Ceci étant, il ne faut pas oublier l'impact des théologiens et surtout des petits imams de la mosquée du coin qui sont en contact permanent avec la masse des fidèles.
Ce sont ces imams qui transmettent leur perception du Coran aux musulmans et, ce faisant, structurent leur pensée et leur comportement des musulmans qui leur dictent le type d'attitude ou de pensée qu'ils devraient avoir face à telle ou telle question, selon leur propre lecture, le plus souvent rétrograde, du texte coranique. Ce sont eux par exemple qui délimitent le champ du licite et de l'illicite, du bien et du mal.
C'est le premier facteur qui fait que l'Islam, cette grande religion, en ce sens qu'elle est porteuse d'une immense culture humaniste, soit aujourd'hui perçu comme vecteur d'intolérance, d'exclusion, d'oppression de l'individu et en particulier de la femme et que le monde musulman comme foyer du despotisme.
Le second facteur, c'est la mainmise sur l'Islam par les frères musulmans depuis le début du siècle dernier et bien avant. Les grands prédicateurs et les théologiens de renom ont été soit des frères musulmans, soit imprégnés par le discours des frères musulmans qui ont squatté l'Islam en imposant leur propre vision au reste des musulmans, et en parlant en leur nom.
Il y a un troisième facteur : le monde arabe a vécu sous la domination de l'empire ottoman, un empire particulièrement despotique qui a rendu impossible toute indépendance intellectuelle et contribué ainsi à l'appauvrissement de la pensée critique.
C'est pourquoi je milite pour un Islam des lumières qui renoue avec la pensée critique qui fait siennes les valeurs de notre époque et ouvre la voie à la modernité.
C'est le même combat que mènent un certain nombre de chercheurs dont Mohamed Arkoun qui n'a cessé de marteler, et ce depuis une quarantaine d'année, la nécessité de distinguer l'histoire symbolique de l'Islam et de l'histoire réelle et de mettre à profit les sciences humaines et l'anthropologie dans l'étude de la pensée islamique.
C'est le même combat, effectivement, celui de la raison. Voilà pourquoi je suis en train de préparer le terrain pour la création d'une fondation pour un islam des Lumières qui réunira des intellectuels d'origine musulmane de tous les horizons afin de mettre en valeur une autre image de l'islam que celle que donnent les théologiens intégristes, et dire au monde que nous ne sommes pas des barbares, nous avons un patrimoine culturel de valeur qui est d'un grand apport à l'humanité. C'est de cet islam des Lumières qu'il s'agit.
L'image de l'islam tel qu'il est représenté actuellement est le reflet de la réalité des musulmans, et vous l'expliquez dans votre livre en mettant la lumière sur la pauvreté, le despotisme, le sous-développement en résumé. Effectivement, l'Islam est ce que sont les musulmans.
Oui, je n'ai pas cité tous les facteurs qui ont conduit à l'appauvrissement de l'islam tel qu'on le voit aujourd'hui. Certainement, les causes endogènes interviennent dans ce processus, tel le système éducatif qui ne cultive pas l'intelligence, la curiosité, l'esprit critique et le plaisir du travail. Les potentialités naturelles et humaines sont énormes dans le monde de l'islam mais ils sont mal exploitées.
Mais à la base de cela, il faut cultiver les valeurs de respect de la dignité humaine dans les rapports sociales entre hommes et femmes, entre filles et garçons et entre l'Etat et les citoyens.
Ce sont là quelques unes des vingt-sept propositions que vous formulez en vue d'une réforme dans le monde arabo-musulman, et dont la dernière les résume toutes. Il s'agit du développement de la formation et du savoir.
Oui, je pense qu'aucune mutation dans le monde arabo-musulman n'est possible sans les musulmans. Nous en avons parlé, il n'y a pas un Islam abstrait qui serait idéal, merveilleux, plus juste et plus équitable qu'un autre moins bien, celui que vivent les musulmans. L'islam, ce sont les musulmans qui le présentent, il est à leur image. Dans une société où la formation est développée, où le savoir est une valeur que l'on cultive, vous aurez forcément un islam de tolérance et de paix, un Islam de lumière qui fait siennes les valeurs de liberté, de respect de la dignité humaine etc.
Que pensez-vous de la réticence de la Ligue arabe à l'égard de la démocratie ?
Oui, ces réticences s'expliquent par le fait que se sont les Etats-Unis qui sont derrière la proposition de réformes. Maintenant, on dit : «oui, nous sommes pour les réformes mais sans ingérence extérieure». Il faut se poser la question : pourquoi avoir attendu que les autres viennent vous bousculer, pourquoi ne pas avoir penser aux réformes bien avant ? Par ailleurs, je ne pense pas que la démocratie dans le monde arabe viendra de la Ligue arabe, les objectifs des uns et des autres des 22 membres sont tellement contradictoires, les intérêts tellement divergents qu'ils ne peuvent se mettre d'accord que sur le minimum qu'ils s'empressent d'oublier d'ailleurs. Ma conviction est que la Ligue arabe n'a plus de raison d'être.
Au vu de l'actualité, on dirait que le pétrole est en fait une malédiction, car là où il y en a-il y a aussi la guerre, la pauvreté et des problèmes politiques insolubles.
C'est malheureusement vrai. Tout ça parce que ces pays n'ont pas développé le savoir qui est la vraie richesse. Ils n'ont pas développé les ressources humaines, ils se sont accrochés à des interprétations étriquées de l'Islam. Or, aujourd'hui, il est nécessaire de préparer l'après pétrole.
