M. Bouzoubaâ n'est pas exactement un amateur de la langue de bois. Et l'avocat qu'il a été ne compte pas uniquement sur les effets de manche. Ce jour-là, à la séance des questions orales de la Chambre des conseillers, le ministre de la Justice est interpellé sur le dossier de la lutte contre la corruption.
Le décor est planté pour mieux annoncer la couleur. La diatribe du responsable gouvernemental contre ces élus qui se font acheter, passant d'un parti à l'autre et d'une idéologie à l'autre, sans coup férir mais au plus offrant, a tonné comme un orage.
« Il est regrettable d'entendre qu'au sein même du Parlement, il y a vente, achat, corruption et passage d'un parti à un autre en contrepartie de sommes d'argent. Ce qui porte atteinte à la crédibilité des institutions législatives et à la politique générale de l'Etat.
Comment est-ce que des personnes peuvent se permettre de recevoir des contreparties pour passer d'une formation politique à une autre et trahir ainsi la confiance des citoyens et celle des partis qui les ont accrédités afin qu'ils défendent leur programme au sein du Parlement».
Dans les travées, c'est l'émoi. Et plus encore quand M. Bouzoubaâ livre les détails de l'opprobre.
L'instruction va concerner 44 députés et 35 conseillers qui ont changé d'étiquette politique alors qu'ils ont été élus aux législatives ou aux municipales sous une autre couleur. Le nombre de ces parlementaires indélicats est du reste provisoire. Il peut même être revu à la hausse. En effet, à la deuxième Chambre –encore elle- une quinzaine de conseillers sont toujours sans couleur, ne sachant probablement à quel parti se vouer.
« L'enquête devrait prouver si ces parlementaires ont reçu ou non de l'argent pour changer d'étiquette politique. Si tel est le cas, ils seront poursuivis devant la justice pour corruption. Et s'ils ont changé de parti sans contrepartie financière, cela porte un nom : la trahison de la confiance, et le code pénal prévoit dans ce cas des sanctions », explique celui qui préside aux destinées de la Justice.
A l'USFP, parti du rang duquel provient Mohamed Bouzoubaâ, on soutient à plein régime le ministre socialiste. « Le cas des transfuges illustre parfaitement une irrégularité qui menace la société. Car au moment où le citoyen donne sa voix à un candidat aux élections législatives qui s'est présenté sous une couleur politique bien définie, il fait un choix qui a une répercussion sur la situation politique du pays puisqu'il donne sa confiance à la fois au candidat et à la formation politique qui l'a accrédité. Ce qui signifie que si le candidat change de camp politique en contrepartie d'un pot-de-vin, il aura trahi la confiance du citoyen qui l'a élu.
Il tombe donc sous le coup de la loi puisqu'il aura commis un abus de confiance», déclarait Mohamed Mrini, récent membre du comité central de l'USFP et… transfuge du PSD.
Prouver la corruption
Le parlementaire est-il seul coupable de ces pratiques malhonnêtes qui ont entaché la vie politique sous nos cieux ? Pas tout à fait car aussi bien l'Etat que les partis politiques ont trop longtemps laissé faire. Aucun parti n'a résisté à la tentation de la transhumance, y compris ses plus farouches adversaires, comme l'USFP par exemple qui n'a pas hésité à recruter ailleurs pour former son groupe parlementaire à la Chambre des conseillers. « Il faut chercher les raisons du côté des conflits personnels. Souvent, le nomadisme est provoqué pour des raisons futiles. Et l'absence de l'opinion publique laisse libre cours à ces agissements qui, du coup, ne sont pas sanctionnés. Comment alors rappeler aux hommes politiques qu'ils sont comptables de leurs actes ? » s'interroge un membre dirigeant de la Koutla.
Plus que d'autres, des partis de la place se sont fait champion du recrutement (avec contrepartie ? ) de parlementaires. Désormais sous les feux des projecteurs et dans le collimateur de la justice depuis la déclaration ministérielle, ils donnent aujourd'hui de la voix. « La caravane passe et les chiens aboient » s'est écrié, sur les colonnes d'ALM, le patron de l'Union démocratique, parti devenu maître dans la récupération d'élus. « Si quelqu'un m'accuse de quoi que ce soit je me ferais un plaisir de le poursuivre (…) Sans flagrant délit, il est impossible de prouver une corruption ».
Faut-il aller vite en besogne et parler de complot « contre ces nouvelles formations politiques qui dérangent et dont ne veulent pas les anciens partis » ? Il est évident que cette thèse ne résiste pas à la démonstration et ne permet que de mettre la poussière sous le tapis, le temps que l'orage passe.
Un Etat de droit en construction et une démocratie en devenir peuvent-ils souffrir et tolérer des pratiques délictuelles qui portent un nom : celui de la corruption ? L'institution législative pouvait-elle continuer à se transformer à chaque rentrée parlementaire en une vente aux enchères, où les seuls arguments valables sont sonnants et trébuchants? Le nomadisme politique allait-il être le seul signe extérieur de la vie politique en terre marocaine ? Le ministre de la Justice a tranché là où le Conseil constitutionnel s'est montré frileux en refusant l'amendement introduit dans le règlement intérieur de la Chambre des conseillers portant l'interdiction de la transhumance, « au nom de la liberté individuelle ». A la notion de liberté, Bouzoubaâ a préféré honnêteté et confiance.
