Menu
Search
Lundi 29 Décembre 2025
S'abonner
close
Lundi 29 Décembre 2025
Menu
Search

L’IMA accueille les œuvres de l’artiste chilien sur le Maroc

Pays où le soleil se couche, le Maroc tire sa beauté de lumières sublimes ; celles-là même qui charment le peintre chilien, Claudio Bravo, quand il découvre Tanger en 1971. L’exposition monographique que lui consacre l’Institut du monde arabe,

No Image
L’œuvre de Claudio Bravo doit sa singularité au parcours cosmopolite de son auteur qui, du Chili au Maroc en passant par New York, Madrid et Hong Kong, cultive une haute idée de l’altérité et pose un certain regard sur la réalité. Il émigre en Espagne à 35 ans, pays dans lequel il étudie les toiles des grands maîtres du musée du Prado et acquiert une reconnaissance internationale en tant que portraitiste.

Mais c’est au Maroc qu’il installe définitivement son atelier, «fasciné par la composition des choses dans ce pays (…), bouleversé par l’utilisation des couleurs qui y est faite dans la vie de tous les jours».

Claudio Bravo, qui affirme qu’«un artiste peut être à la fois moderne et orientaliste», se défend pourtant d’une quelconque parenté avec les peintres orientalistes du XIXe siècle. Selon lui, même les plus grands créateurs du siècle conquérant, tels Delacroix ou Fromentin, accordèrent trop d’attention à l’anecdote et trop peu au sens pictural de leur travail. Or c’est avant tout à travers l’exploration des couleurs que Claudio Bravo construit son Orient : «Ici, au Maroc, confie-t-il, j’ai pu développer une palette peut-être égale en audace à celle des plus grands coloristes de l’histoire de l’art».

Le sang de ce peintre chilien est celui d’un colonisé ; Claudio Bravo ne pourra jamais porter sur ces terres arabe et musulmane, le regard complexé du colonisateur, qu’Edward W. Saïd dénonça, en son temps, dans son fameux essai sur l’orientalisme. Ses toiles ne soutiennent aucun discours, ni moral ni politique ; son regard officie avec l’obsession de représenter le monde tel qu’il est. La Méditerranée et les ruelles du quartier populaire de Marshan à Tanger, qu’il observe depuis les fenêtres de sa demeure et à qui il emprunte lumières et couleurs, restent ses muses suprêmes dans un univers qu’il comprend «de l’intérieur».

------------------------------------------------------------------------------------------------

L’Institut du monde arabe fait connaître un artiste passé à l’Orient, et porteur d’un regard éclairé sur un monde en mal de reconnaissance.

«Claudio Bravo prétend qu’une fois une toile est signée, elle ne l’intéresse plus. Il passe à une autre avec facilité sans se sentir attaché à sa dernière création.
Il veut nous dire qu’une œuvre tue l’autre, elle la pousse vers l’extérieur, vers la galerie où un collectionneur ou un simple amateur la fera entrer dans son intimité. Il est vrai que Claudio Bravo a toujours une toile en cours ; il n’est jamais seul, il est tout le temps face au modèle et à la toile. Pas de temps mort entre deux tableaux.

Pas de répit ni de repos, car l’artiste est malade quand il ne peint pas. Il a besoin de peindre, c’est vital, c’est insupportable pour lui de se trouver face au vide, le néant dont il a peur mais qu’il n’ose pas représenter

comme il a une peur panique de la foule et surtout des mondanités. Alors il enchaîne toile après toile. Le miracle c’est qu’il ne se répète pas et qu’il réussit toujours à nous émouvoir, à nous intéresser. Il est incapable d’expliquer la beauté et l’harmonie de ses toiles. Il n’y a rien de calculé, rien de manipulé. Il sait qu’il y a un mystère dans tout travail de création. Il y tient et ne dit plus rien».

Tahar Benjelloun
Extrait du catalogue de l’exposition

Lisez nos e-Papers