La campagne présidentielle dominée par les affaires internationales
La présidentielle américaine 2004 a été inhabituellement dominée par les sujets internationaux comme le terrorisme et la guerre en Irak, thèmes principaux des attaques du démocrate John Kerry contre le bilan du président républicain sortant George W. Bush.
"Je suis surpris, non pas tant de la part du président Bush, qui avait tout à jouer sur ce qu'il appelle la guerre contre le terrorisme, y compris l'Irak et l'Afghanistan", souligne Stephen Hess, expert de la Brookings Institution à Washington et auteur de plusieurs livres sur la présidence américaine.
"Mais je suis surpris de la détermination avec laquelle John Kerry semble avoir mis tous ses oeufs dans le même panier. Une fois que l'élection sera terminée, les responsables de sa campagne diront, s'il gagne, que c'était un choix brillant, ou, s'il perd, qu'ils se sont trompés", ajoute-t-il.
L'apparition du chef de l'organisation terroriste Al-Qaïda vendredi dans une vidéo où il menace les Américains de nouveaux attentats, a renforcé le poids de ces thèmes avant le scrutin de mardi.
John Kerry attaquait déjà sans relâche George W. Bush sur l'Irak, affirmant que la disparition d'explosifs dans un dépôt de munitions près de Bagdad symbolise l'échec de l'administration républicaine à stabiliser ce pays après avoir renversé Saddam Hussein.
Les deux hommes s'accusent mutuellement d'être incapables de diriger le pays dans le climat de crise internationale provoqué par les attentats terroristes commis en septembre 2001 par Al-Qaïda aux Etats-Unis.
"Sur les grandes questions de notre époque concernant la sécurité, il a constamment eu tort", lance M. Bush à l'encontre de son adversaire. Le président sortant "n'est pas parvenu à sécuriser l'Irak ni à l'empêcher de devenir ce qu'il est devenu aujourd'hui, un havre pour les terroristes", rétorque celui-ci.
Les questions de politique intérieure - économie, retraites, assurance-santé - passent au second plan alors qu'elles sont d'ordinaire les principaux thèmes des campagnes présidentielles américaines.
Il faut remonter aux élections de 1968 et de 1972, lorsque les Etats-Unis menaient la guerre du Vietnam, pour retrouver un tel climat. Toutes les deux avaient été remportées par le républicain Richard Nixon.
"En 1968, il n'y avait pas de président sortant", rappelle Stephen Hess. Le démocrate Lyndon Johnson avait choisi de ne pas se représenter au terme de son premier mandat, laissant la place libre à son vice-président Hubert Humphrey, qui avait perdu de justesse.
"En 1972, le président sortant était Nixon et son adversaire démocrate (George McGovern) était un candidat de la paix qui a été battu à plate couture car il s'est retrouvé du mauvais côté du sentiment patriotique. John Kerry ne s'est pas laissé piéger", souligne l'expert du Brookings Institution.
Pour le camp Bush, détourner l'attention d'une situation économique morose et de sujets sociaux qui divisent l'Amérique n'est peut-être pas mauvaise chose.
Mais les mauvaises nouvelles ont été nombreuses pour lui ces derniers jours.
Outre la disparition des explosifs, le FBI mène une enquête sur un contrat en Irak de plusieurs milliards de dollars passé sans appel d'offre à une filiale d'Halliburton. Cette entreprise de services pétroliers était dirigée par son vice-président Dick Cheney avant son arrivée au pouvoir.
Les déclarations d'Oussama ben Laden pourraient "jouer pour un côté comme pour l'autre", estime Michael O'Hanlon, expert pour les questions de Défense au Brookings Institution, estimant toutefois qu'un réflexe de crainte des électeurs pourrait favoriser Bush.
Selon Allan Lichtman, professeur en sciences politiques à l'American University à Washington, "tout ce qui détourne le débat de l'Irak est bon pour Bush".
