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L’art des bijoux : des histoires d’or et d’argent

Quels que soient le lieu ou l’époque, le port des bijoux a toujours été chargé de significations. Conçus initialement pour transmettre un message, ils ont eu pour but, ensuite, d’embellir celle qui le porte.

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Nul doute que la femme marocaine aime se couvrir de bijoux. Ceci d’autant plus que le bijou féminin a connu, depuis les origines, une importance dont la valeur est jalousement conservée d’une génération à une autre.

Au Maroc, on hérite les bijoux de famille, de mère en fille. Car au-delà de leur aspect esthétique et ornemental, ceux-ci avaient d’innombrables significations et étaient utilisés à plusieurs fins. En cas de besoin urgent ou de mauvaise récolte, un bijou se revendait facilement.
Le travail des bijoutiers-orfèvres et les bijoutiers qui œuvrent sur argent au Maroc remonte à très loin.

Les parures et les bijoux appartiennent, en effet, à une très longue tradition, même si aujourd’hui, il est difficile de faire la différence entre les styles qui ont plutôt tendance à s’unifier contrairement à la période allant de 1935 à 1945.
A cette période-là, deux expressions prédominaient : l’une citadine d’inspiration hispano-mauresque ou hispano-maghrébine, et l’autre rurale, dite berbère et saharienne.
Déjà, le choix de la matière se faisait en fonction de la situation géographique. Les bijoux citadins optaient essentiellement dans les principales villes du Maroc : Meknès, Tanger, Tétouan, Fès, Marrakech et beaucoup plus tard à Casablanca et Rabat.
Ces bijoux étaient de vrais chefs-d’œuvre. Ils étaient fabriqués par des bijoutiers de confession juive qui utilisaient des techniques élaborées et des formes raffinées. Entre le décor floral et l’arabesque, les bijoux sont enjolivés d’émaux champlevés et de pierres précieuses comme les rubis, les grenats, les émeraudes et les perles.
Quant aux bijoux qualifiés traditionnellement de «berbères», il faut dire que leur concept était fondamentalement différent de ceux qui existaient dans les villes. D’abord, les artisans préféraient de loin créer des pièces en argent massif et non pas en or. Ce choix est opté également par les artisans du Sahara qui pensent que l’or est un métal plutôt redouté, «il attire le malheur», contrairement à l’argent, le «métal béni».

Les bijoux sont fabriqués suivant les techniques de découpage, moulage, le filigrane employé autrefois dans le Moyen-Atlas devient aujourd’hui la spécialité exclusive d’Essaouira et de Tiznit. Les décors obtenus par l’estompage et la ciselure animée d’émaux de couleur ou de nielle qui, malheureusement, n’est plus coté - constituent l’une des dernières procédures. Les pierres qui faisaient plaisir tant aux artisans qu’aux femmes étaient, quant à elles, semi-précieuses comme la corail, la cornaline… Et comme la symbolique joue un rôle prépondérant dans la confection des bijoux, le corail est considéré comme une pierre précieuse qui donne aux femmes force et bonheur.

Bijoux fétiches

En somme, il importe de dire que le port de la parure dans ces parties du Maroc ne se limite pas uniquement dans une seule signification. Le bijou est plus qu’un ornement; il est un langage qui exprime tellement de choses. Il est aussi témoignage d’amour. En fait, une femme qui porte fièrement une fibule, un bracelet, des boucles d’oreilles ou une khmissa en argent autour de son cou, exprime ainsi un sentiment d’attachement à ses traditions et à ses origines. Si l’on commence à parcourir les bijoux qui marchent le mieux et pour lesquels les femmes marocaines expriment une admiration particulière ce sont principalement la fibule et la khmissa.

A la fois esthétique et utile, la fibule occupe la première place. Les femmes l’utilisaient sans hésitation pour sa remarquable fonction : elle parvenait à épingler le vêtement sans couture et qui était autrefois drapé à l’instar du manteau et le châle des Celtes et des Germains. La fibule, qui était généralement utilisée par paire, ne se portait pas n’importe comment mais le bon goût exigeait qu’elle soit placée exactement en avant de chacune des épaules et non pas autrement. Son charme est accentué par une chaîne simple dont la fonction était de relier les deux fibules. Et comme la fibule n’était l’apanage d’aucune partie du Maroc, elle est devenue le bijou fétiche de la femme marocaine, constatation qui pousse les bijoutiers-orfèvres de l’imaginer dans différentes formes. Les plus prisées étaient les fibules triangulaires, losangiques, rondes ou multicolores.

Quant à la technique, il y en avait deux, différentes, pour obtenir la forme définitive du bijou : le métal est soit fondu et coulé dans un moule, soit chauffé et découpé aux ciseaux.L’autre bijou que l’on trouve pratiquement dans toutes les familles est assurément la khmissa. «La main» qui symbolise la protection contre les effets du «mauvais œil», comporte également une connotation de porte-bonheur. A chaque fois que l’on doit faire un cadeau notamment pour un nouveau-né, on pense systématiquement à la «khmissa», qui est chargée de symboles prophylactiques.

C’est pourquoi elle demeure un objet profondément présent dans notre culture.
L’évocation de ces deux bijoux n’exclue en aucun cas la présentation des autres formes qui ont également leur signification dans notre culture.
Entre la lebba (collier pour mariée de Fès), bracelets, broches, penditifs, bagues, boucles de ceinture, le bijou aujourd’hui a connu un affaiblissement du sens dû aux techniques modernes de fabrication et du changement de la mentalité quant à la conception du bijou. On ne consacre plus le même temps pour la fabrication. Autrefois, l’artisan, soucieux d’atteindre la perfection, mettait des jours et même des mois pour achever ses motifs et créer un bijou qui était avant tout un investissement «affectif» dans l’avenir.

Aujourd’hui, les femmes achètent les bijoux pour exalter la splendeur de celles qui les portent. Mais cela ne saurait durer. Le retour de la fibule qui se porte désormais autant sur les tailleurs que sur les tenues traditionnelles traduit un retour aux sources. C’est en quelque sorte une manière d’exprimer cette envie de replonger dans le passé.
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