Si déjà vers les années 60, la ville de Salé disposait de deux des plus anciennes salles de cinéma au Maroc, la cité ne compte actuellement que cinq dont une est fermée, ce qui est peu aux yeux des observateurs.
Signe d'une précarité culturelle, cela s'ajoute à leur délabrement repoussant toute réconciliation des cinéphiles avec le 7-ème art.
"Il ne reste que quatre ou cinq salles de cinéma et leur état ne peut en aucun cas inciter le public à regagner le chemin des salles, la reinstauration des salles qui restent et la création d'autres s'avèrent nécessaires pour pouvoir accompagner les efforts qui se déploient ici et là", a déclaré à la MAP Ahmed Boulane, un metteur en scène natif de cette ville qui se rappelle encore l'envie que suscitait le fait d'aller à l'époque au cinéma et surtout l'ambiance et la "liberté" qui régnaient dans cet espace nocturne.
La ville de Salé, selon l'auteur de "Ali, Rabia et les autres", a longtemps été "victime de sa proximité de la capitale du Royaume" et il est temps que cette cité antique ait son festival, son rendez-vous culturel et ses moments de fierté, vu les gens du cinéma auxquels elle a donné naissance ainsi que son rôle historique prépondérant. "Cette ville mérite franchement d'avoir sa fenêtre à elle pour réaliser une ouverture sur le monde", a-t-il estimé.
S'il y a dans le monde des villes qui se sont distinguées juste par leurs festivals et qui ont pu, bon an mal an, ériger ces manifestations cinématographiques en locomotives du développement socio-économique, pourquoi pas la ville de Salé qui commence à faire montre de la volonté de transcender sa situation actuelle.
Les exemples ne manquent pas, la région de Toscane en Italie qui ne cesse de s'enorgueillir d'avoir donné le jour à des génies comme Giotto, Michel-Ange, Botticelli, Machiavel, ne doit en fait sa notoriété internationale qu'au 7-ème art et surtout aux frères Taviani. Les deux metteurs en scène ont, effectivement, su contourner, à la faveur de la caméra, les différentes entraves pour faire de leur région l'une des plus visitées en Italie, la majeure partie de leurs films étant tournés dans cette région.
En fait, le public slaoui qui cherche désespérément des espaces appropriés qui lui permettent de visionner des films de qualité dans des conditions respectables ainsi que les intellectuels qui espèrent que le démarrage de cette manifestation cinématographique soit accompagné d'un élan socio-économique, ne peuvent se contenter du seul complexe du Dawliz et exigent que leur ville se transforme désormais en chantier de construction dans tous les sens. Dans cet ordre d'idées, l'ancien président de la fédération nationale des ciné-clubs du Maroc (FNCCM), Mohamed Arious s'est dit optimiste pour l'avenir, précisant que "les mêmes questions se posaient aux débuts du festival du cinéma africain de Khouribga, mais maintenant cette ville connaît l'un des complexes culturels les plus modernes du Maroc".
Critique de cinéma, Mohamed Arious a expliqué que "cette manifestation pourrait être ce déclic dont avait besoin la ville de Salé afin qu'elle se mette à niveau et qu'elle soit à la hauteur d'un festival d'une portée internationale en réalisant un élan global".
Par ailleurs, ce qui permettra d'adopter une approche participative, souhaitable dans ce genre de manifestations, c'est le fait d'amener les citoyens à considérer ce festival comme un moyen d'auto-instruction et un carrefour où ils puissent échanger leurs opinions concernant la situation culturelle de la ville. Ils doivent se sentir maîtres du sort de leur ville.
