Le titre en rappelle immédiatement au autre : Et Dieu créa la femme, film de Roger Vadim sorti en 1956. Les jeunes Brigitte Bardot et Jean-Louis Trintignant se jouaient une comédie amoureuse jugée “ torride ” à l'époque. En marquant le début de l'émancipation sexuelle de la femme, incarné par une B.B qui installait son mythe via sa grâce féline et sa moue légendaire, le film eut un impact sociologique considérable en France. Rien à voir, a priori, avec Et l'homme créa la femme, comédie fantastique de Frank Oz (In & Out, The Score) à l'affiche au Maroc et en France depuis la semaine dernière.
Sauf que le titre français n'est pas complètement innocent : Frank Oz s'est inspiré du best-seller d'Ira Levin, The Stepford Wives, et de son adaptation au cinéma (en 1975) qui furent considérés aux Etats-Unis comme une “ réplique à la première vague féministe américaine des années soixante-dix. ” Que sont devenus, trente ans plus tard, les matériaux de cette révolution ?
D'après Paul Rudnick, scénariste de Et l'homme créa la femme, “ Les femmes sont désormais en mesure d'exercer un vrai pouvoir. Elles ont accompli d'immenses progrès, que leurs compagnons ont parfois du mal à accepter. ” Telle est la trame principale du film : les femmes ont dépassé leurs compagnons. Plus brillantes, plus efficaces, elles gagnent de plus gros salaires qu'eux et parviennent même à les battre au tennis ! Frappés dans leur virilité, les hommes sont relégués aux rangs d'adjudants de ces nouveaux capitaines.
Comme exemple type de ce fait de société, Frank Oz a choisi une directrice de chaîne de télévision productrice de reality show à sensation. Lors d'une soirée de gala, la célèbre Joanna (Nicole Kidman) se fait tirer dessus par un participant mécontent. Explication : la successfull woman est tellement détestable que tout le monde cherche à la supprimer. A commencer par la chaîne elle-même qui, les lois du marché ne pardonnant pas, la licencie en moins de deux. Pour enrayer la dépression nerveuse qui s'ensuit et relancer leur mariage qui, forcément, bat de l'aile, Walter (Matthew Broderick) son “ gentil mari ”, lui propose de changer de vie. Le couple quitte donc l'effervescence de Manhattan avec leurs deux bambins pour s'installer dans le Connecticut, à Stepford.
Une ville modèle, pomponnée par des bonnes fées, Glenn Close et Christopher Walken, comme sur un dépliant de villages-vacances, : «La banlieue américaine parfaite, le summum du rêve bourgeois, avec ses superbes résidences, ses voitures de sport, ses mères parfaites, ses enfants à la conduite irréprochable, ses pères heureux...» selon Paul Rudnick. Rêve ou cauchemar ? Dans des maisons entièrement automatisées, les mères passent leur temps à briquer les surfaces ou concocter des cookies pour leurs enfants sans quitter leur robe à fleurs pendant que leurs maris se retrouvent dans leur club particulier où ils tirent sur de gros cigares dans des fauteuils en cuir en jouant aux voitures téléguidées.
Walter s'y sent comme un coq en pâte, mais Joanna, pourtant sommée de changer de comportement, est bien obligée de remarquer un certain nombre de détails inquiétants : à Stepford, “ le paradis des familles, sans drogue et sans crimes ”, toutes les femmes sont des “ bimbos sexies ” mariées à des “ vieux libidineux ”. Des épouses modèles, en somme, voire même modélisées …
Femme cerveau
ou femme robot ?
L'intérêt de Et l'homme créa la femme est d'avoir marié la satire au fantastique : l'irruption de phénomènes paranormaux dans cet univers lisse et laqué reproduisant les stéréotypes des années cinquante avec tout l'attirail électroménager qui l'accompagne, est assez réjouissante. Il y un petit air revanchard : la femme-cerveau contre la femme-robot. Et une vague critique du rêve américain assorti de sa surenchère consumériste et de sa quête de la perfection familiale. Mais le soufflet s'écrase : Nicole Kidman est exaspérante de grimaces et Frank Oz manque de dents. Tout signe de désordre et de disfonctionnement est immédiatement assimilé à une preuve de résistance.
Manhattan est cantonnée à son image de royaume pour carriéristes friqués et inhumains. La télévision est uniquement perçue comme outil de propagation de schémas machistes et rétrogrades. Enfin, il n'y a, bien sûr, pas de droit à la différence dans la “ ville parfaite ” qui reste dévolue aux blondes siliconées… Les tirs sont d'une facilité saumâtre, mais surtout, il a beau insérer un couple gay à Stepford, le réalisateur échoue à moderniser le sujet. Sa peinture d'une Amérique engluée dans des rêves factices et dépassés est plutôt crédible et parfois même agréablement sarcastique.
Mais le propos reste malheureusement bien conventionnel : la charge est si légère qu'elle finit par servir de nouvelles normes. Sans compter que, entre quelques lancers potaches, le montage ne parvient pas à masquer les incohérences provoquées par un série de réécritures successives. Dire que le génial Tim Burton a longtemps été pressenti pour réaliser ce film…
Microsoft et le Connecticut en prendront pour leur grade mais les spectateurs à la recherche de nouvelles pistes resteront sur leur faim. Deux questions ayant été balayées rapidement : quid de la nouvelle place des hommes ? Et surtout : quid de la portée des reality show ? A celui qui trouvera consternants les personnages du film, il faudra rappeler que les amateurs de La Ferme des Célébrités, Nice People, Koh-Lanta, Marjolaine et les Millionnaires et autres merveilles de la télévision actuelle, présentent des symptômes comparables à ceux des habitants de Stepford.
