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Menacés par la concurrence, ils expriment leur mécontentement : les Adouls n'ont plus la cote

Les Adouls sont en colère et ils le font savoir. Le bureau exécutif du syndicat national des adouls du Maroc a déjà tiré la sonnette d'alarme lorsqu'il a annoncé récemment une grève générale préventive.

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« J'ai poursuivi des études juridiques à la Faculté, comme tous les magistrats qui exercent aujourd'hui dans les différents tribunaux du pays. Seulement, je ne reçois pas le même traitement qu'ils reçoivent. Un Adoul est considéré comme un juriste de second degré.

Aussi, les gens préfèrent-ils aller voir un notaire pour rédiger ou parapher un contrat, que de prendre attache avec un Adl. Ils considèrent qu'en faisant signer un acte chez un Notaire, le document aura plus de valeur juridique», déplore Ibrahim Abdou, lauréat de l'université Hassan II à Casablanca.

En faisant un tour chez les Adouls du quartier des Habous de Casablanca, nous avons pu constater sur place la situation précaire dans laquelle vivent ces corps de métier, jadis très sollicités par les citoyens. Pratiquement, toute rédaction ou validation d'actes juridiques (mariage, divorce, testament, tutelle, héritage…) passait par ces magistrats. Contrairement au notariat, la profession est exclusivement masculine. La femme n'est pas encore intégrée dans le corps des Adouls. Ces derniers continuent de rédiger en langue arabe. Aujourd'hui, la profession a évolué et s'est énormément modernisée. Le dahir du 6 mai 1982 a doté la profession d'un nouveau statut.

Les Adouls sont les auxiliaires de la Justice du Taoutiq (juge notaire et des mineurs) car ils remplissent le rôle de greffe et du notariat. Ce sont des témoins officiels (il en faut toujours deux) chargés de consigner les déclarations et les jugements. Ils sont nommés par le ministre et sur propositions du Cadi. Les Adouls exercent près de chaque section du Taoutiq du tribunal de Première Instance. Leur discipline relève du Ministre de la Justice. Regroupés au sein du syndicat national des Adouls du Maroc, ils sont entre 3000 à 4000 Adouls et notaires à exercer sur l'ensemble du territoire national.

Pour certains, ce nombre de représentants de ces corps de métier, notamment pour les notaires est jugé faible par rapport au nombre des habitants du Maroc. Pour d'autres, ce chiffre est élevé parce qu'il comprend les Adouls et les juges traditionnels (cadis). Le notaire est un officier public, établi pour recevoir les actes auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d'authenticité; attachée aux actes de l'autorité publique pour en assurer la date, en conserver le dépôt. Les notaires sont nommés au Maroc par Dahir Royal.

Les actes sont établis en langue française. Le Notaire peut être considéré comme un garant de l'état de droit ou un arbitre impartial des contrats qu'il reçoit et dont il assure la moralité et la sécurité juridique. Et ce, dans la mesure où il a pour mission d'authentifier - au moyen d'actes inattaquables - les volontés des contractants, d'alimenter les recettes budgétaires de l'état - par des prélèvements des droits d'enregistrement, des impôts et taxes - et de prévenir les litiges ou procès qui en découlent, évitant ainsi l'engorgement des tribunaux et participant, de ce fait, à la moralisation des relations contractuelles.

D'un point de vue socio-économique, c'est un partenaire nécessaire et important de la famille et de l'entreprise. En effet, son rôle est triple. Au-delà du rôle de rédaction des actes, le notaire peut être un conseiller juridique sur moult questions : droit privé, droit immobilier, droit des affaires, droit des sociétés, droit international privé et aussi sur la fiscalité et la gestion de patrimoine. Il a également pour mission d'informer, impartialement, les parties sur la portée des engagements qu'elles prennent. Il joue aussi un rôle de sécurité et de prévention. En effet, du fait de la rédaction d'actes juridiques, le notaire est en mesure de prévenir les litiges entre les parties.

Il veille sur les documents et actes publics et effectue les diverses formalités fiscales et juridiques; nécessaires à la perfection des contrats selon les dispositions légales. La finalité étant pour les parties de se mettre à l'abri de toute irrégularité vis-à-vis de la législation en vigueur. Le notaire assume le rôle de conciliateur et de médiateur. Face à un désaccord entre les parties, le notaire est le mieux placé pour chercher et aboutir à des solutions intermédiaires et mettre fin aux divergences à l'amiable. Mais, les boutiques juxtaposant la section du Taoutiq émanant du tribunal de première instance restent quotidiennement fréquentées par une foule de gens, plus au moins dense, qui vient certifier ses documents.

Toutefois, nous avons constaté qu'entre les Notaires et les Adouls, il existe un décalage énorme. Pas au niveau des études puisque tous les deux disposent d'un diplôme universitaire, mais dans le traitement accordé à chacune des deux professions. Mohieddine Mustapha, lauréat de Dar Al Hadith Al Hassania à Rabat, déplore le mutisme des pouvoirs publics, en ajoutant que «La situation des adouls est devenue précaire. Les clients se font de plus en plus rares. Si l'on excepte ceux qui demandent le concours des Adouls pour la validation d'un mariage ou d'un testament, il ne reste pratiquement rien à faire.

La profession a perdu de son valeur et de son efficacité. Avec la prolifération des agents et conseils en immobilier, par exemple, les adouls et les notaires ne sont plus les seuls dépositaires de la rédaction d'un contrat. Je me demande pourquoi, nous avons fait les mêmes études et nous n'avons pas le même statut». C'est cette situation déplorable qui a poussé les adouls à s'organiser, pour la première fois dans les annales du pays, en instance nationale pour mieux exposer leur situation et défendre leurs intérêts.
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