" J'ai eu la chance d'avoir un père un peu fou, un artiste qui, par amour de la langue française, m'a donné le prénom de Sérénade. Ce père voulait que je sois une femme libre ". D'emblée, l'auteur trace les contours d'une vie peu commune au sein d'une famille pétrie de valeurs de libertés, d'égalité et de justice.
La famille de Sérénade, qui a des penchants gauchisants voire communistes, et qui affichait ouvertement son athéisme, voulait refaire le monde, changer les donnes et bâtir un monde meilleur. Des discussions à n'en plus finir avec des amis qui envahissaient la maison, des échanges de points de vue avaient meublé l'enfance de la petite égyptienne qui vouait alors un amour infini à son père. Un père cinéaste qui se battait avec la censure pour sortir un premier long métrage et qui avait un certain succès à la télévision en tant que réalisateur de séries. Il était aussi journaliste et ses chroniques fort appréciées.
La relation de Sérénade avec sa mère n'a jamais été au beau fixe, celle-ci ne lui ayant jamais pardonné d'être l'aînée au moment où toute la famille s'attendait à accueillir un garçon, d'être sans grâce, et de surcroît brune et crépue. Autant de facteurs qui avaient dressé un gouffre entre l'enfant et sa mère, une femme qui avait pourtant des convictions politiques marxistes, qui avait adhéré à un parti de gauche quand cela avait été permis en Egypte et qui se battait pour la liberté d'expression, apportait aide et réconfort aux prisonniers et détenus politiques. Cette vie familiale, tiraillée entre des lendemains meilleurs et la dure réalité marque précocement l'auteur.
Et c'est pourquoi, elle a choisi de raconter " mon Egypte. Laquelle n'est pas celle des circuits touristiques car notre Histoire ne s'est pas achevée avec les pharaons. La mienne commence sous Nasser, au milieu des années soixante. Ayant connu le Caire à l'époque de la minijupe et des mises en plis impeccables, j'ai du mal à me frayer un chemin dans celles des voiles et des regards baissés… "
Cette phrase résume à elle seule le combat d'une femme qui avait pour principes de refuser toute compromission et tout marchandage. Ayant goûté à la liberté en France lorsqu'elle y avait suivi son père, enfin lassé de subir les coups de ciseaux de la censure, Sérénade, de retour en Egypte, à la recherche de ses racines et d'une nouvelle vie auprès d'un homme qu'elle aime, ne pourra jamais concrétiser ses rêves. Elle qui refusait toutes les traditions arriérées de son pays, qui affichait haut et fort sa libération et son émancipation, devra s'y soumettre pour obtenir son divorce. Un enfant sur les bras, dans l'incapacité de poursuivre des études supérieures dans son pays natal, Sérénade Chafiq poursuit toujours des chimères.
Un second mariage, sous le ciel froid et glacé de Moscou, dans le but de donner un père à son premier enfant, se solde encore par un échec. L'auteur dissèque froidement une autre société, un autre modèle qui avait bercé ses jeunes années. La réalité est tout aussi amère. La descente aux enfers tout aussi pénible. Le retour en Egypte s'avère le seul moyen pour retrouver un semblant de dignité et d'humanité. Encore une fois, sous la pression de sa famille, elle se remet en ménage avec son ancien époux. Les insultes, les humiliations, les agressions physiques deviennent son lot quotidien.
La naissance d'une petite fille, tant attendue, vient combler de bonheur la maman qui espère ainsi se réconcilier avec la vie. Mais, dans une Egypte qui bascule, de plus en plus, vers les courants fondamentalistes, où les femmes sont de plus en plus voilées, Sérénade ne se sent plus libre. Répudiée par son mari, elle décide de se remarier, mais cette fois-ci avec un français, un homme qui la respecte. Mal lui en prit. Le père reprend la petite fille, âgée alors d'à peine trois ans. En France, où elle se réfugie, Sérénade essaie de recoller les morceaux de sa vie, de fonder une nouvelle famille…
La déchirure de la perte de sa fille demeurera très vive. Commence alors un dur combat pour retrouver Laïla, une véritable bataille judiciaire qui permet à Sérénade de poser sur le tapis, et partant sur la place publique, toutes les pratiques subies par les femmes de son pays et notamment l'excision.
L'auteur ne pouvait pas imaginer que sa fille pourrait subir, un jour, pareil sort, et pourtant…
Dans "Répudiation, Femme et mère en Egypte : loin des splendeurs pharaoniques, la terrible réalité", Sérénade Chafiq enregistre tout ce qui ne va pas, évoque les différentes politiques développées sous les régimes successifs de Nasser, Sadate et Moubarak. Elle déverse sa colère sur un code de la famille, jugé obsolète, sur les iniquités commises à l'égard des femmes de son pays. Son regard juge, jauge et condamne implacablement des mœurs, des traditions, une façon de vivre. Cette révolte contre la condition féminine est perceptible à chaque page. Elle constitue le fondement même de cet ouvrage qui donne à voir une image peu reluisante d'une société qui se confine, selon l'auteur, " dans la lâcheté et la mauvaise foi ".
