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Vient de paraître : les Fables de la Fontaine en Amazigh

Belgacem Ait ouyahia vient de publier l'adaptation en Amazigh des fables de la fontaine. Ce travail est né de l'amour de deux langues, l'une «paternelle», le français que mon père, «instituteur d'origine indigène» m'enseigna le premier, l'autre, maternell

Vient de paraître : les Fables de la Fontaine en Amazigh
Les fables apprises par coeur à dix ans, restent , à soixante-dix, intactes-ou presque - dans la mémoire, et quand alors on les relit, on les redécouvre et l'on est conquis, et disons le mot, émerveillé (surtout quand, à vos côtés, brillent les yeux d'une enfant...) par les fables du «bon Jean ¨ou plutôt par la vérité. Une vérité de tous les temps et de tous les pays...

Certains tableaux - car les fables sont autant de peintures - reproduisent si bien des scènes universelles qu'on peut facilement s'imaginer que leur action se situe aussi bien en France qu'ailleurs... En Kabylie : je dirais même spécialement en Kabylie, tant je trouve proches, par je ne sais quelle magie, les vers de La Fontaine et les mots et le rythme de la poésie kabyle. Puisse ma tentative donner en quelque endroit l'illusion et le bonheur de cet enchantement!

Ce sont bien les mêmes scènes. Pour les rendre «cent pour cent» kabyles, il suffisait de troquer l'arbalète du croquant pour le fusil, l'abeckid du tieur de lapins, le reste, le plus important pour la morale de l'histoire, i lmeâna n teqsit, demeurant inchangé, le talon, agwerz, du pied nu, hafi, qui sera piqué par la fourmi reconnaissante.

IL n'y pas de loup en Kabylie - je ne pense pas d'ailleurs qu'il y en ait jamais eu, même aux temps immémoriaux -, mais qu'à cela ne tienne! le chacal fera l'affaire, le chacal fera l'affaire, le chacal, «ce loup aux poils blonds»; quant au renard , puisque le «domestique», semble -t-il, se fait rare, on fera remontrer un cousin des confins du désert, pour lui faire rencontrer son compère, le corbeau, qui, en kabyle, changera de genre, sino de sexe, pour devenir... commère, tagerfa tasettaft, noire de tant de péchés; et puis, nous avons tout le reste, comme tout le monde: la cigal et la fourmi, le meunier, son fils et l'âme le bûcheron, le vieil homme, les jeunes hommes, les jeunes filles, la veuve.... la mort.

Il y aura aussi peut- être des jeunes hommes du voisinage, ou d'ailleurs, qui , découvrant ce livre vont me crier:
Passe encore de traduire, mais adapter!
Tes jours , on finira bientôt de les compter.
La tâche n'aura pas été aisée. j'en conviens/
Et dans cette gageure, il fallait que j'ose
Inverser-c'esy ainsi - l'ordre normal des choses,
Et, tentant d'oublier ma douleur et mes cris,
L'oral m'étant acquis, réussir à l'écrit.

Tâche d'autant plus difficile que j'écris en kabyle pour la première fois.
Les berbérophones - ou amazighophones, comme on dit aujourd'hui - suivront le texte sans trop de difficultés en s'aidant, au besoin, pour retrouver tel mot où les sons s'entremêlent, les k avec les q, les d avec les dê , les h avec les hê, les t avec les tê ou les ts, ect, du guide qui sera joint, qui indiquera les lettres et les sons correspondants.
Ceux qui ont la chance d'être en même temps arabophones verront leur lecture facilitée d'autant.

Quant aux francophones, ils retrouveront sans doute avec curiosité, sinon avec joie, peut - être même émotion, les textes de leurs fables préférées, dans une vieille édition de 1829, scrupuleusement reproduits avec l'orthographe de l'époque (enfans, momens... sans t) et jusquà la ponctuation où la virgule a toujours sa place avant le «et» jointif, et où les guillemets, semble - t-il, n'étaient pas encore de rigueur...
Par ailleur ils pourraont lire, et j'espère qu'ils y trouveront quelque plaisir et en souriront parfois, la traduction «simultanée» de l'adaptation kabyle, un ersatz, en quelque sorte, des fables originelles.

A la fin du livre VI de se fables, aprés la fable 21, la jeune veuvre, - qui se trouve être la dernière de mon adaptation - la fontaine, dans un épilogue, écrivait:
Bornons ici cette carrière;
Les longs ouvrages me font peur.
Loin d'épuiser une matière,
On n'en doit prendre que la fleur.

Pour ma part, aprés avoir imité la Fontaine - c'est le mions qu'on puisse dire, mais mon imitation, comme il l'écrivait de la sienne par rapport (comme on dit aujourd'hui) à Esope, mutatis mutandis; mon imitation n'est pas un esclavage - apré avoir «transmuté» une vingtaine de ses fables, je m'en vais ou je m'en vas, l'un et l'autre se dit ou se disent... encore le suivre, pour ne pas dire le copier jusque dans son épilogue:
Je ne sais si des fables j'ai choisi la fleur;
Ici se borne mon ouvrage. Quel bonheur
S'il pouvait trouver - et j'en aurais mon comptant -
Faveur des Algériens et Français tout autant!
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