Roi Mohammed VI ou encore M. Mohamed Benaïssa, ministre des Affaires étrangères, continuent de suivre avec nous les négociations et nous aident pour récolter un plus grand soutien arabe et mondial.
Le Maroc a saisi l'importance de cette Initiative pour construire la paix et faire renaître l'espoir chez les gens, même si la construction du mur de l'apartheid (Ligne dite de sécurité construite par les Israéliens) tente toujours de tuer l'espoir, en imposant un système de cantonnement et de ghettos aux Palestiniens dans le cadre de l'occupation israélienne.

Entretien réalisé par Aziza Nait Sibaha

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