Ripoux le retour, mais version sombre. A mille lieues du cinéma-farce de Claude Zidi, comme, d'ailleurs, du Quai des orfèvres (1947) de Henri-Georges Clouzot avec Louis Jouvet, Olivier Marchal s'inspire plutôt de l'excellent Heat de l'Américain Michael Mann (1995). En lieu et place des deux monstres du polar made in USA, Robert de Niro et Al Pacino, le réalisateur français a élu Daniel Auteuil et Gérard Depardieu.
Un casting de luxe pour un polar «à la française » de grande envergure, agrémenté de seconds rôles renommés comme André Dussollier, Roschdy Zem et Daniel Duval. 36, quai des orfèvres s'annonçait flamboyant dès la bande-annonce. Mais Olivier Marchal n'a ni le style ni la maîtrise de Michael Mann. Résultat : son film trempe dans une brume de violence sourde et de nostalgie blafarde, sans les images ni la musique qui vont avec. Des prises de vue honorables enchaînent de bonnes idées photo mais sans projet esthétique. Une bande son trop présente déverse en permanence un flot inadapté assez contrariant. Sans ses dialogues travaillés et ses comédiens exemplaires, 36, quai des orfèvres aurait dû se contenter de la mention téléfilm.
Tiré d'un vrai scandale, le synopsis ne manquait pourtant pas de souffle. Ancien flic lui-même, Olivier Marchal s'est inspiré de deux affaires qui ont secoué la police judiciaire française dans les années 80. La première est une opération-fiasco. Deux brigades concurrentes - la BRI (Brigade de Recherche et Intervention) et la BRB (Brigade de Répression du Banditisme) - s'étaient associées pour démanteler un gang. Pour se faire mousser, le chef de service de la BRB avait ouvert le feu, entraînant une fusillade qui s'est soldée par la mort d'un voyou et d'un collègue de l'autre brigade.
Suite à cela, le Quai des orfèvres s'est embourbé dans une histoire de malversations que l'administration a été accusée de couvrir pour épargner ses membres. Olivier Marchal s'est servi de ces deux «bavures» pour dresser un hommage appuyé à l'un de ses anciens collègues qui a fini broyé par la machine d'Etat et ses guerres intestines. A l'écran, cet homme est interprété par Daniel Auteuil, alias Léo Vrinks. Un flic d'élite aux méthodes douteuses mais efficace et intraitable. Un grand flic en somme, tel que son rival Denis Klein (Gérard Depardieu), ne sera jamais. Car celui-ci, assoiffé de pouvoir, alcoolique et truand jusqu'à la moelle, ne recule devant aucune bassesse pour s'octroyer la place du Directeur de la Sûreté (André Dussollier).
Un peu de pathos
dans ce monde de brutes
En dépit de la rancœur qui doit l'animer, Olivier Marchal a conservé une part de tendresse pour ce milieu de durs. Pour preuve, les adjudants de Léo Vrinks, gars dévoués à la larme facile. Entre détails véridiques - la plaque « Quai des orfèvres » volée pour fêter une mutation - et violence réaliste, la charge de vécu confère au film son certificat d'authenticité. Mais le justicier Marchal ne résiste ni à la surdose d'émotion ni à un laïus faiblard sur la corruption des hommes : le héros est ambivalent, c'est ce qui lui donne du crédit.
Car le pire selon le réalisateur, c'est la rectitude absolue, entre autres celle des juges aveugles. Heureusement que les femmes et les enfants sont là pour redresser la barre morale.
La rage misanthrope qui anime 36, quai des orfèvres est peut-être le meilleur ingrédient d'un scénario alourdi par des clichés dignes des plus plates séries policières. En dépit de quelques numéros d'esbroufe, le montage est d'une banalité absolue : la mise en place, la bavure, la douleur, la vengeance. Les scènes d'action sont en revanche bien vitaminées, mais le tempo résulte surtout des dialogues. Trop portés sur le mot d'auteur et les métaphores grandiloquentes, ils n'en arment pas moins, via les comédiens, l'ensemble de l'architecture. Le réalisateur renoue ainsi avec le film policier français traditionnel qui se définissait essentiellement par le jeu de ses interprètes, Gabin et Ventura cédant la place à Auteuil, Dussollier et Depardieu.
André Dussollier s'en tire avec l'aisance du grand professionnel. Gérard Depardieu, que certains se réjouiront de voir abandonner ses tics habituels, s'empêtre néanmoins dans une expressivité excessive. Mais Daniel Auteuil crève l'écran. Charismatique, magnétique, il confère au film la prestance dont la réalisation est dépourvue.