Répudiation de Sérénade Chafiq, Ed.Michel Lafon, 367 p.
La famille de Sérénade, qui a des penchants gauchisants voire communistes, et qui affichait ouvertement son athéisme, voulait refaire le monde, changer les donnes et bâtir un monde meilleur. Des discussions à n'en plus finir avec des amis qui envahissaient la maison, des échanges de points de vue avaient meublé l'enfance de la petite égyptienne qui vouait alors un amour infini à son père. Un père cinéaste qui se battait avec la censure pour sortir un premier long métrage et qui avait un certain succès à la télévision en tant que réalisateur de séries. Il était aussi journaliste et ses chroniques fort appréciées.
La relation de Sérénade avec sa mère n'a jamais été au beau fixe, celle-ci ne lui ayant jamais pardonné d'être l'aînée au moment où toute la famille s'attendait à accueillir un garçon, d'être sans grâce, et de surcroît brune et crépue. Autant de facteurs qui avaient dressé un gouffre entre l'enfant et sa mère, une femme qui avait pourtant des convictions politiques marxistes, qui avait adhéré à un parti de gauche quand cela avait été permis en Egypte et qui se battait pour la liberté d'expression, apportait aide et réconfort aux prisonniers et détenus politiques. Cette vie familiale, tiraillée entre des lendemains meilleurs et la dure réalité marque précocement l'auteur.
Et c'est pourquoi, elle a choisi de raconter " mon Egypte. Laquelle n'est pas celle des circuits touristiques car notre Histoire ne s'est pas achevée avec les pharaons. La mienne commence sous Nasser, au milieu des années soixante. Ayant connu le Caire à l'époque de la minijupe et des mises en plis impeccables, j'ai du mal à me frayer un chemin dans celles des voiles et des regards baissés… "
Cette phrase résume à elle seule le combat d'une femme qui avait pour principes de refuser toute compromission et tout marchandage. Ayant goûté à la liberté en France lorsqu'elle y avait suivi son père, enfin lassé de subir les coups de ciseaux de la censure, Sérénade, de retour en Egypte, à la recherche de ses racines et d'une nouvelle vie auprès d'un homme qu'elle aime, ne pourra jamais concrétiser ses rêves. Elle qui refusait toutes les traditions arriérées de son pays, qui affichait haut et fort sa libération et son émancipation, devra s'y soumettre pour obtenir son divorce. Un enfant sur les bras, dans l'incapacité de poursuivre des études supérieures dans son pays natal, Sérénade Chafiq poursuit toujours des chimères.
Un second mariage, sous le ciel froid et glacé de Moscou, dans le but de donner un père à son premier enfant, se solde encore par un échec. L'auteur dissèque froidement une autre société, un autre modèle qui avait bercé ses jeunes années. La réalité est tout aussi amère. La descente aux enfers tout aussi pénible. Le retour en Egypte s'avère le seul moyen pour retrouver un semblant de dignité et d'humanité. Encore une fois, sous la pression de sa famille, elle se remet en ménage avec son ancien époux. Les insultes, les humiliations, les agressions physiques deviennent son lot quotidien.
La naissance d'une petite fille, tant attendue, vient combler de bonheur la maman qui espère ainsi se réconcilier avec la vie. Mais, dans une Egypte qui bascule, de plus en plus, vers les courants fondamentalistes, où les femmes sont de plus en plus voilées, Sérénade ne se sent plus libre. Répudiée par son mari, elle décide de se remarier, mais cette fois-ci avec un français, un homme qui la respecte. Mal lui en prit. Le père reprend la petite fille, âgée alors d'à peine trois ans. En France, où elle se réfugie, Sérénade essaie de recoller les morceaux de sa vie, de fonder une nouvelle famille…
La déchirure de la perte de sa fille demeurera très vive. Commence alors un dur combat pour retrouver Laïla, une véritable bataille judiciaire qui permet à Sérénade de poser sur le tapis, et partant sur la place publique, toutes les pratiques subies par les femmes de son pays et notamment l'excision.
L'auteur ne pouvait pas imaginer que sa fille pourrait subir, un jour, pareil sort, et pourtant…
Dans "Répudiation, Femme et mère en Egypte : loin des splendeurs pharaoniques, la terrible réalité", Sérénade Chafiq enregistre tout ce qui ne va pas, évoque les différentes politiques développées sous les régimes successifs de Nasser, Sadate et Moubarak. Elle déverse sa colère sur un code de la famille, jugé obsolète, sur les iniquités commises à l'égard des femmes de son pays. Son regard juge, jauge et condamne implacablement des mœurs, des traditions, une façon de vivre. Cette révolte contre la condition féminine est perceptible à chaque page. Elle constitue le fondement même de cet ouvrage qui donne à voir une image peu reluisante d'une société qui se confine, selon l'auteur, " dans la lâcheté et la mauvaise foi ".
Répudiation de Sérénade Chafiq, Ed.Michel Lafon, 367 p.
