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Talaa Saoud Al Atlassi, membre du bureau politique du PSD : «L'affaire du Sahara a contribué à la démocratisation du pays. Et c'est la démocratie qui résoudra ce dossier»

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Les propos tenus récemment par Ali Salem Tamek, l'ancien détenu qui vient d'être gracié, ont provoqué de vives réactions. Comment interprétez-vous ces propos ? Les mettez-vous sur le compte de la liberté d'expression ou d'une traîtrise à une cause nationale ?

Il y a deux manières d'interpréter les déclarations de ce citoyen. Le premier niveau est d'abord de dire que de tels propos ne peuvent que choquer n'importe quel Marocain… De telles déclarations sont à l'encontre de nos principes nationaux, de nos droits nationaux en tant que peuple marocain, du Sahara au Nord en passant par l'Oriental. Il est évident que ces propos proviennent d'un individu qui fait visiblement montre d'une grande dose d'opportunisme.

Il profite de la démocratie marocaine, des droits et des espaces de liberté que cette même démocratie lui procure. Plus encore, il a profité d'une grâce Royale dont il a fait l'objet pour des raisons humanitaires. Cet individu et ses déclarations sont en fait une sorte de produit de la démocratie. Le mouvement de démocratie que connaît le pays ne produit pas seulement l'action responsable mais aussi l'acte opportuniste et également l'acte contraire à la démocratie.

Il reste que je ne donne pas de valeur ni d'importance aux déclarations de cette personne. Et c'est justement cela le deuxième niveau de comportement face aux déclarations en question. Leur auteur ne représente en aucun cas les milieux dignes de respect au Sahara. Il ne représente ni tribu, ni partis, ni instances qui ont des responsabilités ou de l'influence.

Il s'est tout de même présenté aux élections !

Cela ne veut absolument rien dire. Des milliers de candidats se sont présentées aux élections. Cette personne n'est d'ailleurs pas originaire des provinces objet du différend. Cet homme a une histoire médiocre, pour ne pas dire pas d'histoire du tout. La meilleure manière d'appréhender à mes yeux ce sujet, c'est justement de l'ignorer.

Est-ce pour cela que les partis politiques n'ont pas réagi à ces déclarations ? Est-ce bien normal un tel silence ?

Il est du devoir national de réagir pour dire la vérité marocaine objective et naturelle selon laquelle le Sahara est marocain. Ses habitants sont à l'avant-garde de ceux qui se battent pour sa marocanité. Ceux du Sahara étaient et sont toujours, depuis l'Armée de Libération et jusqu'à nos jours, aux premiers rangs de ceux qui ont défendu le Sahara en revendiquant son retour à la mère patrie.
A mon avis, de telles déclarations émanant d'un tel individu n'ont pas d'avenir.

Il n'est pas du tout productif de s'en préoccuper. Ce serait une perte de temps voire même une manière de lui fabriquer de manière artificielle une place dans la vie politique. Ce qui serait un comble ! Je sais et je suis convaincu que les personnes originaires du Sahara qui se trouvent dans les différentes villes du Maroc y compris celles de nos provinces du Sud sont l'écrasante majorité qui défend la marocanité du Sahara.

C'est cette voix-là, la voix de cette majorité qu'il faudra sans cesse faire entendre pour que soient couvertes toutes ces petites voix marginales. Mais il est par ailleurs nécessaire que de telles voix et opinions, aussi marginales soient-elles, puissent exister sachant que ce sont des opinions minoritaires. Au Sahara il y a des acquis et des réalisations très importants. Dans le même temps et comme dans n'importe quelle autre région du Maroc, il y a des problèmes comme ceux qu'on rencontre ailleurs et ce en matière d'habitat, de santé, d'enseignement, d'emploi, etc.

Au Maroc, au niveau du mouvement démocratique, il y a des cas, des avis extrémistes, nihilistes. Il en est de même au Sahara. Il ne faut pas craindre cela et en faire une affaire. En Europe par exemple, il y a bien des mouvements extrémistes. Ils existent, ont pignon sur rue mais n'ont aucune influence. Ce que je veux dire, c'est que les grands mouvements sociaux sont conduits par les Etats, les partis, les sociétés civiles.

Dans le même temps, il y a une erreur qui a été commise par les partis : leur quasi-absence dans les provinces du Sud et leur non-encadrement de la population. Comment expliquez-vous cela ?

Je ne suis pas d'accord. Il n'y a pas eu absence complète des partis au Sahara. Le mouvement démocratique y est présent et les partis politiques y ont toujours présenté des candidats aux élections.
Mais c'était ponctuel car électoral…

Non pas du tout ! Ma famille politique, le PSD et auparavant l'OADP, avaient et ont des locaux dans les provinces du Sud. Nous y avons des militants. Il en est de même pour d'autres comme l'USFP, l'Istiqlal, le PPS et d'autres. La relation entre les partis du mouvement national et le Sahara est ancienne et trouve ses origines dans la lutte nationale dans la libération du Maroc à travers la résistance et l'armée de libération, etc. Une telle relation s'est poursuivie.

Il est vrai que les partis ont pris en considération le fait que la situation du Sahara est particulière sur le plan sécuritaire. Leur présence n'était donc pas aussi importante qu'ailleurs à travers le pays. C'est comme si les partis étaient confrontés à une sorte de spécificité par rapport à cette région. Il s'agit aussi de dire que des erreurs avaient été commises par l'Etat durant des décennies. Depuis 1975 et jusqu'en 1999, la méthodologie était d'abord sécuritaire drapée dans le concept de «l'affaire d'Etat».

Les partis en ont souffert. Il n'était pas à l'époque facile de se présenter aux élections ou d'organiser des meetings politiques. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il y a aujourd'hui une vision autre et une méthode de travail tout à fait différente qui peut se résumer au libre accès à tout le monde y compris au Sahara et ce dans le respect de la loi, bien évidemment.

Aujourd'hui, la volonté exprimée au plus haut niveau de l'Etat de soutenir le projet de démocratie a provoqué un élargissement de mouvement et d'action. Il y a une plus grande responsabilisation des partis . La question du Sahara a représenté un élément fondamental dans l'évolution de la démocratie au Maroc. Je veux parler du consensus national autour du Sahara et le combat de tous les Marocains pour la récupération de nos provinces a constitué un élément nodal dans le déclenchement du processus démocratique, en 1975. Depuis lors, il y a eu organisation d'élections, ouverture du Parlement jusqu'à l'aboutissement de l'alternance.

La question du Sahara a drainé l'idée de la nation et celle de Marocains vivant dans une même nation, défendant une seule cause. Tout cela est venu après une page d'affrontements et la question du Sahara est venue nous dire de travailler ensemble pour libérer nos provinces du Sud mais aussi pour développer tout le pays. L'un des éléments de développement est bien la démocratie. Aujourd'hui, nous assistons à l'inverse.

La résolution de l'affaire du Sahara réside dans la démocratie. La démocratisation marocaine conduira à l'intégration dans la prise de décision politique, économique, sociale, culturelle de tous les enfants du pays, dans toutes les catégories sociales et à travers toutes les régions.

La participation populaire résout bien des problèmes. Partout à travers les villes du pays, le citoyen doit pouvoir ressentir qu'il a droit à la participation, à faire des revendications, à avoir une opinion. Bref, l'affaire du Sahara a contribué à la démocratisation du pays et aujourd'hui la démocratie résoudra le dossier du Sahara. De ce projet démocratique, naîtra la régionalisation mais aussi une gouvernance nouvelle.
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