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Entretien avec Saïd Qodaïd, artiste-peintre : «Je rends un hommage nostalgique

Né à Rabat, le 28 octobre 1965, Saïd Qodaïd a suivi la longue filière et le cursus nécessaire pour devenir plasticien et graphiste-designer. Ses activités plastiques sont marquées par une pratique de la peinture figurative. Diplômé de l'Ecole nationale d

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Saïd Qodaïd est plutôt connu à Rabat où il a exposé à maintes reprises ses toiles. Le choix de Casablanca, cette fois-ci, n'est pas fortuit ; n'est-ce pas ?

C'est vrai que j'ai exposé plusieurs fois à Rabat, mais aussi dans d'autres villes du Maroc et à l'étranger. Le secret réside dans le fait que je suis natif de Rabat en 1965. Je suis également lauréat de l'Ecole nationale des beaux arts de Tétouan en 1990 où j'ai pu décrocher un diplôme d'art graphique. Depuis, j'ai pu organiser diverses expositions picturales aussi bien à Rabat qu'à Casablanca, Marrakech, Tétouan, Ouarzazate, Tanger, Marbella (Espagne) et à Paris (France).

Vous exposez pour la troisième fois à la galerie «Le chevalet» de Casablanca. Mais chaque fois, vous faites sortir un style propre à Saïd Qodaïd. Quel est le concept plastique de votre exposition rétrospective actuelle ?

Le concept plastique de cette exposition est un travail très chromatique qui atteint parfois le spirituel, un style qui frôle simultanément l'art abstrait et figuratif. Je m'intéresse surtout à la figuration des scènes d'un Maroc pur . C'est d'après une vision personnelle et un nouveau style qui prend racine de mon propre univers dans lequel je vis, que je réalise mes toiles. Dans ma peinture, j'essaie de capturer cette vertu propre au patrimoine marocain.

Les couleurs sont peintes à l'huile. Mon principal travail repose sur la relation entre la lumière et la figuration. J'essaie d'exploiter au maximum la lumière. Le message est véhiculé à travers cette appréhension à la fois de l'espace, de la matière, de la lumière et de la couleur qui donne une autre dimension à cette recherche de la perfection, marquée par la rigueur.

Quels sont les sujets que vous abordez dans vos œuvres ?

Mes sujets s'intéressent à la vie quotidienne de ce «Maroc perdu» qui privilégie les traditions, les mœurs et les usages. C'est une sorte de réconciliation et de bonne entente avec soi-même. Je cherche toujours dans ce patrimoine culturel et naturel la dimension humaine dans son ensemble. Si jamais nous nous lançons dans ce jeu de faire une comparaison entre le Maroc d'hier et celui d'aujourd'hui, nous constatons que nous sommes entrain de gérer des contradictions. Plusieurs choses sont importées de l'extérieur.

Ce qui n'est pas sans conséquences sur notre culture qui se nourrit de cette diversité, à la fois culturelle et civilisationnelle. Ma peinture reflète un certain retour au passé. Pas dans le sens nostalgique du terme. Mais dans le sens d'une relecture de ce passé riche d'enseignements qui nous permet de mieux entreprendre l'avenir. Pour moi, le «Maroc perdu» exprime la perte, quelque part, de certaines valeurs et certains comportements humains. Si vous voulez insister sur certains détails de ce Maroc, vous allez trouver que plusieurs choses ont disparu. Entre l'ancienne médina et la ville moderne, il y a une grande différence.

Dans l'ancienne médina, il existe certaines choses que nous avons laissé disparaître, tandis que d'autres sont toujours conservées. Par contre, nous avons adopté un nouvel aspect de vie, que ce soit dans notre façon de nous habiller ou dans nos traditions ancestrales.

Dans mes œuvres, je rends un hommage nostalgique aux traditions, tout en essayant de composer positivement avec le présent.

Dans la peinture de Saïd Qodaïd, On sent que l'artiste est inspiré par une école ou un peintre de renommée internationale ?

Effectivement, au début de ma carrière, j'étais inspiré par plusieurs écoles dont l'impressionniste ou celle du fauvisme, avant d'avoir mon propre style.
Le fait d'avoir côtoyé des professeurs de haut niveau m'a permis de voir plus clair. Leurs rôles à l'Ecole nationale des beaux arts de Tétouan, par exemple, était plutôt un rôle d'encadrement. Parmi ces professeurs, je cite Seffaje et M'ghara.

Maintenant, j'essaie de donner une bonne image de ce qu'est le Maroc d'aujourd'hui. Une image différente de l'image folklorique qu'on cherche souvent à la faire coller à ce pays. L'image du Maroc n'est pas du tout folklorique. C'est pourquoi, je peints un Maroc différent de la vision du touriste. Un Maroc original, pur, avec sa nature, son architecture, ses mœurs et ses traditions. Un Maroc où il y a place à la convivialité d'abord et à cette chaleur de vivre en société.

Que pensez-vous de la situation des arts plastiques au Maroc ?

Le mouvement des arts plastiques au Maroc est très développé, par rapport à ce qui se passe dans le monde arabe.
C'est vrai que les expériences sont éparses. Mais, je peux vous dire qu'au Maroc, il y a une grande richesse artistique dans ce domaine. Aujourd'hui, avec l'adoption du statut de l'artiste, la situation va probablement s'améliorer.

Il ne faut pas oublier que le domaine artistique vivait depuis longtemps dans l'anarchie totale, car il n'était jamais structuré. Le fait de reconsidérer son statut dans la société constitue une reconnaissance à tous les niveaux à des gens qui participent amplement à l'évolution du pays. Aussi, le fait de reconnaître aux artistes de jouir de leurs droits sociaux est une victoire et une réparation de l'erreur. Grâce à ce statut, nous aurons une structure qui englobe et organise tous les métiers d'art.

Malheureusement, la vision qu'ont les décideurs de l'artiste reste encore de mauvaise augure. On n'arrive pas encore à traiter avec l'artiste en tant que partenaire. Pour certains, l'art est considéré comme un passe temps. Alors, je leur dirais qu'une société peut également être gérée par ses artistes et ses créateurs et non pas seulement par ses politiciens. Les artistes doivent donc être impliqués dans toute prise de décision, comme ce qui se passe en Europe, par exemple.

Quelle est la meilleure toile que vous aviez peinte jusqu'à présent ?

C'est celle que je vais peindre. Elle sera le fruit de mon parcours et le prolongement des sujets traités. Cette toile sera certainement réalisée dans la fraîcheur d'un certain matin, car j'aime peindre tôt la matinée.
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