36, quai des Orfèvres, film français de Olivier Marchal, avec Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, André Dussollier, Valeria Golino, Roschdy Zem. Durée : 1h50.
Un casting de luxe pour un polar «à la française » de grande envergure, agrémenté de seconds rôles renommés comme André Dussollier, Roschdy Zem et Daniel Duval. 36, quai des orfèvres s'annonçait flamboyant dès la bande-annonce. Mais Olivier Marchal n'a ni le style ni la maîtrise de Michael Mann. Résultat : son film trempe dans une brume de violence sourde et de nostalgie blafarde, sans les images ni la musique qui vont avec. Des prises de vue honorables enchaînent de bonnes idées photo mais sans projet esthétique. Une bande son trop présente déverse en permanence un flot inadapté assez contrariant. Sans ses dialogues travaillés et ses comédiens exemplaires, 36, quai des orfèvres aurait dû se contenter de la mention téléfilm.
Tiré d'un vrai scandale, le synopsis ne manquait pourtant pas de souffle. Ancien flic lui-même, Olivier Marchal s'est inspiré de deux affaires qui ont secoué la police judiciaire française dans les années 80. La première est une opération-fiasco. Deux brigades concurrentes - la BRI (Brigade de Recherche et Intervention) et la BRB (Brigade de Répression du Banditisme) - s'étaient associées pour démanteler un gang. Pour se faire mousser, le chef de service de la BRB avait ouvert le feu, entraînant une fusillade qui s'est soldée par la mort d'un voyou et d'un collègue de l'autre brigade.
Suite à cela, le Quai des orfèvres s'est embourbé dans une histoire de malversations que l'administration a été accusée de couvrir pour épargner ses membres. Olivier Marchal s'est servi de ces deux «bavures» pour dresser un hommage appuyé à l'un de ses anciens collègues qui a fini broyé par la machine d'Etat et ses guerres intestines. A l'écran, cet homme est interprété par Daniel Auteuil, alias Léo Vrinks. Un flic d'élite aux méthodes douteuses mais efficace et intraitable. Un grand flic en somme, tel que son rival Denis Klein (Gérard Depardieu), ne sera jamais. Car celui-ci, assoiffé de pouvoir, alcoolique et truand jusqu'à la moelle, ne recule devant aucune bassesse pour s'octroyer la place du Directeur de la Sûreté (André Dussollier).
Un peu de pathos
dans ce monde de brutes
En dépit de la rancœur qui doit l'animer, Olivier Marchal a conservé une part de tendresse pour ce milieu de durs. Pour preuve, les adjudants de Léo Vrinks, gars dévoués à la larme facile. Entre détails véridiques - la plaque « Quai des orfèvres » volée pour fêter une mutation - et violence réaliste, la charge de vécu confère au film son certificat d'authenticité. Mais le justicier Marchal ne résiste ni à la surdose d'émotion ni à un laïus faiblard sur la corruption des hommes : le héros est ambivalent, c'est ce qui lui donne du crédit.
Car le pire selon le réalisateur, c'est la rectitude absolue, entre autres celle des juges aveugles. Heureusement que les femmes et les enfants sont là pour redresser la barre morale.
La rage misanthrope qui anime 36, quai des orfèvres est peut-être le meilleur ingrédient d'un scénario alourdi par des clichés dignes des plus plates séries policières. En dépit de quelques numéros d'esbroufe, le montage est d'une banalité absolue : la mise en place, la bavure, la douleur, la vengeance. Les scènes d'action sont en revanche bien vitaminées, mais le tempo résulte surtout des dialogues. Trop portés sur le mot d'auteur et les métaphores grandiloquentes, ils n'en arment pas moins, via les comédiens, l'ensemble de l'architecture. Le réalisateur renoue ainsi avec le film policier français traditionnel qui se définissait essentiellement par le jeu de ses interprètes, Gabin et Ventura cédant la place à Auteuil, Dussollier et Depardieu.
André Dussollier s'en tire avec l'aisance du grand professionnel. Gérard Depardieu, que certains se réjouiront de voir abandonner ses tics habituels, s'empêtre néanmoins dans une expressivité excessive. Mais Daniel Auteuil crève l'écran. Charismatique, magnétique, il confère au film la prestance dont la réalisation est dépourvue.
36, quai des Orfèvres, film français de Olivier Marchal, avec Daniel Auteuil, Gérard Depardieu, André Dussollier, Valeria Golino, Roschdy Zem. Durée : 1h50.