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Projet de Code de la Famille : le Printemps de l’égalité a été inauguré cet automne

Les 11 nouvelles règles d’or qui rétablissent la Marocaine dans ses droits lui font retrouver sa dignité et lui permettent d’accéder enfin à la citoyenneté et, telles que déclinées par Sa Majesté Mohammed VI à l’ouverture solennelle de l

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M. Dahak avait-il failli ? N’avait-il pas su dégager de consensus fort ? S’était-il laissé submerger et envahir par les tendances les moins ouvertes, les moins tolérantes et les plus rétives donc à toute idée de modernité ? Il sera en tout cas immédiatement remplacé par M’hammed Boucetta. Malgré ses sorties médiatiques qui avaient fait craindre le pire au mouvement féminin, l’istiqlalien, longtemps secrétaire général du parti fondé par Allal Al Fassi, aura fait bonne figure.

« La question tenait à cœur du Souverain bien avant son accession au Trône. Prince Héritier, il était particulièrement sensible aux droits des femmes. L’annonce Royale sur la réforme du code de la famille, prononcée devant le Parlement ce vendredi 11 octobre, ferme en apothéose quatre ans de règne pour ouvrir une nouvelle étape dans la vie du Royaume ». Notre interlocuteur, proche des lambris du pouvoir, a du mal à cacher son émotion.

Sa joie aussi devant le chemin accompli. Les 11 nouvelles règles d’or qui rétablissent la Marocaine dans ses droits lui font retrouver sa dignité et lui permettent d’accéder enfin à la citoyenneté, et telles que déclinées par Sa Majesté Mohammed VI à l’ouverture solennelle de la session d’automne du Parlement, sont le résultat final d’un long parcours semé d’embûches, d’obstacles, de polémiques stériles, de débats populistes et d’amalgames volontairement mensongers et outrageusement révoltants. La femme, comme toujours et de coutume, maillon faible d’un processus, y sera sacrifiée sur l’autel d’une politique qui avait choisi, pour ne pas changer, d’être exclusivement politicienne.

Avec l’Alternance, tous les rêves devenaient enfin possibles. Le « Mai 1968 permanent » d’un Youssoufi, au sens avéré de la formule, mais confondant visiblement compromis historique et compromission trop coûteuse, laissait imaginer que l’égalité et la fin de l’injustice faite aux Marocaines seraient une action gouvernementale, inscrite au fronton du programme d’un Exécutif qui n’en finissait pas de promettre, sur tous les tons et à tous les modes, le changement.
« Avec Si Abderrahamane Youssoufi, il y a eu le projet avorté du plan d’action en faveur de l’intégration de la Marocaine au développement.

Et le nom du secrétaire d’Etat, Saïd Saâdi, restera longtemps encore lié à ce rêve de justice rendue à la moitié d’une société qui jetait ses femmes répudiées à la rue ou de les battre en toute impunité. La fin de l’histoire est connue, et elle n’est pas heureuse. Le plan d’action a été sacrifié sur l’autel d’une polémique poilue et tous voiles dehors. Saâdi a été limogé. La patate chaude a été refilée au Palais Royal », rappelle une militante du Printemps de l’égalité.

Un officiel tempère le propos. Développant la thèse selon laquelle la polémique sur le plan d’action en faveur de l’intégration de la femme au développement n’a pas été vaine, il explique que ces trois années –entre le premier projet de plan d’action du gouvernement d’alternance et la réforme du Code de la Famille annoncée ce 11 octobre 2003- auront été nécessaires pour que « les choses mûrissent et que les esprits se calment, sinon les femmes n’auraient obtenu le quart de ce qui a été annoncé vendredi par le Souverain ».

Fait-il référence à ces deux manifestations de Rabat et Casablanca, organisées le 12 mars 2000 où démocrates passionnés d’égalité et conservateurs barbus auto proclamés gardiens du temple avaient, le temps d’une image ayant fait le tour du monde, divisé une société en transition, en quête du renforcement de ses équilibres ?

Echec et mat de la première commission

« Comment peut-on céder à une manif’ où la pilosité se mesurait au kilomètre et sacrifier le SMIG des droits des femmes ? Nos silences, notre démission aussi ont fait que nous tous avons accepté. Accepté d’être les otages d’une minorité. Accepté de convoquer la religion là où elle n’a pas lieu d’être, là où il s’agit simplement, naturellement, viscéralement de justice, de tolérance, de paix.

Le secrétaire d’Etat Saâdi qui avait défendu jusqu’au bout de ses convictions ce plan, vivra des moments douloureux où l’invective, la diffamation, l’accusation étaient clamées au nom de la religion, par des prétendus gardiens du dogme, du temple, par ceux-là même qui pensent « dépravées, prostituées, débauchées» quand nous disions égalité, justice, modernité. Et c’est quelque part au nom de cette aveuglante absence de lumière, à cause de ce noir-obscur, que le Maroc a eu son 16 mai… », s’indigne encore un digne représentant du peuple de gauche.

Avant d’aboutir à cette mouture que tous ont, dans une belle et rare unanimité, saluée, le Code de la Famille revient de loin. Une première commission en charge de réfléchir à une réforme de la Moudaouana que présidait Driss Dahak –alors à la tête du Conseil consultatif des droits de l’Homme - avait été en janvier dernier dans l’incapacité de rendre sa copie, confrontée aux résistances de ses membres les plus conservateurs.

Driss Dahak avait-il failli ? N’avait-il pas su dégager de consensus fort ? S’était-il laissé submerger et envahir par les tendances les moins ouvertes, les moins tolérantes et les plus rétives donc à toute idée de modernité ? Il sera en tout cas immédiatement remplacé par M’hammed Boucetta.

Malgré ses sorties médiatiques qui avaient fait craindre le pire au mouvement féminin, l’istiqlalien, longtemps secrétaire général du parti fondé par Allal Al Fassi, aura fait bonne figure et l’Histoire reconnaîtra très probablement à cet ancien ministre des Affaires étrangères –par conséquent habitué aux négociations toutes diplomatiques- qu’il a su trouver un modus vivendi entre « l’amendement du Code de la Famille respecte les constantes de la Chariâ et répond aux exigences de la modernité ».

Explications de M. Boucetta : « Les amendements introduits à la Moudaouana ont prouvé deux choses essentielles : la première c’est que ce code concerne un pays musulman et est destiné à organiser les affaires des musulmans –des valeurs que S.M. le Roi Amir Al Mouminine a tenu à consacrer– et la seconde c’est que le Maroc doit être au diapason du développement.

Les amendements introduits au Code de la Famille traduisent aussi la sagesse qui a présidé aux travaux de la commission, ce qui a permis de trancher sur divers problèmes qui paraissaient au départ comme des points de profondes divergences ».

Les textes de loi, aussi révolutionnaires soient-ils, ne valent que par leur application. Cette phrase résume aujourd’hui les préoccupations des militantes du mouvement féminin marocain.

Dimanche, le Souverain adressait une lettre au ministre de la Justice, Mohamed Bouzoubaâ, pour que soient aménagés rapidement au sein des différents tribunaux du pays « des locaux convenables pour les juridictions de la Famille » et que des « cadres qualifiés de différents niveaux pour exercer l’autorité qui leur sera confiée dans ce domaine » soient formés. Cette année, le printemps a été précoce. Car le printemps des femmes a commencé en automne.
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