Et l'homme créa la femme (The Stepford wives). Film américain de Frak Oz, avecNicole Kidman, Matthew Broderick, Bette Mideler, Jon Lovitz, Christopher Walken, Glenn Glose.
Sauf que le titre français n'est pas complètement innocent : Frank Oz s'est inspiré du best-seller d'Ira Levin, The Stepford Wives, et de son adaptation au cinéma (en 1975) qui furent considérés aux Etats-Unis comme une “ réplique à la première vague féministe américaine des années soixante-dix. ” Que sont devenus, trente ans plus tard, les matériaux de cette révolution ?
D'après Paul Rudnick, scénariste de Et l'homme créa la femme, “ Les femmes sont désormais en mesure d'exercer un vrai pouvoir. Elles ont accompli d'immenses progrès, que leurs compagnons ont parfois du mal à accepter. ” Telle est la trame principale du film : les femmes ont dépassé leurs compagnons. Plus brillantes, plus efficaces, elles gagnent de plus gros salaires qu'eux et parviennent même à les battre au tennis ! Frappés dans leur virilité, les hommes sont relégués aux rangs d'adjudants de ces nouveaux capitaines.
Comme exemple type de ce fait de société, Frank Oz a choisi une directrice de chaîne de télévision productrice de reality show à sensation. Lors d'une soirée de gala, la célèbre Joanna (Nicole Kidman) se fait tirer dessus par un participant mécontent. Explication : la successfull woman est tellement détestable que tout le monde cherche à la supprimer. A commencer par la chaîne elle-même qui, les lois du marché ne pardonnant pas, la licencie en moins de deux. Pour enrayer la dépression nerveuse qui s'ensuit et relancer leur mariage qui, forcément, bat de l'aile, Walter (Matthew Broderick) son “ gentil mari ”, lui propose de changer de vie. Le couple quitte donc l'effervescence de Manhattan avec leurs deux bambins pour s'installer dans le Connecticut, à Stepford.
Une ville modèle, pomponnée par des bonnes fées, Glenn Close et Christopher Walken, comme sur un dépliant de villages-vacances, : «La banlieue américaine parfaite, le summum du rêve bourgeois, avec ses superbes résidences, ses voitures de sport, ses mères parfaites, ses enfants à la conduite irréprochable, ses pères heureux...» selon Paul Rudnick. Rêve ou cauchemar ? Dans des maisons entièrement automatisées, les mères passent leur temps à briquer les surfaces ou concocter des cookies pour leurs enfants sans quitter leur robe à fleurs pendant que leurs maris se retrouvent dans leur club particulier où ils tirent sur de gros cigares dans des fauteuils en cuir en jouant aux voitures téléguidées.
Walter s'y sent comme un coq en pâte, mais Joanna, pourtant sommée de changer de comportement, est bien obligée de remarquer un certain nombre de détails inquiétants : à Stepford, “ le paradis des familles, sans drogue et sans crimes ”, toutes les femmes sont des “ bimbos sexies ” mariées à des “ vieux libidineux ”. Des épouses modèles, en somme, voire même modélisées …
Femme cerveau
ou femme robot ?
L'intérêt de Et l'homme créa la femme est d'avoir marié la satire au fantastique : l'irruption de phénomènes paranormaux dans cet univers lisse et laqué reproduisant les stéréotypes des années cinquante avec tout l'attirail électroménager qui l'accompagne, est assez réjouissante. Il y un petit air revanchard : la femme-cerveau contre la femme-robot. Et une vague critique du rêve américain assorti de sa surenchère consumériste et de sa quête de la perfection familiale. Mais le soufflet s'écrase : Nicole Kidman est exaspérante de grimaces et Frank Oz manque de dents. Tout signe de désordre et de disfonctionnement est immédiatement assimilé à une preuve de résistance.
Manhattan est cantonnée à son image de royaume pour carriéristes friqués et inhumains. La télévision est uniquement perçue comme outil de propagation de schémas machistes et rétrogrades. Enfin, il n'y a, bien sûr, pas de droit à la différence dans la “ ville parfaite ” qui reste dévolue aux blondes siliconées… Les tirs sont d'une facilité saumâtre, mais surtout, il a beau insérer un couple gay à Stepford, le réalisateur échoue à moderniser le sujet. Sa peinture d'une Amérique engluée dans des rêves factices et dépassés est plutôt crédible et parfois même agréablement sarcastique.
Mais le propos reste malheureusement bien conventionnel : la charge est si légère qu'elle finit par servir de nouvelles normes. Sans compter que, entre quelques lancers potaches, le montage ne parvient pas à masquer les incohérences provoquées par un série de réécritures successives. Dire que le génial Tim Burton a longtemps été pressenti pour réaliser ce film…
Microsoft et le Connecticut en prendront pour leur grade mais les spectateurs à la recherche de nouvelles pistes resteront sur leur faim. Deux questions ayant été balayées rapidement : quid de la nouvelle place des hommes ? Et surtout : quid de la portée des reality show ? A celui qui trouvera consternants les personnages du film, il faudra rappeler que les amateurs de La Ferme des Célébrités, Nice People, Koh-Lanta, Marjolaine et les Millionnaires et autres merveilles de la télévision actuelle, présentent des symptômes comparables à ceux des habitants de Stepford.
Et l'homme créa la femme (The Stepford wives). Film américain de Frak Oz, avecNicole Kidman, Matthew Broderick, Bette Mideler, Jon Lovitz, Christopher Walken, Glenn Glose.