Le décor est planté pour mieux annoncer la couleur. La diatribe du responsable gouvernemental contre ces élus qui se font acheter, passant d'un parti à l'autre et d'une idéologie à l'autre, sans coup férir mais au plus offrant, a tonné comme un orage.
« Il est regrettable d'entendre qu'au sein même du Parlement, il y a vente, achat, corruption et passage d'un parti à un autre en contrepartie de sommes d'argent. Ce qui porte atteinte à la crédibilité des institutions législatives et à la politique générale de l'Etat.
Comment est-ce que des personnes peuvent se permettre de recevoir des contreparties pour passer d'une formation politique à une autre et trahir ainsi la confiance des citoyens et celle des partis qui les ont accrédités afin qu'ils défendent leur programme au sein du Parlement».
Dans les travées, c'est l'émoi. Et plus encore quand M. Bouzoubaâ livre les détails de l'opprobre.
L'instruction va concerner 44 députés et 35 conseillers qui ont changé d'étiquette politique alors qu'ils ont été élus aux législatives ou aux municipales sous une autre couleur. Le nombre de ces parlementaires indélicats est du reste provisoire. Il peut même être revu à la hausse. En effet, à la deuxième Chambre –encore elle- une quinzaine de conseillers sont toujours sans couleur, ne sachant probablement à quel parti se vouer.
« L'enquête devrait prouver si ces parlementaires ont reçu ou non de l'argent pour changer d'étiquette politique. Si tel est le cas, ils seront poursuivis devant la justice pour corruption. Et s'ils ont changé de parti sans contrepartie financière, cela porte un nom : la trahison de la confiance, et le code pénal prévoit dans ce cas des sanctions », explique celui qui préside aux destinées de la Justice.
A l'USFP, parti du rang duquel provient Mohamed Bouzoubaâ, on soutient à plein régime le ministre socialiste. « Le cas des transfuges illustre parfaitement une irrégularité qui menace la société. Car au moment où le citoyen donne sa voix à un candidat aux élections législatives qui s'est présenté sous une couleur politique bien définie, il fait un choix qui a une répercussion sur la situation politique du pays puisqu'il donne sa confiance à la fois au candidat et à la formation politique qui l'a accrédité. Ce qui signifie que si le candidat change de camp politique en contrepartie d'un pot-de-vin, il aura trahi la confiance du citoyen qui l'a élu.
Il tombe donc sous le coup de la loi puisqu'il aura commis un abus de confiance», déclarait Mohamed Mrini, récent membre du comité central de l'USFP et… transfuge du PSD.
Prouver la corruption
Le parlementaire est-il seul coupable de ces pratiques malhonnêtes qui ont entaché la vie politique sous nos cieux ? Pas tout à fait car aussi bien l'Etat que les partis politiques ont trop longtemps laissé faire. Aucun parti n'a résisté à la tentation de la transhumance, y compris ses plus farouches adversaires, comme l'USFP par exemple qui n'a pas hésité à recruter ailleurs pour former son groupe parlementaire à la Chambre des conseillers. « Il faut chercher les raisons du côté des conflits personnels. Souvent, le nomadisme est provoqué pour des raisons futiles. Et l'absence de l'opinion publique laisse libre cours à ces agissements qui, du coup, ne sont pas sanctionnés. Comment alors rappeler aux hommes politiques qu'ils sont comptables de leurs actes ? » s'interroge un membre dirigeant de la Koutla.
Plus que d'autres, des partis de la place se sont fait champion du recrutement (avec contrepartie ? ) de parlementaires. Désormais sous les feux des projecteurs et dans le collimateur de la justice depuis la déclaration ministérielle, ils donnent aujourd'hui de la voix. « La caravane passe et les chiens aboient » s'est écrié, sur les colonnes d'ALM, le patron de l'Union démocratique, parti devenu maître dans la récupération d'élus. « Si quelqu'un m'accuse de quoi que ce soit je me ferais un plaisir de le poursuivre (…) Sans flagrant délit, il est impossible de prouver une corruption ».
Faut-il aller vite en besogne et parler de complot « contre ces nouvelles formations politiques qui dérangent et dont ne veulent pas les anciens partis » ? Il est évident que cette thèse ne résiste pas à la démonstration et ne permet que de mettre la poussière sous le tapis, le temps que l'orage passe.
Un Etat de droit en construction et une démocratie en devenir peuvent-ils souffrir et tolérer des pratiques délictuelles qui portent un nom : celui de la corruption ? L'institution législative pouvait-elle continuer à se transformer à chaque rentrée parlementaire en une vente aux enchères, où les seuls arguments valables sont sonnants et trébuchants? Le nomadisme politique allait-il être le seul signe extérieur de la vie politique en terre marocaine ? Le ministre de la Justice a tranché là où le Conseil constitutionnel s'est montré frileux en refusant l'amendement introduit dans le règlement intérieur de la Chambre des conseillers portant l'interdiction de la transhumance, « au nom de la liberté individuelle ». A la notion de liberté, Bouzoubaâ a préféré honnêteté et confiance.