Ce sont ces imams qui transmettent leur perception du Coran aux musulmans et, ce faisant, structurent leur pensée et leur comportement des musulmans qui leur dictent le type d'attitude ou de pensée qu'ils devraient avoir face à telle ou telle question, selon leur propre lecture, le plus souvent rétrograde, du texte coranique. Ce sont eux par exemple qui délimitent le champ du licite et de l'illicite, du bien et du mal.
C'est le premier facteur qui fait que l'Islam, cette grande religion, en ce sens qu'elle est porteuse d'une immense culture humaniste, soit aujourd'hui perçu comme vecteur d'intolérance, d'exclusion, d'oppression de l'individu et en particulier de la femme et que le monde musulman comme foyer du despotisme.
Le second facteur, c'est la mainmise sur l'Islam par les frères musulmans depuis le début du siècle dernier et bien avant. Les grands prédicateurs et les théologiens de renom ont été soit des frères musulmans, soit imprégnés par le discours des frères musulmans qui ont squatté l'Islam en imposant leur propre vision au reste des musulmans, et en parlant en leur nom.
Il y a un troisième facteur : le monde arabe a vécu sous la domination de l'empire ottoman, un empire particulièrement despotique qui a rendu impossible toute indépendance intellectuelle et contribué ainsi à l'appauvrissement de la pensée critique.
C'est pourquoi je milite pour un Islam des lumières qui renoue avec la pensée critique qui fait siennes les valeurs de notre époque et ouvre la voie à la modernité.
C'est le même combat que mènent un certain nombre de chercheurs dont Mohamed Arkoun qui n'a cessé de marteler, et ce depuis une quarantaine d'année, la nécessité de distinguer l'histoire symbolique de l'Islam et de l'histoire réelle et de mettre à profit les sciences humaines et l'anthropologie dans l'étude de la pensée islamique.
C'est le même combat, effectivement, celui de la raison. Voilà pourquoi je suis en train de préparer le terrain pour la création d'une fondation pour un islam des Lumières qui réunira des intellectuels d'origine musulmane de tous les horizons afin de mettre en valeur une autre image de l'islam que celle que donnent les théologiens intégristes, et dire au monde que nous ne sommes pas des barbares, nous avons un patrimoine culturel de valeur qui est d'un grand apport à l'humanité. C'est de cet islam des Lumières qu'il s'agit.
L'image de l'islam tel qu'il est représenté actuellement est le reflet de la réalité des musulmans, et vous l'expliquez dans votre livre en mettant la lumière sur la pauvreté, le despotisme, le sous-développement en résumé. Effectivement, l'Islam est ce que sont les musulmans.
Oui, je n'ai pas cité tous les facteurs qui ont conduit à l'appauvrissement de l'islam tel qu'on le voit aujourd'hui. Certainement, les causes endogènes interviennent dans ce processus, tel le système éducatif qui ne cultive pas l'intelligence, la curiosité, l'esprit critique et le plaisir du travail. Les potentialités naturelles et humaines sont énormes dans le monde de l'islam mais ils sont mal exploitées.
Mais à la base de cela, il faut cultiver les valeurs de respect de la dignité humaine dans les rapports sociales entre hommes et femmes, entre filles et garçons et entre l'Etat et les citoyens.
Ce sont là quelques unes des vingt-sept propositions que vous formulez en vue d'une réforme dans le monde arabo-musulman, et dont la dernière les résume toutes. Il s'agit du développement de la formation et du savoir.
Oui, je pense qu'aucune mutation dans le monde arabo-musulman n'est possible sans les musulmans. Nous en avons parlé, il n'y a pas un Islam abstrait qui serait idéal, merveilleux, plus juste et plus équitable qu'un autre moins bien, celui que vivent les musulmans. L'islam, ce sont les musulmans qui le présentent, il est à leur image. Dans une société où la formation est développée, où le savoir est une valeur que l'on cultive, vous aurez forcément un islam de tolérance et de paix, un Islam de lumière qui fait siennes les valeurs de liberté, de respect de la dignité humaine etc.
Que pensez-vous de la réticence de la Ligue arabe à l'égard de la démocratie ?
Oui, ces réticences s'expliquent par le fait que se sont les Etats-Unis qui sont derrière la proposition de réformes. Maintenant, on dit : «oui, nous sommes pour les réformes mais sans ingérence extérieure». Il faut se poser la question : pourquoi avoir attendu que les autres viennent vous bousculer, pourquoi ne pas avoir penser aux réformes bien avant ? Par ailleurs, je ne pense pas que la démocratie dans le monde arabe viendra de la Ligue arabe, les objectifs des uns et des autres des 22 membres sont tellement contradictoires, les intérêts tellement divergents qu'ils ne peuvent se mettre d'accord que sur le minimum qu'ils s'empressent d'oublier d'ailleurs. Ma conviction est que la Ligue arabe n'a plus de raison d'être.
Au vu de l'actualité, on dirait que le pétrole est en fait une malédiction, car là où il y en a-il y a aussi la guerre, la pauvreté et des problèmes politiques insolubles.
C'est malheureusement vrai. Tout ça parce que ces pays n'ont pas développé le savoir qui est la vraie richesse. Ils n'ont pas développé les ressources humaines, ils se sont accrochés à des interprétations étriquées de l'Islam. Or, aujourd'hui, il est nécessaire de préparer l'après pétrole.
